Le journaliste d’investigation Denis Robert, invité sur le plateau de Ce soir ou jamais, dénonce un système politique et médiatique qui fait mine de découvrir les révélations des “Panama Papers”.
Hier soir, dans Ce soir ou jamais, Frédéric Taddeï a invité le journaliste d’investigation Denis Robert pour conclure une émission consacrée à la chute de popularité et de crédibilité de Manuel Valls et François Hollande, et par conséquent de la classe politique. Venu sur le plateau pour évoquer les “Panama Papers”, celui qui a révélé la fameuse affaire Clearstream s’était déjà fait remarquer cette semaine grâce à un post Facebook très partagé et “écrit en une minute” dans lequel il pestait contre les responsables politiques français.
D’après lui, s’ils font mine de s’indigner à la suite de ces révélations fracassantes, c’est avant tout pour masquer leur incapacité et surtout leur manque de volonté à réguler la finance. Court extrait :
À voir aussi sur Konbini
“Pourquoi les journalistes ont-ils tant attendu ? Pourquoi les politiques – Hollande en tête avec son foutu discours du Bourget – n’ont-ils pas bougé le petit doigt quand […] l’affaire Luxleaks est sortie ?”
“On découvre la Lune !”
Devant les caméras de France Télévisions, Denis Robert n’a pas dévié son discours d’un iota : dézinguant l’immobilisme de la gauche au pouvoir et de la droite qui l’a précédée, il dénonce un système médiatique et politique qui fait mine de découvrir l’eau chaude : “Ces banques françaises dont on semble découvrir aujourd’hui qu’elles ont des filiales dans des paradis fiscaux […] On découvre la Lune […] Le problème n’est pas le capitalisme, je ne suis pas anticapitaliste, c’est ce qu’on a trouvé de moins pire. Le problème c’est le mode de redistribution et le vol manifeste dont nous sommes victimes.”
Derrière ce mitraillage en règle des instances gouvernantes, qui “ne sont pas crédibles”, il légitime le mouvement Nuit debout, symbole du désenchantement du peuple face à la loi El Khomri, Hollande, le Parti socialiste, mais aussi les puissants dans leur globalité. “On ne les écoute pas […] Si ça continue, [ce mouvement] peut déboucher sur quelque chose d’insurrectionnel”, menace-t-il.
La prétendue défense des lanceurs d’alerte affirmée par le président cette semaine ? Du vent d’après lui : il rappelle que lorsqu’un lanceur d’alerte révélait le scandale financier des Lux Leaks “on pouvait entendre les mêmes cris effrayés des hommes politiques… et que s’est-il passé ? Que dalle !”.
“Il ne se passera pas grand-chose”
L’historien Marcel Gauchet intervient alors à la demande de Frédéric Taddeï, donnant des conséquences bien pessimistes pour ces révélations d’ampleur : “L’importance sensationnelle accordée [aux Panama Papers] est sans rapport aucun avec les suites qui seront données, on peut prévoir qu’on va créer de commissions, des études internationales, mais il ne se passera pas grand-chose”. Pourtant, “À quoi sert une [société] panaméenne si ce n’est pas pour frauder ? À rien !”, d’après Denis Robert.
Denis Robert est avec Ernest Backes l’auteur de l’ouvrage Révélation$, sorti en 2001, qui dévoilait une vaste opération de fraude fiscale opérée par la société Cedel International, devenue la fameuse affaire Clearstream par la suite. Après dix années de procédures intentées contre lui par des organismes bancaires à la suite de ses révélations, il est blanchi par la Cour de cassation.
Cette émission de Ce soir ou jamais est à voir ou revoir par ici. Denis Robert y intervient à partir des vingt dernières minutes.