Dans le cadre de la promotion du film Un illustre inconnu, plusieurs journalistes et blogueurs ont dû faire face à une usurpation de leur identité. Explications d’une campagne à la limite de l’illégalité.
17h07. Mon téléphone vibre, je viens de recevoir un e-mail. L’expéditeur est un certain “Illustre inconnu”. Le contenu, un poil angoissant :
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Aujourd’hui, un illustre inconnu a pris ta place sur Facebook. Suite à cette expérience, j’ai un message pour toi : http://bit.ly/LouisLepron. Il répondra, j’en suis sûr, à toutes les questions que tu te poses.
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Une campagne de promo à la limite de l’illégalité
Vous l’aurez compris, cette usurpation d’identité était motivée par un seul objectif : faire la promotion d’Un illustre inconnu, film réalisé par Matthieu Delaporte. Il raconte l’histoire de Sébastien Nicolas, joué par Mathieu Kassovitz, qui “a toujours rêvé d’être quelqu’un d’autre”.
Le pitch se poursuit ainsi :
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Mais il n’a jamais eu d’imagination. Alors il copie. Il observe, suit puis imite les gens qu’il rencontre. Il traverse leurs vies. Mais certains voyages sont sans retour.
Je n’ai évidemment pas été le seul à avoir reçu ces messages et à avoir constaté la création de ce compte Facebook imitant le mien. Est-ce que la promotion d’un film, quel qu’il soit, vient de trouver ici sa limite ?
Je pose la question à Alexandre, derrière le blog CloneWeb, victime du même procédé promo. Il n’en revient pas :
En soi, c’est une très bonne idée de com’ de jouer sur l’usurpation d’identité, puisque c’est le thème du film. Mais j’aurais aimé qu’on envisage les choses différemment. Qu’on me demande mon avis, qu’on m’inclue dans le jeu. Si on m’avait dit “on peut créer un faux profil, tu peux jouer le jeu”, j’aurais sûrement dit oui.
C’est la démarche qui m’a plus dérangé. Je n’ai pas été prévenu, les photos présentes sur le faux profil étaient donc bien des photos perso de mon compte Facebook. D’un autre côté, c’est sûrement réussi, le film parle sûrement de ça. Mais la façon dont ça a été fait n’a pas été très honnête, et il y avait d’autres façons d’usurper une identité que de créer un faux compte Facebook comme ça.
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Ma première usurpation d'identité sur Facebook \o/ (que vous pouvez signaler) pic.twitter.com/CwVUboi9rV
— Alexandre Loos (@AlexLoos) 15 Octobre 2014
Dans un post de blog, Romain Jolivot raconte comment il s’est retrouvé face à… lui-même. Et d’écrire :
À 14h, ce fameux faux compte que je prenais pour un bug commence à me parler sur Facebook, bon là forcément léger flip en consultant le compte et voyant que mes photos, statuts, etc. y apparaissent. Première réaction, contrôle du compte, trop de contenu personnel repris. Hum. Faut faire quelque chose. Deuxième réaction suite à la constatation, déclaration du compte à Facebook, qui en 60 secondes chrono a supprimé le compte.
15.000 euros d’amende
Dans le code pénal, voilà ce que l’on peut lire sur l’usurpation d’identité :
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Le fait d’usurper l’identité d’un tiers ou de faire usage d’une ou plusieurs données de toute nature permettant de l’identifier en vue de troubler sa tranquillité ou celle d’autrui, ou de porter atteinte à son honneur ou à sa considération, est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.
Pour Alexandre, ce procédé pose un problème :
C’est une question d’éthique. On peut oser beaucoup de choses dans le marketing et la communication, mais l’usurpation d’identité, même si c’est “pour rire”, sans mettre la personne au courant, c’est non. Sur ce point-là, oui, ça a trouvé sa limite.
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Buzz 1 – Morale 0
Quelques heures après avoir m’avoir envoyé un dernier message, le faux compte Facebook se supprime de lui-même. Si le coup de com’ est réussi (Le Point a écrit un article dessus, plusieurs blogueurs ont fait de même… et moi aussi), le résultat laisse un goût amer.
Au-delà de brouiller les frontières entre réalité et fiction, la campagne marketing d’Un illustre inconnu est allée trop loin : son procédé est moralement dérangeant. Ou quand la quête du buzz initie des concepts foireux.