À Portland, Seattle ou Vancouver, les hipsters et les millennials ne passent pas leurs week-ends dans des bars ou resto branchés, ils vont… faire du camping ! Plongée dans l’univers des “outdoor hipsters” !
À voir aussi sur Konbini
Très malheureusement, quand tu vis en France et que tu entends le mot “camping”, ce qui te vient à l’esprit, ce n’est pas tout à fait la nature à l’état sauvage, des randonnées sans fin avec à la clé des vues magnifiques et un retour “aux bases”. Non, tu ne t’imagines pas dans Into the Wild.
Ce qui te vient plutôt à l’esprit est un dérivé de l’enfer : la tête de Franck Dubosc débarque en premier plan, arrive en deuxième la vision infernale de Decathlon un samedi, défile ensuite le logo du Vieux Campeur puis une piscine remplie de gosses qui pourraient bien y avoir fait caca, quelques poils de cul collés au carrelage des douches publiques, des chipolatas qui schlinguent la mort et un monsieur fripé, au cul très plat, tout nu sur une plage.
Je suis désolée pour toi si le camping t’évoque tant de souffrances inutiles mais bonne nouvelle, après avoir lu mon article, ta vision de cette activité risque de changer ! Figure-toi que la France n’est qu’un tout petit point ridicule dans l’univers du camping et que par conséquent, le reste du monde n’a donc pas l’esprit pollué par de telles horreurs.
Outdoor hipsters, wilderness hipsters, adventure hipsters
Pour certains, le camping est même synonyme de “cool”. Eh ouais, ça t’en bouche un coin. Je répète, le camping est une activité trendy, un truc que les gens branchés se sont approprié. Je sais, venant d’un pays où les films Camping, summum de la beauferie, ont fait des millions d’entrées, ça semble dur à croire.
On remerciera donc Instagram, car depuis que les millennials ont découvert qu’une photo d’une tente posée sur une falaise devant un lac pouvait booster leurs comptes de plusieurs centaines de likes, les hipsters se sont tout simplement mis à camper et à découvrir les joies de la nature.
On les appelle les “outdoor hipsters”, “wilderness hipsters”, “hiking hipsters”, “adventure hipsters” ou “lumbersexual” (bucheronsexuel) et les chaussures de marche ne leur font pas peur ! Bien au contraire, elles font partie de la panoplie au même titre que l’iPhone, toujours prêt à balancer chaque photo de paysages sur Internet (merde, je ne capte pas, y’a pas de réseau !!!), ou le drone, qui fera de magnifiques photos de forêts “du dessus”.
Un renouveau du camping qui vient de la côte pacifique nord-ouest des États-Unis
Ce renouveau du camping et de son image vient de la côte pacifique nord-ouest des États-Unis, et plus spécifiquement de Portland dans l’Oregon et de Seattle dans l’État de Washington, villes entourées de parcs nationaux.
À Portland, qui est le “hub” de cette nouvelle industrie, dans le quartier du Pearl District, qu’on pourrait qualifier de “Marais” local, les boutiques outdoor sont à côté de petits shops indés et de restaurants bios. Ces magasins sont plus proches de l’esprit de Colette que de celui de Decathlon ! On y trouve des tentes, des backpacks et des accessoires pour survivre dans la nature, sauf que tout est présenté avec goût. On nous propose, posés sur une table tels des livres d’art, de beaux ouvrages sur la montagne, la forêt, l’escalade, etc.
Si de nombreuses marques cultes comme REI, North Face ou Patagonia, installées dans le quartier, ont visiblement modernisé leurs approches – qui étaient jusqu’alors plutôt sport et drivées plus par la performance que par le lifestyle –, on retrouve aussi des marques plus récentes comme Poler. Fondée en 2011, elle s’adresse à un marché beaucoup plus jeune et branché et propose des tentes avec de nombreux imprimés, des sacs de couchage…
On ne retrouve pas le focus sur la “fringue technique”, qui est souvent très présente chez les marques outdoor. L’idée ici n’est pas de dire “vous allez escalader le mont Everest dans ces fringues”, mais plutôt de dire : “Hey, faire un feu de camp dans les bois, c’est cool et cette tente serait parfaite pour y dormir !” Benji Wagner, le cofondateur de Poler (qui a une grosse barbe), explique au magazine Racked :
On a remarqué que l’industrie outdoor était remplie de bons produits, mais qu’elle n’arrivait pas à se connecter et à parler aux jeunes. L’industrie outdoor a tendance à être totalement focalisée sur l’aspect innovation technique et a perdu l’idée que les gens vont dans la nature de façon beaucoup plus simple, moins ambitieuse et que ces façons d’y aller sont aussi à célébrer.
L’important pour ces nouvelles marques outdoor, comme Huckberry ou Topo, est donc de vendre un produit qui donne tout simplement aux gens l’envie d’aller passer du temps dehors et d’en faire un style de vie, le tout sans ressembler à un mec qui ne porte que du Quechua. “Il y a une culture très étrange et élitiste dans la culture outdoor”, explique Steve Casimiro, fondateur d’Adventure Journal, à Racked. C’est ce que ces nouvelles marques essayent de briser.
Car jusqu’à récemment, les marques les plus anciennes avaient l’air de s’adresser aux personnes capables d’escalader le Kilimandjaro plutôt qu’au commun des mortels qui a peut-être juste envie de camper occasionnellement sur une plage.
Aussi, les marques outdoor ont plutôt tendance à donner une image solitaire du campeur ou du sportif, tandis que les marques plus jeunes semblent avoir compris que faire de la randonnée ou camper doit plutôt être abordé comme une activité à forte interaction sociale, une expérience à partager, aussi bien dans la vraie vie que virtuellement.
Axie Navas, rédactrice en chef d’Outside Magazine, explique à Racked :
Il y a un nouveau marché de gens jeunes qui veulent faire de la randonnée et du camping un style de vie. Ils cherchent des produits à l’intersection de la performance et du style. Ils ne veulent pas camper tous les jours ou tous les week-ends, mais veulent quand même avoir de l’équipement pour de l’occasionnel. Ils veulent des fringues performantes qu’ils peuvent porter de la ville à la montagne.
Wild Outdoor Apparel, une autre marque outdoor “made in Portland, fondée en 2007, a un slogan qui exprime parfaitement cette tendance. Elle se décrit comme “the original mountain-to-bar company”, ce qui signifie “l’entreprise originale de la montagne au bar”. On peut lire sur le site de la marque :
Notre motto “mountain-to-bar” décrit un lifestyle spécial qui est unique à Portland et dans le reste de la région Pacifique nord-ouest et qui mélange à la fois la stimulation de la vie urbaine et l’excitation et le fun des activités outdoor.
Des villes comme Portland, Seattle et Vancouver ont été créées sous forme de grands parcs urbains entourés de montagnes, de plages et de forêts. À une heure des centres, on peut être immergé dans les grandes forêts anciennes du nord-ouest et dans la nature sauvage.
Il faut effectivement avouer que Portland, comme Seattle, sont des villes gâtées en parcs nationaux, ce qui explique l’engouement pour le camping. Du côté de Portland, en Oregon, impossible de rater le Crater Lake National Park et son lac à l’eau claire ou Three Sisters Wilderness, dont les cascades et la rainforest sont magnifiques. Du côté de Seattle, direction les North Cascades (où l’on peut voir des biches partout, omg !) ou le mont Rainier, qui est à tomber par terre en automne dans un esprit été indien.
Les Japonais obsédés par la culture outdoor “made in Portland”
Un fait amusant et intéressant à noter est que les marques outdoor “made in Oregon” se vendent comme des petits pains au Japon ! Par exemple, les Japonais sont fanatiques de la marque de chaussures de randonnée Danner et représentent une très grosse part de marché.
“Les Japonais les adorent car c’est fait aux USA et fait à Portland, c’est encore mieux. Il y a quelque chose à propos de l’authenticité du lifestyle ici qui a beaucoup de poids”, explique Dan Tiegs, le créateur de Danner au site d’Oregon Business. The Economist consacre d’ailleurs un article à l’obsession des Japonais pour Portland, expliquant qu’il y a régulièrement des “Portland pop-up” ou les marques de Portland sont vendues.
La tendance outdoor représente une telle opportunité économique que des géants du sport dont ce n’est habituellement pas le sujet ont saisi l’opportunité. C’est le cas de Nike, Adidas ou de la marque de yoga Lululemon.
Cependant, les marques originelles comme Patagonia arrivent à conserver leur part de marché, car elles proposent des services que les marques trendy ou mainstream ne proposent pas. Patagonia promet par exemple une réparation à vie sur les produits, ce qui semble très utile quand on campe régulièrement et qu’on a une véritable éthique écologique liée à sa passion pour la nature.
Utiliser l’écran pour lâcher les écrans et aller dans la nature
Et pourtant, si, selon l’industrie outdoor, tout laisse à penser que les jeunes vont de plus en plus dans la nature, ce n’est pas du tout ce que dit Jonathan Jarvis, directeur du National Park Service des États-Unis. “Les jeunes sont plus éloignés que jamais du monde naturel que n’importe quelle génération précédente”, dit-il à National Geographic, qui consacre un article au rapport des jeunes aux parcs nationaux. “Les parcs nationaux n’ont jamais été plus ringards qu’à l’âge de l’iPhone”, ajoute-t-il.
Selon une étude de Destination Analysts, 71 % des millennials disent qu’ils trouveraient très inconfortable de passer une semaine de vacances sans avoir accès à Internet. Il n’est cependant évidemment pas question d’avoir accès aux réseaux dans les parcs. Cependant, les services des parcs nationaux ont décidé d’adopter une véritable stratégie sur les réseaux sociaux et d’installer des kiosques dans certaines villes, où il est possible de faire un tour virtuel de tous les parcs nationaux américains afin d’attirer une nouvelle clientèle.
Une bonne façon d’utiliser les écrans afin de faire lâcher les écrans… Et il faut croire que ces stratégies fonctionnent à merveille, car grâce aux réseaux sociaux et à tous les comptes Instagram “outdoor”, je n’ai jamais autant rêvé de faire du camping. Si chaque génération a une expérience et une approche différente du monde naturel, pour notre génération, la prise de conscience de la beauté de la nature et notre envie d’en voir plus et de s’y fondre passeront effectivement sans doute par des heures de scrolling !
Pour se rendre à Portland et Seattle
Au départ de la France, Delta est la seule compagnie à relier chaque jour (et sans escale) Paris-Charles-de-Gaulle à Seattle-Tacoma. Au cours du vol d’environ 10 heures, vous pouvez rester connectés en Wi-Fi grâce à une connexion haut débit qui vous offre l’accès aux messageries WhatsApp, Facebook Messenger et iMessage, ainsi qu’aux programmes de divertissement de Delta Studio. Les vols sont à partir de 721 euros TTC.
Pour se rendre à Portland, il suffit de prendre le bus ou le train de Seattle. Comptez entre 3 heures et demie et quatre heures de route. Rendez-vous sur travelportland.com !
Pour tout renseignement et recevoir une documentation gratuite, contactez l’office de tourisme de Seattle, État de Washington, au téléphone (01 44 77 88 06) ou par mail : visitseattle@ecltd.com, ou rendez-vous sur www.visitseattle.fr. Vous pouvez aussi retrouver l’office du tourisme de Seattle sur Facebook.