Une reprise acoustique inédite de Kurt Cobain, sur “And I Love Her” des Beatles, est apparue sur Internet. Elle figure au générique de l’ambitieux documentaire consacré au chanteur, Montage of Heck, qui sortira le 4 mai en salles et sur HBO.
Le son est caverneux, sali, amoché par les compressions successives. Dans une pièce à l’écho incertain, une guitare décharnée expire trois accords avec toutes les peines du monde, comme on traînerait des pieds en allant sortir les poubelles.
Et puis la voix démarre,“She gives me everything, and tenderly / The kiss my lover brings, she brings to me”… mais Kurt Cobain ne sait pas chanter la mélancolie de McCartney, ces deux-là n’en partagent pas la définition. Alors le chant s’émancipe du texte, plonge en gémissant dans cette rengaine à la patine intacte, ce désespoir sublime et las, instantanément évocatoire. Et tout resurgit : 1994, Seattle, le fusil de chasse, c’était hier ou presque.
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Un documentaire définitif
La chanson, qui vient d’émerger sur Internet, apparaît sur la bande-son du documentaire consacré à l’icône grunge, Montage of Heck, réalisé par Brett Morgan. Cette bande-son, aussi attendue que le film, est essentiellement composée d’inédits originaux de Kurt Cobain, chinés par le réalisateur parmi les cassettes personnelles du chanteur – tout comme cette reprise, d’ailleurs, “trouvée sur une cassette au hasard” selon Morgan. Le titre même du film, Montage of Heck, provient d’une de ces démos crasseuses et quasiment oubliées. On retrouve aussi de superbes cover, comme celle de la Scala, qui reprenait “Smells Like Teen Spirit”.
Le film est le résultat de huit ans d’un méticuleux travail de fouille collectif (le réalisateur, mais aussi la fille du chanteur, Frances Bean Cobain) à travers les archives hallucinées du blondinet d’Aberdeen, de son enfance en Super 8 à sa mort en mondovision, le 5 avril 1994.
Avant même sa sortie officielle, le 4 mai sur HBO (qui le produit) et dans un réseau d’une centaine de salles pour la France, l’attente suscitée par le documentaire est immense, d’autant que les premières projections privées, à Sundance, ont laissé la critique béate d’admiration. “Avis aux fans: préparez-vous à rencontrer l’homme que vous admirez”, écrit Rolling Stone. Entre intimité VHS, démons de Kurt Cobain et passages façon BD, le résultat vaut le détour.
Et quand on a supporté vingt ans d’absence, on peut bien attendre deux semaines de plus.