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La prochaine fois que vous balancerez négligemment un sac de courses dans la nature sur la foi du triangle de flèches vertes qui en orne fièrement le côté, réfléchissez-y bien : comme trop souvent avec l’industrie du greenwashing, les solutions soi-disant respectueuses de l’environnement ne le sont pas tant que ça.
Sur le banc des accusés, cette fois-ci : les sacs dits “biodégradables”, censés remplacer nos traditionnels sacs plastiques qui, rappelons-le, sont désormais interdits de vente dans les grandes surfaces pour cause de destruction de l’écosystème naturel mondial. À en croire une étude de l’université de Plymouth (Royaume-Uni) publiée le 28 avril dans la revue Environmental Science & Technology, plusieurs modèles de sacs de grandes surfaces labellisés “biodégradables” peuvent encore transporter deux kilos de courses… trois ans après avoir été enterrés, immergés (dans l’eau de mer) ou exposés aux éléments.
(© Université de Plymouth)
Greenwashing, j’écris ton nom
Pour parvenir à leurs conclusions, les chercheurs de Plymouth se sont concentrés sur quatre types de sacs vendus dans les commerces britanniques : un sac en plastique conventionnel en polyéthylène (recyclable mais pas biodégradable), deux sacs dits “oxo-biodégradables” (une technique, fustigée par un rapport de la Commission européenne en 2018, qui consiste à ajouter un additif aux sacs plastique traditionnels pour les “défaire” plus rapidement), un sac “biodégradable” et un sac “compostable”.
Première conclusion : après 27 mois d’exposition au sol ou à l’eau de mer, aucun des sacs ne s’est désintégré, loin de là. Seul le sac “compostable” est suffisamment en décomposition pour être inutilisable, observent les chercheurs. Ils reconnaissent en revanche qu’exposés à l’air, les différents matériaux se fragmentent en 9 mois. Conclusion imparable : “Les formules oxo-biodégradables ou biodégradables n’offrent pas de taux de détérioration suffisamment avantageux, comparés aux sacs conventionnels, dans une optique de réduction de la pollution marine.”
Le problème, assènent les chercheurs au Guardian, c’est que ces produits vendus dans le commerce sont marketés comme écologiques, à grand renfort de notices expliquant qu’ils peuvent “être recyclés dans la nature bien plus rapidement qu’un sac plastique ordinaire” ou qu’ils sont “une alternative végétale au plastique”. L’expérience prouve le contraire, y compris pour les sacs “compostables”. Idéalement, ces sacs devraient être récupérés puis traités via un processus de compostage dédié. Ce n’est évidemment pas le cas aujourd’hui.
Spoiler : rien n’est écolo
Si l’étude des chercheurs de Plymouth est loin d’avoir analysé les taux de dégradation de tous les sacs plastiques “biodégradables” présents sur le marché, elle met néanmoins le doigt sur un effet secondaire pervers de l’évolution des législations, suite à la prise de conscience écologique mondiale. Aujourd’hui, près de 127 pays ont pris des mesures en faveur de la réduction des sacs plastiques à usage unique. En France, ils ont disparu des caisses des supermarchés depuis juillet 2016, avant de disparaître des commerces l’année suivante. L’impact de cette réforme est pour le moment inconnu.
Les sacs plastiques traditionnels envoyés ad patres, restent alors les sacs en tissu, qui ont au moins le mérite d’être réutilisables même s’ils ne sont pas si écolo que ça – on vous voit, les collectionneur.euses de tote bags mignons. Quant aux sacs en papier… ils ne sont pas idéaux non plus : ils consomment trois fois plus d’énergie et 17 fois plus d’eau qu’un sac en plastique pour leur fabrication. Maintenant, vous savez : les sacs biodégradables ne le sont pas vraiment.
Êtes-vous réellement surpris ? Vous commencez à reconnaître qu’il n’y a plus d’espoir nulle part ? Très bien, c’est un début. Comme le rappelle The Verge, il est au fond plus important de savoir ce que vous mettez dans le sac et comment vous vous rendez au (super)marché que de vous focaliser sur le type de sac que vous utiliserez.
Mieux, rappelez-vous que tant que rien ne sera fait pour mettre fin au marché mondialisé de la production et de la consommation de masse, nous courons tous vers l’extinction, peu importe la forme qu’elle prendra. Cela dit, la prochaine fois que vous entendrez justifier le fait de laisser traîner un truc en plastique “biodégradable”, ne vous privez pas d’expliquer la situation.