On ne va pas se mentir, les échanges professionnels écrits sont loin d’être l’apogée du fun. Mais, lorsque l’on s’adresse au bon interlocuteur, son office buddy par exemple, ces petits mots doux peuvent égayer une après-midi bien morne. On se raconte des petits potins sur Slack, on ricane à propos d’untel sur Teams, on se fait des blagounettes bien senties par mails interposés.
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Si ces discussions complices sont souvent menées sous couvert d’intimité, cette impression est bien illusoire. Ce que l’on croit être un échange privé, personnel, entre plusieurs personnes, peut en réalité être consulté par l’employeur. Et ce, à n’importe quel moment.
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Cependant, ces inspections sont soumises à certaines conditions. Comme nous l’a expliqué Éric Delisle, chef du service des questions sociales chez la CNIL (la Commission nationale de l’informatique et des libertés), ces petites sessions de stalking se font à divers degrés selon les plateformes utilisées.
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Sur Gmail, abusez du “personnel”
Concernant Gmail ou tout autre logiciel de messagerie e-mail, Delisle est clair : “Votre employeur peut aller regarder dans les e-mails d’un collaborateur pour l’accomplissement de ses tâches.” Il faut donc un motif solide : “Un employeur ne peut pas agir comme un espion ou comme un pervers qui souhaiterait accéder à l’ensemble de vos conversations.”
Il doit aussi vous prévenir de la possibilité d’un tel contrôle… et un seul avertissement suffit à répéter le contrôle autant de fois que l’employeur le souhaite. Il existe en revanche une petite astuce pour éviter les coups d’œil intempestifs : la mention “personnel”. Il suffit de créer un dossier intitulé “Personnel” et d’y glisser ses e-mails… ou d’indiquer la mention “personnel” ou “privé” dans l’objet.
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Si ce réflexe vous échappe de temps à autre, et que vous recevez ou envoyez des e-mails personnels depuis votre adresse e-mail professionnelle – même si on vous le déconseille –, il existe une autre règle. Lorsqu’un employeur consulte un message présumé professionnel, et qu’à sa lecture il se rend compte que c’est personnel, il ne peut pas poursuivre la lecture ou utiliser l’e-mail pour une procédure disciplinaire.
Sur Slack et Microsoft Teams, utilisez des noms de code
Les mêmes règles que pour les mails s’appliquent aux outils de messagerie instantanée tels que Slack ou Microsoft Teams. L’un permet d’envoyer des messages à la vue de toutes et tous, sur des “canaux” publics, mais aussi des “messages directs” privés, adressés à une ou plusieurs personnes – neuf maximum.
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En rappelant que, sur la version gratuite de Slack, la recherche de toutes vos informations est limitée à 10 000 messages, seuls les forfaits payants (Pro ou Business+) permettant de consulter un nombre illimité d’archives. De quoi vous donner une raison de vous réjouir si votre employeur refuse d’investir dans une version payante de Slack.
“Par défaut, Slack conserve tous les messages et tous les fichiers (y compris les clips audio et vidéo) tant que votre espace de travail existe”, précise toutefois la plateforme. Le jour où votre employeur décidera d’upgrader le forfait Slack de votre entreprise, il aura accès à tous les historiques de conversation. Méfiance, donc.
L’autre est un outil de la suite Microsoft 365 et sert à échanger des messages publics sur des canaux, des messages privés individuels ou collectifs. Contrairement à Slack, peu importe l’offre sélectionnée – gratuite, Essentials, 365 Business Basic ou 365 Business Standard –, la recherche et l’échange de messages instantanés seront toujours illimités dans Teams.
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Malheureusement, malgré cette batterie d’options, de personnalisation d’émojis et autres “compliments”, il n’est pas possible d’appliquer la mention “personnel” ou “privé” à une messagerie instantanée, Slack comme Teams. Car ces dernières ne proposent pas d’espace “objet”. À moins d’indiquer dans l’échange même que cette conversation est privée, vous ne pourrez pas la conserver confidentielle.
“Si vous n’avez pas indiqué vos messages comme personnels ou indiqué, en tout cas, dans la conversation, que c’était un échange personnel, l’employeur pourra accéder à l’ensemble des conversations”, explique Delisle.
En revanche, la non-transparence de la démarche de l’employeur peut être attaquée. “L’employeur va être en tort s’il n’a pas prévenu ses salarié·e·s”, rappelle Delisle. Il faut prévenir ses employé·e·s, non pas dans le contrat de travail, mais dans la charte informatique – l’ensemble des moyens informatiques qui sont fournis aux salarié·e·s et qui leur explique les moyens de contrôles utilisés.
En 2021, 1 500 Français·e·s s’estimaient être sous la surveillance illégale de leurs employeurs, rappelle Delisle. Alors n’hésitez pas à vérifier que votre employeur vous a bien prévenu·e de ses agissements, à abuser de la mention “personnel” et à utiliser des noms de code pour échanger les derniers potins.
Que pensez-vous des patrons qui stalkent leurs employé·e·s ? Confiez-vous à : hellokonbinitechno@konbini.com.