Le petit titre qui a fait sensation à l’E3 vient de sortir, et révolutionne à sa manière le jeu vidéo.
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Nous sommes en 2018, et personne n’y avait encore vraiment pensé. Tout du moins, personne n’avait poussé l’idée jusqu’au bout ! Il aura fallu A Way Out, un jeu indé (même s’il est distribué par Electronic Arts), pour voir vraiment un titre dont la campagne se joue forcément à deux, avec chaque joueur derrière un personnage différent, mais en split screen. Autant dire que l’annonce avait fait pas mal de bruit à l’E3, et que les fans de jeux attendaient de pied ferme ce titre.
Deux prisonniers, enfermés au nord de la Californie, qui ne se connaissent ni d’Ève, ni d’Adam, décident de s’évader ensemble. Le gameplay repose beaucoup sur la collaboration entre les deux joueurs, que ce soit dans les actions en tant que telles, lorsque les protagonistes doivent se faire la courte échelle ou éliminer tel ou tel ennemi pour que l’autre puisse avancer d’un point A à un point B, ou encore dans les décisions à prendre. Bref, le traitement est assez innovant.
On s’est plongé tête baissée dans le jeu, histoire de savoir s’il est vraiment si novateur que ça. Spoiler : oui, complètement.
Une petite équipe pour un grand jeu
Forcément, Josef Fares, le créateur du jeu, est très fier de son bébé. Lorsque l’on arrive aux alentours de 9 heures dans les locaux de l’agence de com’ qui s’occupe dudit titre pour jouer avec lui, l’homme arbore déjà un grand sourire. “Quand on a commencé à bosser sur le jeu il y a trois ans, on était 10, puis 20, puis 40 sur la fin”, clame-t-il, avant d’ajouter :
“Les gens me disent qu’on sort A Way Out en même temps que Far Cry 5, mais ce n’est pas du tout comparable, ce n’est pas du tout la même chose. Il faut bien se dire que l’on était au départ aussi nombreux que l’équipe du café d’Ubisoft, je pense [rires].“
Pendant 30 minutes, on joue avec lui. On découvre alors une session pleine d’action, où l’on doit éliminer des gardes, puis une autre plus calme où l’on pêche dans un petit lac, avant de se plonger dans une course-poursuite infernale dans un hôpital. Le point fort de ces trois moments ? Chacun présente des passages de gameplay unique, que l’on ne retrouvera jamais dans l’aventure.
C’est l’un des nombreux postulats de base de Fares, qui raconte qu’il s’est trop souvent lassé des jeux vidéo où le mode de jeu était identique du début à la fin :
“C’est important pour un jeu comme ça de ne pas trop se répéter. On aurait pu faire un jeu deux fois plus long si l’on avait reproduit ici et là ce genre de mécanismes, mais ça n’a pas trop d’intérêt selon moi.”
En l’occurrence, le titre n’est effectivement pas très long. Sept à huit heures – dont deux heures dans la prison – suffisent pour terminer l’aventure. Mais cela n’est pas grave en soi, car l’expérience apporte malgré tout quelque chose d’assez unique : celle de se retrouver avec un·e ami·e, assis sur un canapé, à jouer au même jeu, à évoluer en même temps, et à prendre des décisions en commun. Quelque chose que Josef nous dit au moins trois fois durant cette heure partagée :
“Le point de départ du jeu, c’est que je voulais jouer avec mes amis à un jeu avec une vraie histoire. Qu’on soit ensemble sur un canapé. Je pense que dans les co-op, il n’y a jamais vraiment d’histoire. Là, c’est engageant.”
Ce qui a posé son lot de problèmes par ailleurs. Comment écrire une histoire en split screen qui maintient l’attention du joueur tout du long ? “Il y avait énormément de challenge”, précise Josef, l’air pensif. Un élément de réponse réside dans les personnalités différentes des deux personnages : l’un est agressif et l’autre plus raisonné. Ce biais, au premier abord assez classique, a donné aux créateurs plus de matière pour écrire l’histoire. Le but était bien évidemment de s’attacher à ces deux antihéros, fichtrement touchants par moments.
D’autant plus que chaque action peut avoir un impact sur le gameplay. Si vous décidez d’être bourrin à un instant T, la séquence qui suivra sera différente. Et qu’importe ce que vous décidez de faire, les interactions avec les autres diffèrent également. Cela pour pousser les joueurs à discuter de la meilleure stratégie à prendre.
L’autre possibilité est de proposer des gameplays différents, qui ne se répètent jamais. Mais plus encore, c’est en plaçant ici et là des petits clins d’œil discrets, comme la possibilité de jouer au Puissance 4 dans un hôpital, par exemple.
Enfin, c’est en offrant des séquences à la réalisation très innovante et au rythme haletant que l’histoire réussit à maintenir les joueurs en haleine. On pense notamment à une scène de course-poursuite folle, où le split screen disparaît et un personnage prend l’intégralité de l’écran le temps d’une scène. La caméra s’embarque ensuite dans un travelling à vitesse grand V pour rejoindre l’autre protagoniste.
Un procédé qui se combine à une séquence incroyable cadrée à la Old Boy, en travelling, vue de côté, pendant que l’on dégomme des flics à tout-va. Une réalisation impeccable, comme il y en a tellement dans le jeu.
“Tu vois, cette scène dure 60 secondes. Tu ne retrouves jamais ça dans le jeu après, mais elle nous a demandé 3 000 animations et énormément de temps. C’est ça que je voulais.”
Sans surprise, le résultat est très prenant. Certes, les graphismes ne sont pas révolutionnaires, et la durée de vie n’est pas imposante, mais c’est sur le reste que le titre se démarque. Vu l’ampleur de l’entreprise, on ne peut que tirer son chapeau. D’autant que l’on est prêt à parier que ce jeu va en inspirer d’autres – et c’est souvent à ça que l’on reconnaît une œuvre véritablement marquante.
A Way Out est disponible sur PS4, Xbox One et PC.