Depuis huit ans déjà, Loïc Durand sillonne la France pour supporter son club de cœur, l’AC Ajaccio. Tous les week-ends ou presque, il part en déplacement dans tous les stades du pays pour donner de la voix… et se remplir l’estomac. Cornet de frites, aligot-saucisse et sandwiches triangle, on lui a demandé de nous raconter son quotidien sur les routes et ses meilleures (et pires) expériences culinaires.
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Club Sandwich / Depuis quand, et surtout pourquoi, tu suis ton club, l’AC Ajaccio à travers la France ?
Loïc / Cela a été un long cheminement. J’ai commencé en 2011. Cette année-là, tous les astres étaient alignés : je venais d’avoir le permis, l’AC Ajaccio venait de monter en Ligue 1 et le premier match à l’extérieur avait lieu à deux ou trois heures de chez moi. En tant que supporter de l’ACA de longue date, j’ai décidé d’y aller et ça a été le coup de foudre.
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J’ai décidé de faire trois ou quatre déplacements la première saison et au fur et à mesure des années, j’ai augmenté le nombre de déplacements, jusqu’à tous les faire, matchs amicaux compris. C’est comme un aimant duquel je n’arrive pas à me détacher et qui m’attire tous les quinze jours.
Évidemment, il faut bien te restaurer. Est-ce que tu te fixes un budget, des trucs à tester absolument ou tu te laisses porter par ce que tu trouves dans chaque stade ?
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Pour la bouffe et la boisson, c’est open bar à chaque fois. La gourmandise, c’est mon péché principal. En général, quand j’ai un long déplacement de prévu, je vais faire les courses la veille ou alors sur le trajet de mon déplacement. Et je me laisse totalement porter par ce qui me fait envie. Je n’ai aucun budget et en général, j’achète bien plus qu’il ne m’en faut.
“J’ai pris pas mal de poids depuis que je pars en déplacement”
Il y a les incontournables que je prends à chaque fois comme de la Red Bull, de la Wattwiller et des chewing-gums. Et pour le reste, je me fais plaisir. J’aime bien tenter les nouveautés. Je vais prendre les derniers gâteaux sucrés qui viennent de sortir par exemple, pour tester. Et après, dans le stade, je mange obligatoirement, à la mi-temps, ce que la buvette propose. Je fais d’ailleurs un classement des meilleures buvettes du championnat à la fin de chaque saison. Pas étonnant que j’ai pris pas mal de poids depuis que je suis l’ACA en déplacement…
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En fonction des régions, les plats à la buvette évoluent-ils ou cela tourne plutôt en rond autour des sandwiches/frites ?
Rares sont les stades qui font la part belle aux spécialités locales. Surtout à l’intérieur des enceintes. Généralement, à la buvette des stades, on a droit à des mets habituels, du genre jambon-beurre ou poulet-crudités, avec du pain industriel avec lequel tu t’étouffes si tu en manges plus de trois bouchées.
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Certains stades proposent des plats chauds, comme merguez, saucisses et/ou frites. Mais c’est déjà plus rare. Il faut d’ailleurs noter une grande différence entre ce qui est proposé dans les buvettes en tribunes “normales” et ce qui est proposé dans les parcages visiteurs. Le meilleur exemple est à Lorient sans doute.
“Il y a une grande différence entre ce qui est proposé dans les buvettes en tribunes ‘normales’ et ce qui est proposé dans les parcages visiteurs”
C’est-à-dire ?
À Lorient, il y a des food trucks dans le stade qui te servent des burgers au poulet pané ou même des burgers végétariens, avec des bonnes frites, de la vraie bière et du vin chaud. Et de l’autre côté, en parcage visiteurs, on te vend un sandwich triangle de chez Leclerc avec un café froid et un paquet de chips. Deux poids deux mesures.
Heureusement, dans certains stades, on a droit à quelques spécialités locales. J’ai le souvenir d’un burger au Maroilles à Valenciennes. Et puis il y a les fameuses “camionnettes de bouffe” comme je les appelle, qui sont placées devant les stades. L’occasion de manger une bonne frites-fricadelles à Lens ou un merveilleux américain-andouillettes de Chez Fred, à Troyes ou à Auxerre.
C'EST DÉJÀ L'HEURE DU CASSE-CROÛTE (Américain-andouillettes, je t'aime) #AJAACA pic.twitter.com/C3D1UfO7ie
— Perfettu (@LoicDrd) May 4, 2018
Parlons peu, parlons bien : où est-ce que l’on mange le mieux ?
Paradoxalement, c’est quand même dans les petits stades champêtres, dans lesquels je peux aller en match amical ou en Coupe de France, qui ont les meilleurs produits et le meilleur service, avec des vieux édentés qui te font un accueil du tonnerre, rempli de gentillesse et de générosité, avec des frites qui sortent de la friteuse et des merguez qui viennent de sortir du barbecue.
“Paradoxalement, c’est dans les petits stades champêtres que l’on trouve les meilleurs produits et le meilleur service”
J’ai le souvenir d’un match à Quimperlé, début janvier, sous la pluie, en Coupe de France. J’avais installé notre bâche d’I Sanguinari (notre groupe de supporters) juste devant la buvette. Et les personnes de la buvette sont vite arrivées vers nous et ils nous ont offert un verre de vin chaud et une part de far breton. Il n’y a pas de secrets de toute façon, les meilleurs accueils et les meilleures buvettes, on les trouve dans le Nord et en Bretagne. Mais j’ai hâte d’aller à Rodez cette saison, il paraît qu’ils ont de l’aligot-saucisse et du ris d’agneau à leur buvette !
“J’ai hâte d’aller à Rodez cette saison, il paraît qu’ils ont de l’aligot-saucisse et du ris d’agneau à leur buvette”
Quelle a été ta meilleure découverte culinaire ?
Malheureusement, dans les stades, on a très peu droit à des trucs qui sortent de l’ordinaire. Alors dès qu’il y a quelque chose d’extraordinaire, c’est tout de suite impressionnant, même si au final ce n’est pas un délice exquis. Il y a quand même l’américain andouillette qui est à noter, le burger au maroilles également. Sinon, c’est du basique.
Aucun souvenir particulier, vraiment ?
Ah si, je me souviens, lors d’un déplacement à Troyes, on s’était autorisé un resto après le match et j’avais mangé une andouillette au chaource. Un délice. Mais c’est très rare. Et puis, il y a les fois où on finit au McDo du coin….
“Ces déplacements sont mes moments de liberté. Je pars quand je veux, je m’arrête quand je veux, j’écoute la musique que je veux, je mange ce que je veux”
Une expérience culinaire qui t’a marqué à tout jamais ?
J’ai un souvenir d’une année à Châteauroux. Je vais à la buvette et là c’était des retraités qui nous servaient. Ils étaient débordés et un peu perdus. L’un d’eux prend une merguez, l’échappe par terre, souffle dessus pour enlever les crasses et la remet ni vu ni connu dans l’un de nos sandwichs. Si on ajoute à cela le fait qu’il n’y avait pas de sauce dans le sandwich et que le pain était sec, on obtient un casse-croûte inoubliable, dans le mauvais sens du terme.
Qu’est-ce que représentent ces déplacements pour toi ?
Ces déplacements sont mes moments de liberté. Je pars quand je veux, je m’arrête quand je veux, j’écoute la musique que je veux, je mange ce que je veux. Voyager aux quatre coins du pays m’a appris à me détacher de mon quotidien, à me débrouiller tout seul, à m’organiser un minimum. Et puis je suis président du groupe de supporters de l’ACA nommé I Sanguinari, donc cela m’a appris à prendre des responsabilités, à organiser des déplacements, à faire vivre des tribunes. Cela m’a permis de combattre ma timidité et de me libérer, aussi bien intérieurement qu’extérieurement.
“Jusqu’à aujourd’hui, tout s’est toujours bien passé avec les adversaires, dans le respect. La preuve que les supporters de deux équipes différentes peuvent bien s’entendre”
C’est aussi l’occasion de rencontrer du monde, j’imagine ?
Grâce à ces déplacements, j’ai pu me faire de nouveaux potes, que je vois que deux ou trois fois dans l’année, mais à chaque fois c’est un plaisir. Partager ces moments avec des mecs qui ont la même passion, c’est primordial et ça fait du bien. Et puis, il y a la rencontre avec les supporters adverses. Jusqu’à aujourd’hui, tout s’est toujours bien passé avec les adversaires, dans le respect. La preuve que les supporters de deux équipes différentes peuvent bien s’entendre.