La longue agonie de la plateforme Salto, censée un temps être un “Netflix à la française”, pourrait s’achever sous peu par sa disparition, attendue depuis des semaines mais qui semble désormais imminente. Lancée en octobre 2020 et détenue à parts égales par France Télévisions, TF1 et M6, Salto a annoncé lundi sur sa page d’accueil qu’elle ne prenait plus de nouveaux abonnés. Une annonce accompagnée de ce qui ressemble fort à une épitaphe : “Merci à tous les abonnés Salto d’avoir partagé avec nous leur envie et leur enthousiasme pour une plateforme de streaming made in France.”
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De source proche du dossier, des annonces formelles sur l’avenir de la plateforme pourraient intervenir “d’ici mercredi soir”. Mais dès lundi soir, le groupe M6, qui présentait ses résultats 2022, a annoncé avoir provisionné dans ses comptes sa quote-part des charges de liquidation de Salto, pour environ 22 millions d’euros, et réorienter ses investissements vers sa propre offre de streaming.
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“Des procédures sont en cours pour tourner la page Salto et nous concentrer sur notre métier”, “nous sommes plutôt une société qui finance ses activités par la publicité”, a commenté le président du directoire de M6 Nicolas de Tavernost. Une dissolution ne serait pas une surprise : l’avenir de la plateforme est compromis depuis des mois, et il y a eu l’abandon fin septembre du mariage entre TF1 et M6, à qui France Télévisions devait revendre sa part pour boucler son budget. Le 20 janvier, le groupe public avait acté son désengagement de la plateforme lors d’un comité social économique (CSE) central extraordinaire.
Stratégie confuse
Avant cela, le site d’investigation L’Informé avait révélé que seule une société espagnole, Agile, était candidate à une reprise de Salto dans sa globalité. Salto employait mi-janvier 42 personnes en CDI et 8 en CDD, pour un nombre d’abonnés estimé à environ 800 000. L’abonnement coûtait 7,99 euros par mois (ou 5,80 pour un abonnement pris sur un an).
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Si la disparition de la plateforme se confirme, ses salariés pourraient retrouver des postes dans les entreprises actionnaires, dont certains d’entre eux étaient d’ailleurs issus. Au-delà de l’échec de la fusion TF1/M6, Salto a pâti d’une stratégie confuse et de multiples obstacles, dans un marché dominé par les géants américains comme Netflix, Disney+ ou Amazon Prime Video.
Côté catalogue, la plateforme censée promouvoir le “rayonnement de la création audiovisuelle française et européenne” s’était distinguée par quelques jolies exclusivités venues tout droit… d’Amérique, avec notamment l’émission Friends : Les Retrouvailles ou la suite de Sex and the City. Elle proposait aussi beaucoup de rediffusions ou avant-premières de programmes produits par ses actionnaires, comme les feuilletons quotidiens de TF1 (Ici tout commence, Demain nous appartient) et France 2 (Un si grand soleil).
Retard
Mais TF1, M6 et France Télévisions ont parallèlement développé leurs propres plateformes en ligne, qui ont concurrencé Salto en proposant gratuitement certains de ses programmes et en offrant de plus en plus d’avant-premières en ligne. De même, TF1 et M6 ont chacune lancé un service de streaming sur abonnement payant sans publicité, pour 2,99 euros par mois la première année, puis 3,99 euros par mois, soit un abonnement moins cher que Salto.
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Cette dernière a en outre souffert d’un retard à l’allumage : annoncé en 2018, il aura fallu plus d’un an pour que ce projet inédit réunissant chaînes privées et service public reçoive le feu vert de l’Autorité de la concurrence, le dossier étant passé entre les mains des autorités européennes. Le lancement, prévu au premier trimestre 2020, avait été repoussé à l’automne, donc après la montée en puissance de Netflix et l’arrivée de Disney+ pendant le confinement.
Les contraintes imposées aux actionnaires par l’Autorité de la concurrence, notamment en matière d’approvisionnement, ont représenté un “parcours du combattant”, assurait il y a deux ans Nicolas de Tavernost devant le Sénat. “On fait tout pour que cela ne marche pas”, avait-il lancé. Enfin, Salto pouvait difficilement rivaliser sur le plan des financements, avec 135 millions d’euros investis par ses actionnaires, loin des milliards déboursés par Netflix et consorts.