Alors qu’à une semaine des élections législatives au Maroc la plupart des partis politiques promettent plus de parité, le Parti de la renaissance et de la vertu, un parti islamiste du royaume, se fait remarquer par de curieux tracts où le visage de ses candidates femmes est “censuré”.
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Ce tract du Parti de la renaissance et de la vertu (PRV) serait passé inaperçu au Maroc, à quelques jours des élections législatives, sauf que le parti, qui a pour logo un soleil, a choisi de mettre de l’ombre sur ses candidates femmes, représentées par un visuel standard incarnant une femme voilée sans visage.
“Institutionnaliser la misogynie”
Le tract a circulé comme une traînée de poudre sur les réseaux sociaux, provoquant de vives réactions chez les internautes et les militants pour les droits de l’homme. “La misogynie institutionnelle et l’inégalité comme matrice politique, un si beau projet de société… pauvre de nous”, a ironisé Mehdi Alioua, sociologue et professeur à Sciences Po Rabat, entre autres commentaires critiques à l’encontre de la décision du parti, connu pour séduire la communauté salafiste au Maroc.
Toujours sur Facebook, d’autres internautes ont remis en doute la capacité de ces femmes à défendre l’intérêt des citoyens si leur parti parvenait à remporter les élections. “Comment feront-elles pour défendre nos intérêts si elles ne montrent pas leur visage ?” ou encore “Si elles remportent un siège au Parlement, vont-elles s’y rendre en burqa ?”, s’interrogent certains activistes pour les droits des femmes au Maroc.
Respecter leur choix “au nom de la modernité”
Face à ce tollé, le secrétaire général du PRV, Mohamed El Khalidi, a expliqué que son parti n’a jamais censuré les photos de ses candidates femmes. “Dans notre formation politique, il n’y a aucune différence entre les hommes et les femmes. Certaines sœurs au sein du parti n’ont pas voulu figurer au sein des tracts, de peur que leur image ne soit exploitée”, s’est-il défendu lors d’une interview accordée au pure player marocain Febrayer.
Pour le responsable politique, “c’était déjà difficile d’encourager certaines femmes voilées à se présenter aux élections, parce que pour certaines, la politique relève de la mission de satan”. Mohamed El Khalidi a également appelé à respecter le choix de ces femmes, “au nom de la liberté individuelle que défendent les modernistes”. Dans la foulée, le PRV a posté sur sa page Facebook le tract de l’une de ses rares candidates non voilées, afin de balayer d’un revers de main les accusations de misogynie auxquelles la formation politique islamiste fait actuellement face.
Des mesures pour plus de parité au Parlement
Au Maroc, où ce fait a été considéré comme une “première” par la presse nationale, le gouvernement a pourtant instauré des lois qui visent à encourager la présence des femmes dans la politique. La loi régissant la chambre basse du Parlement réserve 60 sièges aux femmes sur les 395 que compte cet organe du pouvoir législatif. Un quota jugé “insuffisant” par certains constitutionnalistes marocains, surtout depuis la révision de la Constitution marocaine en 2011, qui défend davantage la parité entre hommes et femmes.
Cet “incident” rappelle des faits similaires qui ont été constatés en Égypte. En septembre 2011, lors des élections législatives de la République présidée par le général Al-Sissi, le parti Al-Noor avait préféré remplacer les photos de ses candidates femmes par… des roses. Le parti salafiste égyptien avait d’ailleurs prétexté le même motif pour répondre à la polémique : “Nos candidates ont la liberté de montrer ou de cacher leur visage si elles le souhaitent.” Un choix qui n’était curieusement pas proposé aux candidats hommes.