Il est temps d’arrêter de s’accaparer le coming out des figures publiques

Publié le par Flavio Sillitti,

© River Callaway/Billboard via Getty Images

Non, un coming out ne doit pas devenir une annonce publique surexploitée dans les gros titres.

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Le coming out, c’est sacré. Aucune personne queer ne pourra le contredire, et même les non-queers pourraient le défendre, notamment au vu des nouvelles représentations dans les médias, plus justes et pertinentes qu’avant — dans l’ensemble. Le concept décrit un geste personnel à la fois profondément intime et pourtant complètement tourné vers les autres, à tel point que certain·e·s s’autorisent parfois à s’accaparer celui des autres, avec plus ou moins de dégâts.

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La chasse à la sorcière

Souvent défini à tort comme un seul et unique moment-clé du parcours queer, le coming out se révèle la plupart du temps cyclique, répété, nécessaire à chaque nouvelle exposition et introduction de soi à l’inconnu. Il n’y a pas un coming out, mais des coming out, plus ou moins difficiles, plus ou moins contrôlés. La personne queer lambda peut potentiellement faire l’expérience de cette notion de manque de contrôle sur ses propres coming out, mais pour la personnalité publique, c’est presque inévitable.

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Il y a de la part du public cette envie de savoir, évidemment, et donc de la part des médias, d’informer. Mais à quel prix ? Qu’est-ce qu’un média vise à transmettre lorsqu’il révèle l’orientation sexuelle d’une figure publique ? Traite-t-on l’information de la même manière que l’annonce d’un nouveau Scorsese ? De la dernière titularisation au sein du PSG ? Ou d’une nouvelle grossesse d’une des sœurs Kardashian ? Comment manie-t-on le coming out en journalisme aujourd’hui ? Si vous voulez notre avis : mal.

En faisant de cet événement si symbolique un objet médiatique comme les autres, on prive les personnes queers du contrôle si crucial sur leur moment. En 2020, Angèle avait repris le contrôle sur son propre coming out, après qu’une émission télévisée l’a outée avant même qu’elle n’en ait fait l’annonce publique. Un épisode compliqué qu’elle aborde d’ailleurs dans son documentaire Netflix.

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Coming out forcé

En 2022, c’est l’acteur britannique Kit Connor, héros de la série Netflix Heartstopper, qui raconte l’histoire d’amour queer entre deux jeunes adolescents, qui a subi ce qu’il décrit comme un coming out “décevant”, estimant même avoir été forcé d’assumer sa bisexualité suite à la pression subie par les médias et sur les réseaux sociaux, alors qu’il n’était âgé que de 18 ans. “Je suis bi. Félicitations pour avoir forcé un jeune homme de 18 ans à faire son coming out. Je pense que certains d’entre vous n’ont pas compris le message de la série. Bye.”, avait-il partagé dans un tweet.

Récemment, c’est Billie Eilish qui a été victime d’un outing par le média Variety. Alors qu’elle foulait le tapis rouge de la cérémonie des Hitmakers Awards, la chanteuse a été épinglée sur l’une des confidences faite à demi-mot dans son entretien pour le média quelques mois plus tôt, à savoir son attirance pour les femmes. Le malaise est palpable, et sous la pression de la caméra et de la journaliste, la jeune artiste de 21 ans affirme sa bisexualité, tout en verbalisant son inconfort d’en parler publiquement. Quelques heures plus tard, elle exprime son mécontentement sur Instagram :

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“Merci Variety pour mon prix et pour m’avoir forcée à faire mon coming out sur un tapis rouge à 11 heures du matin au lieu de parler d’autres choses qui comptent. J’aime les garçons et les filles, laissez-moi tranquille à ce sujet s’il vous plaît.”

Chez nous, l’humoriste et comédien Panayotis Pascot, qui a sorti en août dernier son premier ouvrage La prochaine fois que tu mordras la poussière aux éditions Stock, s’est retrouvé au moment de l’annonce du livre en gros titres de plusieurs quotidiens du pays avec des accroches ne s’éloignant jamais vraiment du “Panayotis Pascot fait son coming out”. Sauf que, non, Panayotis Pascot n’a pas fait son coming out. Par contre, il a annoncé la sortie d’un livre qui, effectivement, parle entre autres de son homosexualité, comme l’indiquait prématurément un résumé sur la précommande Fnac du livre.

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Mais rien dans sa communication personnelle sur ses réseaux n’a jamais indiqué qu’il nous dévoilait consciemment cette partie de sa vie, ou qu’il autorisait cette information si personnelle à être au centre de ses actualités. La façon dont il avait abordé le sujet, à demi-mot, à travers son sensible spectacle Presque disponible sur Netflix, prouve à quel point il reste parcimonieux, pudique et en contrôle sur le dossier, qui n’appartient qu’à lui.

En ce sens, on aurait pu attendre un peu plus de subtilité de la part du monde médiatique, car en faisant d’un coming out le sujet brûlant des actualités d’une personne queer, on la restreint forcément à ce trait identitaire, rendant le coming out en question assez complexe voire douloureux pour en dédier une partie de son premier ouvrage. C’est le serpent qui se mord la queue.

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Panayotis Pascot a sorti un livre, et on l’a adoré. S’il peut permettre une représentation queer positive, on s’impatiente davantage. Le reste, on l’apprendra en temps voulu, à son rythme à lui. Arrêtons simplement d’imposer le nôtre, et modifions tous ces titres putaclics qui ne profitent qu’à ceux qui les rédigent.