En modifiant sa politique de partage des revenus, la plateforme de Valve séduit les gros éditeurs, au détriment des indépendants impuissants.
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©Valve Corporation
Aujourd’hui, Steam, la plateforme PC de jeux dématérialisés, est quasiment devenue un passage obligé pour tous ceux qui souhaitent se lancer dans la création vidéoludique. En économisant sur la production de supports physiques, Valve, l’entreprise à la tête de Steam, a référencé et mis en avant des centaines de jeux issus de studios indépendants qui n’auraient pas pu voir le jour autrement.
Cependant, les titres phares du jeu vidéo (les “triple A”) sont aussi présents sur Steam, et dernièrement, la politique de la plateforme a de nouveau changé en leur faveur, au grand dam des indépendants. Dans une annonce officielle faite le 1er décembre, Valve a expliqué les changements intervenus dans sa politique de répartition des revenus.
Auparavant, Steam prenait 30 % des revenus issus de la vente d’un jeu, et ce quels que soient l’origine, le prix ou le budget engagé dans la création du titre vidéoludique. Dorénavant, les jeux à grand succès reverseront moins à la plateforme à partir d’un certain revenu. Par exemple, si un jeu génère 10 millions de dollars, 25 % des bénéfices iront à Valve, et s’il atteint les 50 millions de dollars, Valve ne touchera “que” 20 % des revenus.
Cette décision a évidemment été très mal accueillie par la communauté des développeurs indépendants qui fournissent à Steam la grande majorité de leurs jeux – en nombre effectif de titres. La plupart y voient une drague des gros éditeurs des jeux très appuyée, du fait de leur capacité à générer de gros revenus pour la plateforme.
Rami Ismail, développeur indépendant pour le studio Vlambeer dénonce ainsi l’hypocrisie de Valve :
Valve statement, paraphrased: "don't worry, big game productions, we'll happily subsidize your increased income with the broken dreams of aspiring devs that fell just short of making it because they have no leverage and we don't care.
— Rami Ismail (@tha_rami) 1 décembre 2018
Just please don't launch your own store"
“L’annonce de Valve, paraphrasée : ‘Pas d’inquiétudes messieurs les gros éditeurs, nous sommes heureux de voir vos hausses de revenus remplacer les rêves brisés des développeurs qui ont échoué à faire leurs jeux parce qu’ils n’avaient aucun levier financier, et on n’en a rien à faire.
Ah et pitié, ne créez pas votre propre plateforme.'”
La pique fait notamment référence aux quelques gros éditeurs qui ont récemment décidé de court-circuiter le système Steam en créant leurs propres plateformes, des jeux EA sur Origin à Fortnite sur le launcher Epic Games, en passant par le dernier Call of Duty : Black Ops 4 sur le Battle.net de Blizzard.
N’ayant pas les moyens de s’offrir de telles plateformes, les développeurs indépendants doivent ainsi subir l’entreprise de séduction opérée par Valve pour ramener ou garder les blockbusters vidéoludiques dans son giron.
Cerise sur le gâteau (de Portal), depuis les changements d’algorithme de Steam effectués en octobre, il semblerait que les jeux indépendants soient beaucoup moins mis en avant par la plateforme, contrairement aux “triple A”, certains développeurs se plaignant même d’une chute considérable de leurs ventes depuis ce mois funeste.
Steam is slowly killing indies in favor of high value games.
— Thomas Altenburger (@mrhelmut) 3 décembre 2018
Our Steam revenues lost 75% in one month.
Thread incoming. https://t.co/fcNfWU7KH0
Malheureusement, les studios indépendants, à défaut de moyens financiers, n’ont aucun recours pour faire pression et subissent invariablement les décisions permises par le monopole de Steam. Ce qui est regrettable quand on sait que les jeux indies apportent un réel renouveau au paysage vidéoludique – malgré des graphismes et une technique parfois démodés, disons-le.
Des innovations qui sont d’ailleurs souvent reprises ensuite par les grosses productions. Résultat, les ambitions financières de Valve pourraient ainsi mettre en danger la création une nouvelle fois.