L’Australie veut remplacer les contrôles aux aéroports par la reconnaissance faciale

L’Australie veut remplacer les contrôles aux aéroports par la reconnaissance faciale

Le programme “Seamless Traveller” devrait permettre à tout voyageur étranger d’entrer et de sortir du territoire avec la reconnaissance faciale. Inquiétant.

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Lors de votre prochain voyage en Australie, lorsque vous aurez récupéré vos bagages à l’aéroport de Sydney, Melbourne ou Canberra, vous pourrez peut-être tranquillement entrer sur le territoire sans jamais montrer vos documents d’identité à un douanier sourcilleux. En revanche, les contours de votre visage seront analysés dans les moindres détails par un algorithme de reconnaissance faciale relié à une base de données, qui déterminera quel niveau de menace vous représentez pour le pays.

Selon le Sydney Morning Herald, repris par Engadget, l’Australie a donc commencé à déployer le programme “Seamless Traveller” (“voyageur intégré”) qui vise, via un système de reconnaissance biométrique faciale, de l’iris et digitale, à créer “une expérience rapide, intégrée et automatisée pour 90 % des voyageurs”. On imagine qu’avec un tel système, les services douaniers auront désormais tout le loisir de bien s’occuper des 10 % de voyageurs “à risques” restant. Pour le moment, le système n’existe pas encore mais rassurons-nous, le gouvernement australien a lancé un appel d’offres pour imaginer les futurs processus d’identification automatisée d’êtres humains, et les concepts dystopiques devraient rapidement affluer. Confiant, le gouvernement australien s’appuie sur l’expérience menée depuis deux ans à l’aéroport de Washington-Dulles, où un système de porte biométrique avec scanner facial est utilisé pour confirmer l’identité des voyageurs après présentation du passeport. Le souci, c’est que la technologie est encore trop faillible.

Désolé, votre iris a été piraté

Techniquement, n’en déplaise à Bernard Cazeneuve, Christian Estrosi et aux apôtres du panoptique, les algorithmes de reconnaissance faciale testés dans les lieux publics ne sont tout simplement pas au point : si ceux de Facebook ou Google peuvent exhiber des taux de réussite proche des 99 %, c’est parce qu’ils ont accès à une base de données énorme pour progresser, à laquelle n’ont pas accès ceux des promoteurs de la sécurité aux frontières (ni même le FBI, qui plafonne à 85 %). Il suffit donc de ne pas être (trop) présent sur les réseaux sociaux ou, disons, de changer de coupe de cheveux, pour ne plus être reconnu (si ça vous branche, le collectif CV Dazzle propose une foultitude de techniques d’anonymisation). Enfin, et parce que nous vivons toujours dans une société à dominante blanche, les algorithmes ont toujours beaucoup de mal à identifier les personnes “non-blanches” – voilà ce qui arrive quand tous les programmes sont codés par des Blancs.

Sur le plan légal, ensuite, le système risque d’être compliqué à mettre en place. Non pas à cause de la collecte des données biométriques dans les lieux publics, non – le gouvernement australien a prévu le coup depuis 2015 – mais à cause de la sécurité et de l’utilisation de ces données une fois récoltées. Chaque jour, le monde nous prouve qu’aucun système n’est imperméable aux attaques, tout gouvernemental qu’il soit. Le vol de données personnelles, comme des identifiants de compte ou des identifiants bancaires, est déjà l’un des dysfonctionnements majeurs de la société numérique ; imaginez maintenant, dans une société biométrique, qu’un hacker dérobe l’image de votre iris, votre empreinte digitale ou les caractéristiques de votre visage pour les revendre au plus offrant au marché noir… Les enjeux éthiques sont gigantesques. Visiblement, ça n’a pas découragé l’Australie, qui devrait implémenter le nouveau système dès juillet à l’aéroport de Canberra, avec l’idée de l’installer pour de bon en 2020.