Le président colombien Juan Manuel Santos devient prix Nobel de la paix

Le président colombien Juan Manuel Santos devient prix Nobel de la paix

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Le président Juan Manuel Santos, en février 2012 (© Ministerio TIC Colombia/CC)

Le comité Nobel a décerné son prix de la Paix au président colombien Juan Manuel Santos pour son action en faveur du processus de paix avec les Farc. 

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Une fois n’est pas coutume, le prix Nobel de la paix a été remis à un président en exercice. Juan Manuel Santos, président de la Colombie, s’est vu décerner la haute distinction pour ses actes en faveur du processus de paix avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc). Ou plutôt, comme l’indique le comité Nobel, “pour ses efforts résolus afin de mettre fin à une guerre civile de plus de cinquante ans dans son pays”.

D’après Reuters, les membres du comité ont souligné que la haute distinction se veut également un hommage au peuple colombien et à toutes les parties impliquées dans le processus de paix.

Le Monde note que l’homme d’État au pouvoir depuis 2010 “a risqué tout son capital politique” pour mettre un point final au conflit fratricide qui déchire le pays depuis un demi-siècle. A l’issue de quatre ans de négociations menées surtout à Cuba, les Farc et Juan Manuel Santos ont signé un accord de paix le 26 septembre à Carthagène des Indes, en Colombie.

Rejet du processus de paix dans les urnes

Malgré les encouragements de la communauté internationale, l’opinion colombienne n’est pas acquise au processus de paix. Dimanche 2 octobre, les citoyens ont prononcé leur désaccord en faveur de la réconciliation lors d’un référendum qui a vu le non l’emporter de peu, avec 50,23 % des voix, pour une faible participation de 37,28 %.

Les détracteurs du processus de paix le jugent trop favorable aux ex-guérilleros, cette négociation prévoyant une large amnistie pour la plupart d’entre eux. De plus, au terme de l’accord, les Farc ont la possibilité de créer leur parti et seront en mesure de bénéficier d’une dizaine de sièges au Parlement à l’occasion des prochaines élections législatives, en 2018. “Le pays ne peut oublier la douleur de toutes ces années de guerre, témoigne une Colombienne sur BBC Mundo, comme le rapporte Courrier international. Nous refusons que les Farc disposent d’une tribune politique qu’ils ne méritent pas.”

En dépit de ce mauvais signal, le président Juan Manuel Santos a martelé son souhait de poursuivre les efforts dans le sens de la paix et assuré que le cessez-le-feu resterait en vigueur. Peu après les résultats du suffrage, il a déclaré :

“Je continuerai à rechercher la paix jusqu’à la dernière minute de mon mandat parce que c’est le chemin à suivre pour laisser un pays meilleur à nos enfants.”

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“Nous devons dépasser les antagonismes et nous unir pour le bien commun. La paix en Colombie est proche et nous allons l’atteindre.”

Le commandant en chef des rebelles, Rodrigo Londoño Echeverri, dit “Timochenko” a également exprimé sa volonté d’aller au bout du processus de paix. La présidente du comité Nobel norvégien, Kaci Kullmann Five, a justifié le choix du jury par ces mots : “Le fait qu’une majorité des votants ait dit non à l’accord de paix ne signifie pas nécessairement que le processus de paix est mort.”

Plus de vingt ans de négociations

Juan Manuel Santos est né en 1951 dans la haute bourgeoisie de Bogota. Après des études d’économie et d’administration d’entreprise, il devient journaliste au sein du quotidien détenu par sa famille, El Tiempo, et travaille notamment sur la révolution sandiniste au Nicaragua.

Il entame sa carrière politique en entrant au gouvernement du président César Gaviria en 1993 et consacre très vite ses efforts à la négociation avec les groupes armés rebelles du pays. Plus tard, il devient ministre de la Défense sous le président Alvaro Uribe, aujourd’hui son farouche rival. C’est durant son mandat à ce portefeuille ministériel que s’est notamment déroulée l’opération “Jaque”, au cours de laquelle Íngrid Betancourt a été libérée, le 2 juillet 2008.

“La plus grande catastrophe humanitaire de l’hémisphère occidental”

La Colombie est le théâtre d’un conflit armé qui date du milieu des années 1960, avec la confrontation entre guérillas marxistes, groupes paramilitaires d’extrême-droite et forces armées gouvernementales. En cinquante ans d’affrontements, on compte cinq à sept millions de déplacés, 25 000 à 40 000 disparus et entre 220 000 et 260 000 morts – dont les trois-quarts sont des civils.

Malgré le rejet du référendum par la population, le prix Nobel vient couronner l’action de Juan Manuel Santos et lui conférer du soutien pour mettre fin à ce conflit meurtrier, que le sous-secrétaire des Nations unies pour les questions humanitaires, Jan Egeland, a qualifié comme étant “de loin, la plus grande catastrophe humanitaire de l’hémisphère occidental.”