“L’homme est une passion inutile.” Telle était la conclusion de Jean-Paul Sartre dans L’Être et le Néant, et ce bien avant l’arrivée de TikTok, de Twitter et des hand spinners. Accepter la facticité de son être sur Terre, c’est probablement le premier constat qu’a fait l’internaute Hiérophante.
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En se rendant sur ce compte Twitter, on ne comprend rien, il y a des milliers de tweets, exclusivement composés d’émojis. C’est en regardant la vidéo de Hiérophante que l’on comprend l’œuvre dans son intégralité.
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“Timeline” est une petite animation de deux minutes créée à partir de 6 800 tweets et plus de 900 000 émojis. Sur le subreddit r/nextfuckinglevel, le post original de l’auteur a déjà rencontré son petit succès. Konbini techno a pu lui téléphoner et le faire parler de son œuvre numérique dantesque.
“C’est l’effort mis dedans qui ne le rend que plus beau”
Hiérophante est un artiste polyvalent français. Initialement musicien dans le cœur, il travaille aussi en tant que graphiste. Depuis environ cinq ans, il s’amuse à poster différentes vidéos très “concepts” sur Internet. Sa première, “Marketing” (un peu NSFW), était principalement “pour avoir un peu de visibilité, vendre ma musique”, concède-t-il amusé.
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L’idée de “Timeline” lui est venue il y a déjà plus d’un an et demi, quand il a demandé à un ami de concevoir un logiciel qui transforme automatiquement les couleurs des images en “pixels d’émojis”. Il avait le concept et le processus de fabrication en tête, mais il lui manquait l’idée.
Ensuite, il a fallu bûcher. Beaucoup bûcher. Hiérophante a posté les 6 800 tweets manuellement pendant huit mois, soit environ 26 tweets quotidiens – bien qu’il ait évidemment préféré faire des journées de “grosse session”. Au total, il estime qu’il a sûrement consacré plus de 500 heures à cette œuvre. Rappelons aussi qu’en bon musicien, il en a évidemment composé la musique.
Lorsqu’on lui demande s’il n’aurait pas pu “automatiser” un peu le tout, via des logiciels ou des algorithmes, Hiérophante s’en amuse. Cette option existe forcément, mais l’artiste préfère de loin son rendu final, où on voit tout le travail qui a été effectué. “C’est l’effort mis dedans qui ne le rend que plus beau”, justifie-t-il. Il précise également que même si des logiciels peuvent faire ça, Twitter est assez rigide puisqu’il peut bloquer le nombre de tweets publiés par jour.
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Il nous confirme aussi qu’il a déjà un autre projet du genre dans les cartons. Cette future œuvre ne repose pas sur le même système de fabrication via Twitter, mais il nous rassure vite : “C’est bien chiant aussi [rires].”
Politique et réseaux
L’animation “Timeline” retrace toutes “les années Trump”, de sa campagne contre Hillary Clinton en 2016 jusqu’à la prise de fonction de son successeur Joe Biden. En s’appuyant sur des moments forts de cette période, des mèmes (Pepe the Frog, “stop the count”, etc.) et le support de Twitter, Hiérophante avait de la suite dans les idées, c’est-à-dire montrer comment les personnalités politiques s’emparent désormais des réseaux sociaux à des fins politiques. Dans ce domaine, Donald Trump est un cas d’école.
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D’ailleurs, sur Reddit, certains lui reprochaient (avant sa précision en commentaire) d’être pro-Trump. Hiérophante s’en amuse et apprécie même qu’un (vrai) pro-Trump ait commenté qu’il avait grandement apprécié la vidéo malgré la critique qu’elle constitue à l’égard de l’ex-président américain.
Finalement, le plus compliqué pour Hiérophante aura surtout été de trouver le subreddit adéquat pour mettre en avant son œuvre. D’habitude, il se rend sur le classique r/videos, mais depuis l’assaut du Capitole par des partisans de Donald Trump en janvier dernier, beaucoup de règles de modération interdisent toute référence politique.
Et l’argent dans tout ça ?
Enfin, lorsqu’on lui demande s’il compte tirer profit de son œuvre, notamment par l’usage des NFT, très tendances, Hiérophante reste assez catégorique sur ce qu’il pense être une “fausse bonne idée qui va disparaître – même si je peux me tromper” :
“J’en pense plutôt du mal [des NFT], même si cela reste intéressant d’avoir un système qui pourrait définir de façon irréversible quel serait l’original d’un fichier numérique (qui reste l’atout premier des NFT). Sauf que le fait que n’importe qui puisse écrire n’importe quoi sur la blockchain rend tout le système inutile et pas plus sûr qu’un contrat de notaire.”
Un avis sur ces œuvres 3.0 ? Sur les NFT ? Donnez-nous votre avis à : hellokonbinitechno@konbini.com.