Bientôt la fin des matches en soirée ? L’hypothèse est aujourd’hui clairement envisagée, de l’aveu même de la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra, interrogée durant l’été sur la vocation du sport à participer à l’effort de sobriété énergétique. Au-delà de la nécessité de rationner l’énergie dans un contexte géopolitique instable, la transition écologique s’est imposée comme un enjeu de société.
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Un enjeu dont le sport ne peut être dissocié. Mais alors, comment le foot peut-il (doit-il ?) prendre part à ce défi ? Les clubs, les institutions, mais aussi les individus se mobilisent pour limiter l’impact de leur activité, conscients de l’enjeu pour les années à venir, mais il reste encore, incontestablement, beaucoup de chemin à parcourir.
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Ancien rugbyman international français, Julien Pierre a fondé en 2020 le label « Fair Play for Planet », qui aspire à accompagner les entités sportives dans leurs actions vertueuses pour la planète. Il estime que “le sport a cette puissance fédératrice, cette capacité de faire changer les choses, de s’adresser à toutes les populations, à différentes strates de la société, notamment sur le plan social, sociétal”, mais que “son engagement en termes d’écologie est en retard, par manque de structure”. Il y a donc un réel enjeu et une marge de progression concrète dans le lien entre écologie et sport professionnel. Et ce, même si les démarches se multiplient.
Des stades écoresponsables
Pour ce qu’ils génèrent en production de déchets et en consommation d’énergie, les stades sont un enjeu central de la transition écologique du sport. Inaugurée en 1996, la Johan Cruyff Arena fait figure d’exemple à suivre. La plus grande enceinte des Pays-Bas (68 000 places), qui accueille les matches de l’Ajax Amsterdam, mais aussi de nombreux événements culturels, peut se vanter de figurer parmi les stades les plus responsables du monde, grâce à de nombreuses adaptations : sièges conçus à base de canne à sucre, système de récupération des eaux de pluie pour arroser la pelouse, utilisation de tondeuses électriques, installation de panneaux solaires et éoliennes sur le toit, système de chauffage durable, éclairage avec ampoules LED à détecteurs de mouvement… Même le système d’alimentation de secours a été créé à base d’anciennes batteries électriques de voiture.
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À un degré moindre, en France, certains stades se convertissent eux aussi. À Nice, l’Allianz Riviera figure parmi les rares enceintes du monde construites avec une charpente en bois (mixte). Elle dispose elle aussi d’un système de panneaux solaires, ainsi que d’un système de climatisation naturelle et de récupération des eaux de pluie. “L’écoresponsabilité, ce n’est pas seulement un coût, ce sont aussi de nouveaux revenus”, rappelle Julien Pierre.
“On peut améliorer la consommation d’énergie dans des stades où la lumière, les loges, les télés ou la climatisation restent allumées toute la semaine, poursuit l’ancien rugbyman. Appliquer des règles d’extinction des appareils, c’est 20 à 40 % d’économie sur la facture d’électricité à la fin de l’année.”
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Les clubs (même les plus grands) optent pour le train
Les voyages constituent l’autre gros impact négatif du sport professionnel. Julien Pierre aime à le rappeler, “selon l’ADEME (l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), entre 70 et 80 % du bilan carbone d’un événement sportif est drainé par le transport des joueurs et des spectateurs”.
Si la plupart des clubs et des municipalités incitent les fans à venir au stade en transports en commun, les trajets aériens à répétition des équipes à travers le pays ou le continent (voire plus loin) représentent un poids important en termes d’émissions de CO2. Voilà pourquoi certains clubs délaissent de plus en plus, lorsque c’est possible, l’avion pour le train.
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C’est le cas en Espagne, avec le Real Betis qui annonce que pour la 2e année consécutive, les équipes professionnelles féminine et masculine de football et de basket se déplaceront en train, en vertu d’un partenariat avec la RENFE (la SNCF locale). En Angleterre, c’est le FC Liverpool qui avait fait l’actualité en reliant les 350 km qui le sépare de Londres en train, pour y jouer son match de la 1e journée de Premier League contre Fulham.
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Des équipements à réinventer
Responsable de la pollution de 20 % des eaux du monde, et toujours solidement installée à la 2e place des plus polluantes tous secteurs confondus, l’industrie textile est un aspect sur lequel le sport professionnel peut et doit s’adapter. Depuis quelques années, les équipementiers œuvrent pour fournir aux clubs (et aux fans) des vêtements plus éthiques. Dès 2016, Adidas a ainsi commencé à fournir au Bayern Munich et au Real Madrid, des maillots conçus à base de déchets plastiques récoltés dans l’océan, en lieu et place des habituelles matières synthétiques, pourtant moins chères à produire.
Depuis, d’autres marques se sont mises au diapason comme Puma, qui conçoit désormais ses maillots à base de fibre de polyester recyclé, ou encore Macron. Nike, de son côté, a même commercialisé un ballon nommé “next nature”, conçu à base d’airbags recyclés.
Des joueurs qui s’impliquent
La dimension médiatique et populaire du footballeur de haut niveau lui accorde une grande exposition que certains n’hésitent pas à utiliser pour mettre en avant certaines causes. Là encore, la cause écologique peut espérer gagner du terrain, à l’image de l’initiative du défenseur britannique Ben Mee, qui a annoncé qu’il prendrait en charge une taxe (sous la forme d’une redevance payée à Carbon Neutral Britain, un programme certifié ONU) pour compenser les émissions de carbone liées à son transfert de Burnley à Brentford l’été dernier. “Je suis conscient que les transferts engendrent beaucoup de miles aériens et beaucoup de kilomètres de conduite également, donc je cherche à compenser mes émissions pour ce transfert”, avait-il ensuite détaillé dans une vidéo.