Que deviens-tu, VonDutch ?
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Au début des années 2000, un terrible conflit faisait rage dans les cours d’écoles : la guerre entre les “rappeurs” et les “skateurs”. Entre les bastons à la récréation et les règlements de comptes sur MSN, West Side Story n’avait qu’à bien se tenir.
La grande période d’injonction à l’identification binaire que furent les années 2000 ne laissait aucune place à la pondération : il fallait choisir un camp, sous peine d’être mis dans la case des “neutres”, celle des losers sans personnalité. Pour les “skateurs”, c’était rock, planche à roulettes et ceintures à clous, alors que les “rappeurs” ne juraient que par les parties de foot IRL ou sur PS2, à l’aise dans leur jogging.
Pour se faire identifier sur le champ de bataille, le rebelle de bac à sable a besoin de signes distinctifs. Il explique alors à ses parents, qui ne comprennent rien à rien, à quel point l’achat de ce T-shirt Volcom est indispensable et que “Non, plus personne ne lasse ses chaussures en 2004”. On range ses lacets sur les côtés et tant pis pour le confort. De toute façon, c’est un concept de “neutre” ça, le confort.
Jamais du genre à bouder de bons profits, les marques américaines se sont empressées de fournir des uniformes de combat à nos petits guérilleros en mousse. Si Dakine ou Nike ont survécu à la guerre des gangs, d’autres ont laissé leur peau dans la guerre incessante de la hype adolescente et sont aujourd’hui enterrées, aux côtés du Nokia 3310 et du OGO, dans le cimetière des anciens trucs cool.
DC Shoes, És ou Spitfire, les must-have du skateur
Du côté des skateurs, on se souvient des chaussures DC Shoes, rachetées en 2004 par Quiksilver pour 87 millions de dollars. Créée en 1995, la marque És habillait autant les filles que les garçons avec ses sweats tout doux, dont on mâchait les cordons pendant les exercices de maths pour mieux se concentrer.
En précurseur du marketing par les influenceurs, És avait réalisé, à la fin des années 1990, un documentaire culte mêlant, pour la première fois, des performances de skate avec la promotion de leurs produits. Aujourd’hui, tous les fondateurs originels sont partis travailler pour d’autres grandes marques. En 2011, És fait une dernière fois la une du magazine Trasher avant de sombrer dans l’oubli.
Avec son logo en forme de diable, la marque Spitfire était LE must-have pour tout skateur qui se respecte. Initialement vendeuse de roues de skateboard, la marque a largement développé ses accessoires au cours des années 2000 et a collaboré avec les plus grands du milieu, comme Chris Cole, Guy Mariano ou Bryan Herman (coucou Lomepal).
À ce jour, Spitfire est revenu à ses activités premières et est toujours considérée comme la meilleure marque de roues par les skateurs du monde entier. La marque Dragon a suivi le même chemin et se contente aujourd’hui de fabriquer des masques et lunettes pour le ski et le snowboard.
L’incontournable casquette Von Dutch
Dans le clan des “rappeurs”, on ne jurait que par Fubu (qui a sorti en début d’année une nouvelle collection avec Puma). Il y avait aussi Baby Milo, l’une des lignes de la marque japonaise de luxe A Bathing Ape. Le petit singe de Baby Milo était sur toutes les épaules stylées de l’époque (avec une petite chaîne en argent, si possible).
Rendu populaire par Pharrell Williams – qui s’est même inspiré de ses designs pour la pochette de son album In my mind, sorti en 2006 – A Bathing Ape faisait du Supreme avant l’heure, en ne sortant que des produits en quantités limitées pour jouer sur la demande. Le Baby Milo qui t’avait fait craquer sur ton premier crush, était donc probablement un faux. Désolé.
Si avoir du Baby Milo sur soi en 2004 c’était stylé, le comble du chic était bien entendu l’incontournable casquette Von Dutch. Inspirée de la culture du tuning américain, la marque s’est démocratisée dans le monde entier, de Paris Hilton aux cours d’école. Comme un cri d’alarme, le slogan de Von Dutch s’étale encore aujourd’hui sur son compte Instagram : “Von Dutch is still alive !”
Bien qu’elle soit devenue un summum beauf en 2018, nous ne sommes pas à l’abri d’une résurrection de la marque – à l’image de Sergio Tacchini, remise au goût du jour par la nouvelle scène rap française (PNL en tête de gondole). Une preuve, s’il en fallait une, que la mode n’est rien d’autre qu’un cycle absurde ne poursuivant qu’un seul et unique but: vous faire acheter.