La nuit du 30 avril au 1er mai a été un véritable jeu du chat et de la souris entre Drake et la communauté hip-hop. Plus tôt dans la journée du 30 avril certains avaient remarqué l’apparition de plusieurs nouveaux morceaux de l’artiste canadien sur l’application Shazam. S’ensuit dans la soirée un teasing sur les réseaux sociaux annonçant un projet à minuit. Certains pensaient que le label October’s Very Own sortirait une mixtape collaborative regroupant tous les artistes étant signés par le protégé de Lil Wayne tout comme Travis Scott l’avait fait en fin d’année 2019 pour son label Jack Boys avec la mixtape JackBoys. C’est cependant une mixtape solo que Drake nous a dévoilée quelques heures avant sa sortie. Intitulée “Dark Lane Demo Tapes”.
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En écoutant “Dark Lane Demo Tapes”, on remarque la grande variété des styles utilisés ainsi que l’absence de fil conducteur, en partant de l’introduction “Deep Pockets” très introspective et mélancolique jusqu’au dernier titre “War”, très fortement inspiré de la drill anglaise. Ce sentiment est validé par Drake, qui explique dans un post précédant la sortie du projet que celui-ci a été conçu par son bras droit Oliver El-Khatib et son ingénieur Noel Cadastre dans le but de rassembler des morceaux teasés, leakés, exclusifs ou déjà sortis en attendant son sixième album censé sortir cette année.
Et c’est ce mélange de différentes ambiances qui fait la plus grande force de “Dark Lane Demo Tapes”, car on y reconnaît toutes les facettes tant aimées de Drake. On y retrouve les thèmes habituels comme ses relations avec les femmes et son manque de confiance envers elles sur les morceaux “Desires”, “Not You Too”, mais ce thème est le mieux exploité sur “What to Say When” et plus particulièrement sur le brûlant “Chicago Freestyle”, sur lequel il est accompagné d’un magnifique loop vocal du chanteur Giveon. Sur “Toosie Slide”, il essaye de créer une chorégraphie qui pourrait fonctionner sur Tik-Tok, une application connue pour décupler les streams de certains morceaux grâce aux danses créées par sa communauté. Il rejoint Future et Young Thug sur “D4L” pour donner une performance trap sensationnelle. Sur “What to say When” et “Losses”, il observe la scène musicale et critique ses dérives ainsi que l’impact qu’elles ont eues sur sa vie personnelle.
Mais “Dark Lane” est aussi une occasion pour le prodige de Toronto d’expérimenter en attendant son album. Ainsi, sur “Pain 1993”, il essaye de nouveaux flows sur un beat produit par l’étoile montante Pi’erre Bourne avec en featuring son binôme Playboi Carti. Sur “Demons”, il trempe ses pieds dans l’univers de la drill de Brooklyn qui a été mise sur le devant de la scène grâce à Pop Smoke. Apparaissent sur ce morceau deux autres grandes figures de la drill new-yorkaise, Fivio Foreign et Sosa Geek. Cette expérimentation peut être mal vue cependant, Drake étant souvent critiqué pour son fameux “Wave-riding” (c’est-à-dire le fait de s’approprier un style musical sans rendre hommage aux créateurs dudit style).
Même si on peut reprocher à ce projet d’avoir certains featurings qui n’apportent pas grand-chose (on pense surtout à Chris Brown sur “Not You Too”, Future sur “Desires” mais principalement au couplet controversé de Playboi Carti sur “Pain 1993”), “Dark Lane Demo Tapes” est une excellente mise en bouche en attendant l’arrivée du prochain projet majeur de Drake, qu’il commence à teaser énormément sur Instagram. Il dépasse donc le décevant More Life pour s’inscrire comme l’une de ses meilleures mixtapes, après If you’re reading this it’s too late.