Le sport s’accorde de plus en plus au féminin. Et c’est une très bonne nouvelle. En soutien de l’évolution que nous connaissons dans la société en termes de droits civiques et sociaux, le sport contribue à son niveau à faire tomber les barrières, lentement mais sûrement.
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Derrière toutes les considérations symboliques, les athlètes œuvrent pour l’égalité. Profitant de leur réussite personnelle et du rayonnement offert par la digitalisation du monde, elles n’hésitent plus à surfer sur leur notoriété pour diffuser leur message, contribuant à leur niveau au changement des mentalités. Focus sur ces championnes inspirantes.
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Simone Biles
On peut être la gymnaste la plus titrée de tous les temps (quatre titres olympiques, 19 médailles d’or mondiales) et être rattrapée par ses failles les plus intimes au pire des moments. C’est ce qui est arrivé à Simone Biles lors des JO de Tokyo, lorsqu’elle est victime de “twisties” (“perte de figure” en français, un phénomène psychologique entraînant une désorientation lors des figures de saut), qui la contraignent à se retirer des différents concours dans lesquels elle est engagée.
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Écrasée par la pression, l’Américaine admet courageusement que sa santé mentale ne lui permet pas de continuer. “Si vous regardez tout ce que j’ai traversé ces sept dernières années, je n’aurais jamais dû faire partie d’une autre équipe olympique”, explique-t-elle quelques semaines plus tard dans le New York Magazine.
Biles fait référence, entre autres, à sa présence parmi les victimes de l’ancien coach fédéral de gymnastique, Larry Nassar, entre-temps condamné à la perpétuité suite au viol de plus de 250 athlètes mineures, dont elle faisait partie. Depuis, Biles a témoigné devant le Congrès américain pour dénoncer l’inaction de la Fédération américaine de gymnastique, ainsi que la lenteur de l’enquête menée par le FBI.
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Allyson Felix
Difficile de concevoir que le plus grand combat d’une telle championne ne s’est pas déroulé sur les pistes, mais contre son propre équipementier. Le 22 mai 2019, Allyson Felix, sept médailles d’or olympiques et treize titres mondiaux, publie une tribune dans le New York Times dans laquelle elle fustige l’attitude de Nike et la politique de la marque à l’égard des athlètes féminines en post-maternité. Felix dénonce notamment un contrat de sponsoring au montant indexé sur les performances durant les douze mois suivant l’accouchement, entraînant un déclin sensible des revenus.
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“Malgré toutes mes victoires, Nike voulait me payer 70 % de moins qu’avant. Si c’est ce que je vaux, je l’accepte. Mais je n’accepte pas ce statu quo autour de la maternité, dit-elle dans la tribune en question. C’est l’un des exemples d’une industrie du sport où les règles sont encore principalement faites par et pour les hommes.” En réponse, l’athlète féminine la plus décorée de l’histoire de l’athlétisme américain est allée glaner deux nouvelles médailles olympiques à Tokyo avec, aux pieds, des chaussures Saysh, une marque dédiée aux femmes qu’elle avait lancée quelques mois auparavant.
Billie Jean King
L’ancienne tenniswoman américaine, 129 titres dont douze en Grand Chelem en simple, a été l’une des pionnières en termes d’engagement social. Son combat pour l’égalité des sexes et la promotion du sport féminin a débouché sur la création de l’institution majeure du tennis féminin mondial, la Woman Tennis Association (WTA), en 1973. À cette époque, le tennis féminin n’est pas encore professionnel et les hommes monopolisent les gains en termes de prize money. La WTA permet alors au circuit féminin d’exister, de s’organiser et de se professionnaliser.
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Mais BJK va plus loin en poussant la loi Title IX, amendement à la loi sur les droits civils de 1964, exigeant des établissements d’enseignement financés par le gouvernement fédéral d’accorder les mêmes ressources aux étudiants quel que soit leur sexe. Avec, pour effet direct, la parité hommes-femmes sur le financement des budgets sportifs dans les universités américaines. BJK est également l’une des premières athlètes de dimension internationale à faire son coming out, le 1er mai 1981.
Ibtihaj Muhammad
Parce qu’il n’y a pas de hiérarchie dans les combats qu’il faut mener pour l’égalité des sexes et la liberté des femmes à se vêtir librement, l’histoire de cette sabreuse américaine méritait une exposition supérieure à ce qu’elle a pu connaÎtre. Cette histoire, c’est celle de la première athlète américaine à se présenter à une épreuve olympique vêtue d’un hijab aux couleurs de la bannière étoilée, en 2016 à Rio.
Ibtihaj Muhammad devient alors un symbole. Alors qu’elle avait déjà été reçue par le couple Obama à la Maison-Blanche avant les Jeux, elle est ensuite classée parmi les 100 personnalités les plus influentes de la planète par le magazine Time. Quant au fabricant de jouets Mattel, il commercialise carrément une Barbie à son effigie.
Lors de sa venue en France en 2019, en plein débat autour du hijab de sport proposé par Decathlon, elle déclare : “Je pense que vous n’êtes pas une féministe si vous ne croyez pas à la dimension du choix dans le port du hijab. Quiconque croyant aux droits individuels, à la liberté de choisir, devrait être l’allié des femmes qui ont choisi de le porter.” Un discours façonné par son vécu personnel, puisque Ibtihaj Muhammad s’est tournée vers l’escrime à ses 13 ans après avoir vu le volley, le basket ou l’athlétisme lui fermer les portes en raison de sa tenue.
Nadia Nadim
L’histoire de Nadia Nadim a de quoi inspirer les plus grands réalisateurs et romanciers. Mais aussi (surtout) beaucoup de petites filles dans le monde. Originaire d’Afghanistan, qu’elle a quitté à 12 ans avec sa mère et ses quatre sœurs suite à l’exécution de son père, général de l’armée afghane, par les Talibans, elle finit par s’installer au Danemark et s’y établir comme une sportive de haut niveau.
Nadia Nadim devient footballeuse professionnelle, joue pour les plus grands clubs comme Manchester City ou le PSG en Europe, Portland ou Louisville aux États-Unis. Naturalisée danoise, elle dispute une centaine de matches avec sa sélection d’adoption. Une ascension sur les terrains qu’elle accompagne d’un engagement hors des pelouses, menant parallèlement des études de médecine dans le but de se reconvertir dans la chirurgie reconstructrice une fois sa carrière terminée.
Nadim parle couramment neuf langues (dari, danois, anglais, allemand, farsi, ourdou, hindi, arabe et français), elle est ambassadrice de l’Unesco, et elle s’est fait la promesse de revenir en Afghanistan pour déterrer les médailles militaires de son père, mais aussi pour s’impliquer dans des projets de santé et d’éducation. “J’ai été élevée au Danemark, mais j’ai le sentiment d’être partout chez moi, que ce soit aux États-Unis, en France, peu importe. Je ne sais pas exactement où se trouve mon identité, mais ce dont je suis certaine en revanche, c’est que l’Afghanistan fait partie de moi et que ce sera toujours le cas, que je le veuille ou non”, avait-elle dernièrement raconté à So Foot.