C’est en scrollant que je suis tombée par hasard sur le compte TikTok d’Emmanuella, alias @chuchub_. Sa façon de parler de la gêne au lit et de la sexualité des personnes grosses m’a énormément fait rire. Je n’ai pas hésité à la contacter dans la foulée, elle m’a répondu très rapidement et dit être très intéressée pour venir tourner une interview : “J’étais contente parce que ça m’a permis d’aborder dans un média ce sujet dont personne ne parle”.
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Une vague de haine gratuite
Le tournage se passe très bien, Emmanuella est très à l’aise face caméra et la vidéo est publiée le mercredi 20 juin. Elle prend vite de l’ampleur et les commentaires déplacés voire insultants aussi… L’équipe de CM de Konbini en supprime par dizaines, mais pour Emmanuella, c’est trop.
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“J’ai reçu des critiques de femmes, mais les propos des hommes ont été beaucoup plus virulents que ce que j’imaginais. En soi, les mauvais commentaires, c’est Konbini qui les gère, je ne les vois pas, mais à partir du moment où les gens se détachent et prennent leur doigt pour aller sur Instagram pour me dire : ‘Va courir’, ‘Oh mon Dieu, mais qui la touche ?’, ‘Si elle arrive à pécho et pas moi, je ne comprends pas’, ‘Va mourir’…”
La suppression de l’interview
À cause de cette vague de haine gratuite, Emmanuella m’envoie un message et me demande si Konbini peut supprimer la vidéo de toutes les plateformes. Je tente de la rassurer et de lui dire que les modérateurs sont sur le coup, mais l’ampleur est trop compliquée à gérer : “Pour protéger mon image et ma santé mentale, j’ai préféré demander la suppression de la vidéo. J’ai l’impression de leur donner raison en faisant ça, alors que je n’ai pas pour habitude de baisser les bras. Mais à partir du moment où c’est récurrent, que je reçois des DM, tu as beau être la personne la plus forte au monde, forcément, ça te touche”, explique-t-elle.
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Évidemment, la priorité, c’est la personne qu’on interviewe et son ressenti après la publication de la vidéo. Nous avons donc décidé de dépublier l’interview, pour la protéger au mieux face à la vague de cyber-harcèlement. Forcément, c’est très décevant d’en arriver là, puisqu’elle avait un message fort à faire passer :
“Au final, j’aurais aimé que les gens m’attaquent sur les propos que j’ai tenus, qu’ils me disent : ‘Oh non, elle parle de sexe, oh la pudeur, oh la dignité’. Je suis super dégoûtée que les gens se soient contentés de critiquer mon physique et n’aient pas écouté ce que je disais. Mon message n’a même pas été écouté et, au final, tout le monde s’est concentré sur mon physique. Encore une fois, une femme noire grosse qui prend la parole sur les réseaux, ça dérange toujours autant. J’ai l’impression qu’on recule, qu’on n’avance pas. On dit que la diversité, c’est toujours bien vu, mais quand tu es différente et que tu prends la parole, tu as l’impression d’être censurée parce que ton physique ne plaît pas.”
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Encore une fois, se pose la question de l’autocensure. Si on ne donne plus la parole à des personnes qui sont susceptibles de se faire cyber-harceler, on les invisibilise et on donne raison à la haine. Face à certaines vagues de cyber-harcèlement, nos moyens humains sont honnêtement et tout simplement insuffisants. Mais doit-on s’interdire de leur laisser la parole ? C’est ce que voudrait Usul. Ce n’est pas ce que nous pensons. On va donc continuer à s’interroger sur la façon dont on essaye de donner de l’écho à des histoires et des témoignages importants sur les sujets qu’on défend.