Si rien ou presque ne les prédestinait au rap, le groupe 47Ter poursuit sur sa lancée exponentielle. Véritable sensation des réseaux sociaux et du Web grâce à leur freestyle de reprises de “classiques”, le collectif vient de publier ce vendredi 3 mai un nouvel EP, compilation de toute leur saga “On vient gâcher tes classiques”. Pour l’occasion, on s’est entretenu avec Pierre-Paul, Miguel et Blaise pour évoquer l’histoire de ces freestyle, ainsi que l’avenir d’un groupe qui s’apparente à un OVNI de la scène française.
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Konbini | Comment vous est venue l’idée de cette série “On vient gâcher tes classiques” ?
Pierre-Paul | On avait des “vrais morceaux” et on cherchait un petit contenu pour améliorer notre fan-base, et lancer ces titres-là. Comme j’aime bien écrire des conneries, on a réfléchi à un concept sympa et décalé pour avoir deux formats : des freestyles et nos vrais morceaux. Il y avait un piano-souffleur pour gosse chez moi, on a pris un iPhone et on a trouvé le concept : on fait ce qu’on peut avec ce qu’on a.
Miguel | Avec l’intitulé, “On vient gâcher tes classiques”, t’es prévenu dès le début en plus.
Blaise | Cela nous a permis d’avoir de la visibilité. On avait lâché un morceau avant qui n’avait pas du tout pris. On a procédé capsule par capsule, puis il y a un des freestyles qui a passé le million de vues sur Facebook. On a senti qu’il se passait quelque chose.
Miguel | C’est ce qui nous a vraiment lancés, on a vu qu’on faisait dix fois plus de vues avec les freestyles qu’avec nos vrais sons.
Pierre-Paul | Dès qu’on a eu quelques millions de vues, on a sorti nos vrais sons qui ont une audience plus importante qu’avant.
Pourquoi ce choix d’en faire un EP ?
Blaise | Depuis le début, les fans nous demandent de mettre les freestyles sur les plateformes de streaming. On a retravaillé toutes les prod’ et on a décidé de publier ça.
Miguel | On les a rebossés, pour que ce soit plus “écoutable” que les versions originales.
Pierre-Paul | Cela permet également que tout soit réuni, et de clôturer un peu cette histoire pour ensuite passer sur un autre projet.
C’est quand même la classe de faire un freestyle avec Oxmo Puccino.
Pierre-Paul | De ouf, c’était incroyable. Puis ça nous a fait une petite “validation”, alors qu’on se faisait bien clasher de “iencli” au début. Ce qui est normal en soi, avec le piano-souffleur on tend la perche aussi.
Comment vous avez vécu le fait d’être qualifiés de “iencli” justement ?
Pierre-Paul | En vrai, c’est ce qu’on est. Donc on se fout de notre propre gueule. On sait qui on est, on ne va pas s’inventer des personnages qui n’auraient aucun sens.
Miguel | En plus le rap dit de “iencli” se démocratise à mort. Ça devient de moins en moins péjoratif cette expression.
Vous faites preuve de beaucoup de second degré par rapport à tout ça.
Pierre-Paul | Oui carrément, parce qu’on le sait. On est plus proches musicalement d’un Lomepal que d’un Booba, et on le sera toujours. Ça ne sert à rien de vouloir gratter de la “street cred”.
Miguel | C’est ça qui serait horrible surtout.
C’est quoi la marque de fabrique de 47ter ?
Pierre-Paul | On est une équipe de potes, pas de musiciens ou de rappeurs. On a commencé comme ça, et chacun a apporté son truc.
Miguel | Il y a toujours un esprit familial dans le groupe, et ça fonctionne plutôt bien donc c’est que du positif.
Votre premier morceau s’appelle “Sans talent”.
Pierre-Paul | C’est un peu comme les freestyles, on est vachement dans l’autodérision. Au départ, on n’osait pas publier quelque chose sur Internet.
Miguel | Sachant qu’à la base, on faisait quand même de la pop-rock-folk avec une chanteuse, le tout en anglais. Là, c’était la première fois qu’on faisait quelque chose en français. La transition est super dure à assumer. On n’est pas trop sérieux dans la vie de tous les jours, donc il fallait faire un titre à notre image pour commencer.
Quand est-ce que vous êtes passés au rap ?
Pierre-Paul | Personnellement, j’ai limite commencé à en écouter quand j’ai commencé à rapper.
Miguel | Nos classiques, ce n’est pas la Mafia K’1 Fry, etc. C’est peut-être triste pour les puristes, mais ça va avance et les choses évoluent. Nous, on a commencé le rap avec Orelsan, 1995, La Fouine, etc. C’est nos classiques rap, de notre génération. Il faudrait que les gens acceptent la “sous-culture” des rappeurs d’aujourd’hui.
Pierre-Paul | Tu peux faire du rap sans être pro-rap. Nos classiques, c’est davantage du Pink Floyd et du AC/DC que du rap.
Miguel | Il y a une hypocrisie de ouf par rapport à ça. Beaucoup de gens vont écouter des classiques de rap, et se forcent à les écouter, pour se donner une image de mec puriste. Même si en vrai ils n’aiment pas.
Pierre-Paul | On ne vient pas du milieu du rap, c’est normal qu’on ne soit pas des puristes. Puis on est davantage attirés par l’aspect musical que les textes, donc c’est normal pour nous de préférer ce qu’il se fait aujourd’hui au rap des années 1990.
Quels vont être vos futurs projets ?
Blaise | On a déjà sorti un EP l’année dernière qui s’appelle Petit Prince. Désormais, on est sur les finitions d’un album qui devrait sortir d’ici la fin de l’année. Il va marquer une nouvelle phase pour nous, on va proposer notre musique.
Pierre-Paul | C’est pour mettre les freestyles de côté et dire qu’on ne fait pas que des trucs marrants, on fait de la vraie musique. Initialement, les freestyles c’est un concept rigolo mais notre priorité c’est de développer notre vraie musique.
Blaise | C’est cool qu’on ne se soit pas enfermés dans le truc des freestyles, puisque quand on regarde, notre titre qui marche le plus (“Plus tard”), c’est un morceau à nous. On appréhendait un peu la transition. Maintenant on est pressés de sortir d’autres sons. Il y a de plus en plus de gens qui préfèrent nos morceaux à nos freestyles, donc c’est assez cool.
Pierre-Paul | Puis l’EP, tu peux le consommer plus longtemps que les freestyles aussi. Le piano-souffleur, c’est l’enfer sur terre ! [rires]
C’est la fin des freestyles donc ?
Miguel | Je pense qu’on en refera de temps en temps, pour des occasions particulières, pour annoncer des trucs, etc. Mais globalement, la mission est de se détacher de cette image de “mecs à freestyles marrants”.
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