Une étude d’ampleur montre qu’un Français de plus de 30 ans sur deux est atteint de surpoids. Les inégalités sociales y sont pour quelque chose.
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Gloups. Mardi 25 octobre, une analyse d’ampleur réalisée par l’Inserm sur la population indique qu’environ un Français sur deux est en surpoids. Ce travail a été réalisé auprès de 29 000 participants tirés au sort âgés de 30 à 69 ans en 2013 et répartis à égalité presque parfaite entre les deux sexes. Comme le note Le Monde, l’étude marque par son ampleur et sa méthodologie – et peut donc être prise au sérieux.
Les sujets de l’étude ont été pesés, mesurés et soumis à des examens sanguins et cardiovasculaires. En plus du calcul de l’indice de masse corporelle (IMC), souvent mètre-étalon de la mesure du surpoids, cette analyse a également pris en compte un nouvel indicateur, comme note RTL : l’obésité abdominale. On la caractérise par un tour de taille d’au moins 94 centimètres chez un homme et 80 cm chez une femme.
L’analyse des données fait apparaître que 41 % des hommes de cette large tranche d’âge sont touchés par le surpoids et 15,8 % par l’obésité. Pour les femmes, c’est respectivement 25,3 % et 15,6 %. Surpoids et obésité confondus, 56,8 % d’hommes et 40,9 % de femmes sont en surcharge pondérale.
Pourquoi un déséquilibre hommes/femmes aussi marqué ? Les scientifiques ont bien du mal à se le justifier et avancent dans Le Monde des facteurs culturels, comme le fait “qu’un homme ‘enveloppé’ ou ‘rondouillard’ jouit d’une image sociale moins négative qu’une femme ‘grassouillette'”. Bref, on ne sait pas trop l’expliquer.
Autre déséquilibre : l’âge. Si 10,4 % de la population masculine et 11,4 % de la gent féminine se trouvent en situation d’obésité à 30 ans, c’est le cas pour respectivement 20,8 % et 18,8 % à 60 ans. On note également des différences géographiques : Le Parisien relève que le taux d’obésité s’établit à 10,7 % à Paris, contre 25,6 % dans le département du Nord ou 23 % en Meurthe-et-Moselle.
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Le surpoids, conséquence d’une injustice sociale
D’après le nutritionniste Sébastien Czernichow, interrogé ce mardi 25 octobre sur France Info, ces résultats montrent des disproportions de sexe, d’âge et de lieu de résidence, mais révèle surtout une fracture sociale :
“Cette étude confirme ce qu’il y a dans de nombreux pays, c’est-à-dire qu’il y a une forte corrélation entre niveau de revenu et la fréquence de l’obésité.” D’après lui, les produits gras et sucrés “sont les plus accessibles”.
Parmi la population féminine, 30,7 % des femmes sont en situation d’obésité lorsqu’elles gagnent moins de 450 euros par mois ; de l’autre côté du spectre, on ne dénombre que 7 % de femmes obèses parmi celles jouissant d’un salaire de 4 200 euros par mois. Si l’écart est moins élevé chez les hommes, il montre la même tendance : il y a 18,7 % d’obèses chez ceux gagnant moins de 450 euros contre 9,1 % chez ceux dont les revenus dépassent 4 200 euros.
“Plus on est pauvre, plus on est soit super maigre, soit super gros”
Au fond, ce n’est pas une surprise. Déjà en 2010, dans un article fort bien documenté intitulé “Vie de merde, bouffe de merde, corps de pauvres”, le site d’information Owni (RIP) n’y allait pas par quatre chemins.
Le sociologue Laurent Chambon explique que l’attrait pour la malbouffe, favorisée par les inégalités géographiques et salariales, est davantage responsable du phénomène d’obésité chez les pauvres que le fait d’être “paresseux ou gourmand”. Dans cet article, avec son Essonne natale, il prend l’exemple des États-Unis pour s’expliquer :
“Qui connaît les États-Unis sait que plus on est pauvre, plus on est soit super maigre, soit super gros. Les corps des Américains signent leur appartenance à une classe sociale, bien avant leur accent ou leurs vêtements. Les riches ont des corps athlétiques et des dents parfaites, les pauvres n’ont ni l’un ni l’autre, et la classe moyenne essaye de limiter les dégâts pour ne pas trop ressembler aux pauvres […]
Manger sainement demande des ressources pécuniaires et organisationnelles que les pauvres ne peuvent pas se permettre.”
En France, même si elle a tendance à se freiner, l’obésité est en augmentation constante. Comme le rappelle Slate, En France la proportion des personnes obèses est passée de 5,5 % (en 1992) à 12,4 % (en 2006) puis 14,5 % (en 2009).