Pedro Almodovar, trois ans à la tête d’une société offshore
Patatras dans le cinéma espagnol de gauche : les noms de Pedro Almodovar et de son frère Agustin, son producteur, figurent en bonne place parmi les révélations des “Panama Papers”. Le tandem est épinglé pour avoir détenu entre 1991 et 1994 une société offshore nommée Glen Valley Corporation, domiciliée dans les îles Vierges britanniques et administrée par… le cabinet Mossack Fonseca, au centre du scandale. Inquiet de devoir répondre à aux questions sur son implication dans cette affaire, le cinéaste a annulé sa participation à la promotion de son nouveau long métrage, Julieta.
Endossant toute la responsabilité, Agustin Almodovar explique la constitution de cette société par “la recommandation de (ses) conseillers, face à une possible expansion internationale de l’entreprise”. Il se déclare désormais “en règle avec toutes les obligations fiscales”. Les journalistes n’ont pas pu en savoir plus sur l’utilisation faite de la société. Il n’empêche, c’est un coup dur pour l’image de ce cinéaste reconnu pour avoir été une tête de proue de la fameuse Movida et avoir pourfendu dénoncé la cure d’austérité mise en place par gouvernement espagnol.
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Jackie Chan, six sociétés “au moins”
A l’autre bout de la planète, c’est un autre grand nom du cinéma populaire qu’on retrouve dans les révélations des “Panama Papers”. D’après les documents de Mossack Fonseca, Jackie Chan est actionnaire de six sociétés sises aux îles Vierges britanniques. On en sait encore assez peu sur le cas de l’acteur chinois, si ce n’est qu’il a détenu “au moins six sociétés”, d’après TIME.
Le Consortium international des journalistes d’investigation explique toutefois qu’il n’y a aucune preuve que l’argent du natif de Hong Kong ait servi à des activités illégales. Un peu vache, Paris Match rappelle que son compagnon de jeu dans Rush Hour, Chris Tucker, avait lui été condamné à verser 14 millions de dollars (12,2 millions d’euros) au fisc américain.
Stanley Kubrick, exit la taxe d’héritage
Le nom du cinéaste Stanley Kubrick apparaît également dans le listing des “Panama Papers”. Il s’agit plus précisément de ses filles, qui ont administré son manoir du Hertfordshire, dans lequel il s’est exilé à la fin de sa vie, à travers des sociétés offshore.
A la mort du cinéaste en 1999, la propriété de la demeure est passée entre les mains de trois sociétés différentes aux îles Vierges britanniques, ce qui a permis à la famille de ne payer des dizaines de milliers de livres de taxe d’héritage. Les “Panama Papers” échouent toutefois à révéler si c’est le cas, ou pas.
Jacques Glénat, un “don” d’œuvres d’art embarrassant
Le monde de l’édition est aussi touché. Le patron et fondateur de la maison d’édition de BD Glénat (Titeuf, Dragon Ball, Joe Bar Team…) est cité aux côtés de Patrick Drahi, Jérôme Cahuzac ou encore Michel Platini comme l’un des douze Français détenant des comptes offshore transitant par le cabinet Mossack Fonseca. Depuis l’annonce de son nom, l’éditeur grenoblois se défend férocement. Il se dit victime “d’un amalgame scandaleux entre les milliards et les milliards d’euros d’homme d’État, de sportifs, d’industriels et de simples donations faites de manière tout à fait légale à (ses) enfants”, auprès de France Télévisions.
Selon Le Monde, il a été à la tête de Getway S.A. de 2009 à 2014, société sise aux Seychelles. Celle-ci est propriétaire d’un compte bancaire et a servi notamment dans l’achat d’œuvres d’art : “Des Bruegel le jeune, un Corot, des Cranach, des Fantin-Latour, des Felix Ziem”, mais aussi “des bronzes ou de l’ébénisterie ancienne”, d’après le quotidien.
En 2014, la nouvelle législation des îles Vierges britanniques le contraint à révéler son nom en tant qu’actionnaire de Getway S.A… qui est dissoute la même année. Des œuvres d’art acquises par la société seront ensuite offertes aux enfants de Jacques Glénat, gracieusement d’après lui, et sans qu’il soit à l’origine de ces dons. Il le martèle : “Il n’y a aucun lien direct entre cette société” et lui. “On va pas en faire un fromage.”
Mario Vargas Llosa, de l’offshore au Nobel
Un prix Nobel de littérature mouillé dans l’affaire ? D’après le site espagnol El Confidencial, oui. Mario Vargas Llosa, prix Nobel de littérature 2010, apparaît lui aussi dans les noms collectés parmi les documents de Mossack Fonseca. Du 1er septembre au 6 octobre 2010, il était propriétaire de Talome Services Corp, société enregistrée aux îles Vierges britanniques, avec son ex-femme Patricia Llosa. C’est une société d’investissement néerlandaise basée à Chypre et au Luxembourg qui a servi d’intermédiaire entre le cabinet et les Llosa en achetant un millier d’actions de Talome Services Corp avant d’en distribuer une moitié à monsieur et l’autre à madame.
Talome Service Corp a changé d’actionnaire principal le 6 octobre 2010, veille de la remise du Nobel à l’écrivain péruvien, au bénéfice de deux citoyens russes qui rachètent les actions du couple le 12 octobre. “Ce n’est pas une bassesse, mais une absurdité d’associer la disparition de cette société au fait que j’allais recevoir le prix Nobel. Je ne savais pas que j’allais le recevoir quand tout cela est arrivé”, a déclaré pour sa défense l’auteur de La ville et les chiens.
Les collectionneurs d’art, pros de la discrétion financière
Au matin du vendredi 8 avril, le scandale des “Panama Papers” a éclaboussé jusqu’à la légende du peintre Amedeo Modigliani. Selon Le Monde, le propriétaire d’un tableau de 1918 du grand maître italien, Homme assis (avec une canne), a pu être retrouvé. Philippe Maestracci, 71 ans, exploitant agricole dans le Périgord, s’est battu pendant des années pour récupérer la propriété de cette œuvre ayant appartenu à sa famille.
D’après lui, la toile a été vendue illégalement par l’administrateur des biens de son grand-père en 1944 alors que sa famille, juive, se réfugiait en Dordogne. Elle appartient aujourd’hui à la famille Nahmad, marchands d’arts de père en fils, chose qu’elle a toujours niée. Les “Panama Papers” ont pu le prouver. Ils ont démontré que David Nahmad est l’unique actionnaire de la société panaméenne IAC, qui détient le tableau estimé à 22 millions d’euros.
Les collectionneurs d’art sont moins célèbres que Pedro Almodovar ou la star Jackie Chan. Mais les Nahmad ne sont pas la seule famille de collectionneurs égratignée par le scandale des “Panama Papers”. D’après Le Monde, Mossack Fonseca “regorge d’ayant-droits de structures opaques” liées au monde des beaux-arts. Marina Ruiz-Picasso, héritière du peintre espagnol, y est par exemple actionnaire de trois compagnies.
On compte aussi les Thyssen-Bornemisza, famille de collectionneurs historique ; puis le magnat du cinéma chinois Wang Zhongjun ; Ella Fontanals-Cisneros, collectionneuse de Miami ; le milliardaire russe Dmitri Rybolovlev et Yves Bouvier, marchand d’art. L’affaire révèle aussi un montage astucieux de l’établissement de ventes aux enchères Christie’s, qui a permis de faire monter le cours de son action avant que François Pinault n’en acquière les parts en 1998.