La tortue de mer est un animal majestueux pouvant facilement atteindre les 80 ans. Pourtant, malgré cette espérance de vie exceptionnelle dans le règne animal marin, elle reste une espèce extrêmement menacée, particulièrement à sa naissance.
Publicité
On connaît ces vidéos où des centaines de petits reptiles en carapace arpentent difficilement le sable des plages pour rejoindre leur mer salvatrice. À ce moment, les jeunes tortues de mer sont particulièrement vulnérables, du fait de leur lenteur, aux attaques d’oiseaux par exemple.
Publicité
Au fil des années, c’est malheureusement l’humain qui est devenu une plus grande menace pour les tortues, et ce avant même l’éclosion. En effet, en Amérique centrale par exemple, neuf espèces de tortues sont considérées comme “menacées”.
Publicité
La montée de braconniers est particulièrement inquiétante car les œufs sont très recherchés pour leur qualité gustative. On leur attribue également des propriétés ésotériques telles que l’amélioration des performances sexuelles.
Tromper et traquer les braconniers
Kim Williams-Guillén est une doctorante en biodiversité, spécialiste de la conservation animale. Désespérée de la montée en puissance du braconnage d’œufs de tortue, une idée brillante lui traverse l’esprit en 2015 : implémenter des puces GPS dans les nids pour retrouver la trace des braconniers.
Publicité
Cinq ans plus tard, Williams-Guillén, assistée de l’ONG Paso Pacífico et d’une équipe multinationales de collègues scientifiques, a réussi à créer l’objet. Nommé “InvestEGGator” (“EnquêtŒUF” si on devait traduire), il s’agit d’un faux œuf issu d’une impression 3D contenant une puce GPS.
Là où ce leurre fait fort, c’est qu’il possède un poids, une taille et même une texture quasiment identiques aux œufs naturels. Et ce dernier a d’ores et déjà fait ses preuves. D’après la première étude de terrain publiée, 101 œufs-leurres ont été savamment disséminés, puis recouverts de sable et mucus dans des nids sur cinq plages au Costa Rica.
Publicité
Parmi cette centaine d’œufs, cinq ont pu être traqués pour suivre la route de braconniers. Les criminels avaient capturé au total un quart des centaines d’œufs-GPS posés.
Ainsi, l’équipe scientifique a pu traquer un œuf jusqu’à 137 kilomètres dans les terres pour le retrouver à l’arrière d’un supermarché. Ensuite, le signal s’est retrouvé dans une propriété résidentielle. Pour Helen Pheasey, codirectrice de l’étude, cela signifie qu’ils sont capables de remonter la piste du braconnage à l’acheteur, et donc “tous les acteurs de la chaîne”, écrit-elle sur Current Biology.
Publicité
De son côté, Williams-Guillén précise qu’il ne s’agit pas de s’en prendre directement aux braconniers locaux, qui pour la plupart “vivent dans une extrême pauvreté”. L’idée est de localiser les points et lieux clés du trafic au global pour mettre un terme, en collaboration avec les forces de l’ordre, aux agissements des “plus gros poissons”.
C’est aussi l’avis de Héctor Barrios-Garrido, biologiste de la conservation à l’université vénézuélienne de Zulia (Maracaibo). Cela permettrait de localiser les grands responsables du trafic. Il précise toutefois qu’il n’y a pas de technologie miracle, rappelant par exemple la juridiction ambiguë autour des œufs de tortue au Costa Rica : interdits de braconnage, interdits à la vente, mais l’achat n’est pas pénalement répréhensible.
L’équipe en charge de cette innovation le sait. Les œufs GPS ne sauveront pas les tortues tout seuls. Williams-Guillén rappelle à ce propos l’importance de la sensibilisation (dès l’école) à ces sujets, véritable fer de lance dans la lutte pour la biodiversité.
Vous connaissez d’autres exemples high-tech qui participent à la préservation ? Écrivez-nous à hellokonbinitechno@konbini.com !