rad cartier, rappeur à la vision nocturne, nous parle de sa musique et de son premier projet long

Publié le par Simon Dangien,

© Youtube – CARTIER ROUGE – rad cartier

L’amour, les collab', sa famille, les clips… Un entretien complet au Soho House à Paris où rad cartier revient en toute transparence sur ce qui se cache derrière Vision Nocturne.

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17 h 30, devant le Soho House, Paris.

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Le Soho House, c’est là que rad cartier et son équipe m’ont donné rendez-vous, quelques heures seulement avant que l’artiste, orléanais d’origine et maintenant installé dans la capitale, fête la sortie de son premier long projet. Un 13 titres intitulé VISION NOCTURNE sorti le 30 juin et qui ne quitte pas mes oreilles depuis quelques semaines. Je n’ai jamais mis les pieds dans cet endroit, situé dans le 9e arrondissement de Paris, mais quand je pénètre à l’intérieur, je comprends tout de suite que c’est le lieu parfait pour une release party de rad cartier. L’ambiance, le décor, ce côté huppé, bref, tout y est.

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Je profite de l’attente pour me rendre au sous-sol, où se déroulera le concert. Un petit écrin calfeutré dans un velours rouge délicat. Un plafond étrange, un bar haut de gamme situé juste en face d’une petite mais charmante scène qui accueillera ce soir rad et son fameux micro personnalisé. Tiens, c’est d’ailleurs le moment que le rappeur et son équipe choisissent pour entrer à leur tour dans l’endroit. La barbe et les sourcils toujours aussi rouge écarlate, un air décontracté et un franc (jeu) sourire serti d’un big grillz, rad cartier est bien là. On décide de remonter du sous-sol pour réaliser l’entretien au grand air sur la terrasse, protégés par les 4 épais murs du Soho House.

Konbini ⎮ Salut rad cartier, avant toute chose, est-ce que tu peux nous expliquer où on se trouve ?

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rad cartier ⎮ Bien sûr, alors là actuellement on est au Soho House, grand lieu international. On se trouve dans sa branche française à Paris, c’est cosy. On est là pour la release party de mon dernier projet qui s’appelle VISION NOCTURNE et on va fêter ça ce soir, en mode Family & Friends.

Pourquoi avoir choisi ce lieu ? Personnellement, je trouve qu’il reflète très bien ton image.

Totalement, le lieu est cosy, un peu à mon image comme tu dis. Je suis déjà venu ici deux, trois fois, j’ai déjà fait quelques lives et j’avais kiffé l’ambiance un peu américaine, ambiance posée. C’est vraiment beau, je pensais à faire un truc ici et la sortie de mon premier long projet c’était l’occasion parfaite quoi !

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“Avec VISION NOCTURNE, c’est beaucoup plus travaillé, on peut vraiment ressentir ma patte et tous les univers que j’exploite.”

T’es sur le point de faire la release party de ce premier projet long. Tu le teases depuis plusieurs mois, il se passe quoi dans ta tête en ce moment ?

Ça m’enlève un certain poids des épaules parce que ça fait quelques années que je bosse dessus et du coup c’est comme un accomplissement quoi, un soulagement aussi et une fierté. Pouvoir dire que je sors mon premier long, ça prouve qu’on est sérieux et à fond de ce “merdier” on va dire. J’avais déjà sorti une compilation qui s’appelle VT ZOOM et qu’on pouvait voir comme un long format aussi mais c’était plus un regroupement, une compil’ de plusieurs singles. Avec VISION NOCTURNE, c’est beaucoup plus travaillé, on peut vraiment ressentir ma patte et tous les univers que j’exploite.

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Et justement, d’arriver sur la fin d’un cycle, est-ce qu’y a pas cette peur de l’après, le sentiment de la page blanche ?

Je comprends, mais tu sais, quand je bosse sur un projet, j’ai toujours des vues sur celui d’après parce que ça colle bien avec l’histoire que je veux raconter en général, et donc j’ai pas trop cette peur que tu décris, j’essaye de pas y penser et je pense que c’est mieux comme ça (rire).

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Tu disais plus tôt que ça fait quelques années que tu travailles sur VISION NOCTURNE, tu peux être plus précis ?

Pour cet album, j’ai mis deux ans à peu près. Je prends mon temps pour bosser mes projets, j’ai pris les escaliers si tu vois ce que je veux dire. Je veux faire les choses bien et voir vraiment sur le long terme, sans brûler les étapes. Et, mine de rien, j’ai toujours des singles qui sortent tout au long de l’année donc, entre guillemets, on est un peu tout le temps présent. Même avant de dévoiler l’album, on avait presque deux sorties par mois, que ce soit en featuring ou solo, je suis toujours là et je pense que c’est important. On est nombreux à être dans ce métier et il faut être régulier.

D’ailleurs, la définition de projet long est en train d’évoluer, tu penses que t’es arrivé au format d’album parfait ?

L’album parfait, je ne dirais pas ça ! Mais c’est un 13 titres qui dure 30 minutes, je trouve que c’est bien parce que c’est vrai que de nos jours quand tu as des albums avec 25 sons, les gens n’écoutent pas forcément tout. La musique de nos jours se consomme de plus en plus vite, il faut savoir envoyer les bonnes bastos, bien calibrées.

Donc, un album de 25 morceaux de rad cartier, c’est mort ?

Ah, on sait jamais ça (rire) !

Dans ce projet comme dans tout le reste de ta biographie, il y a un rapport à l’image qui est omniprésent, tu es aussi implanté dans le monde de la mode qui est une vraie passion pour toi (d’où le blase “rad cartier”). Toute cette vision-là, comment tu l’as retranscrite dans VISION NOCTURNE ?

Je travaille avec WWWESH STUDIO depuis le début, c’est eux qui font toute ma direction artistique. Pour la cover du précédent projet, on avait bossé avec Marine Serre qui nous avait habillés, et pour le nouveau projet on a du Diesel et des jeunes créateurs comme Rio Leone. J’aime beaucoup la mode et c’est important pour moi que, dans les visuels, on capte l’identité vestimentaire que je veux ramener. J’ai une ligne directrice clairement établie, je connais le nom des projets que je vais sortir depuis que j’ai commencé à envoyer des sons et pour le moment tout se passe comme prévu.

Par moments, est-ce que justement tu te sens pas parfois bridé par cette vision sur le long terme ?

En vrai, je ne suis pas bridé par rapport à ça parce que j’ai pas encore concrétisé tout ce que je voulais faire donc peut-être que quand ce sera le cas j’aurais une mise à jour un peu. Mais en attendant non, tant que j’ai pas accompli ce que j’ai envie d’accomplir, je reste sur mon chemin.

“On a capté que les clips étaient beaucoup moins regardés qu’avant.”

Avant de dévoiler ce projet, tu as sorti 5 singles dont 4 clips et 1 lyric video, c’est quand même conséquent et ça se comprend par ton rapport à l’image, mais tu penses quoi de ceux qui affirment que les clips sont amenés à disparaître ?

Je suis d’accord avec ça, on en parle beaucoup avec des collègues qui sont dans le milieu également, on a capté que les clips étaient beaucoup moins regardés qu’avant. Je pense que c’est du fait du nombre d’acteurs dans le milieu qui ne fait que grandir. Il y a beaucoup plus de clips à voir et ça fatigue les gens au bout d’un moment. Pour contrer ça, faut toujours évoluer, voir aussi d’autres créations de contenus avec des courtes vidéos sur les réseaux sociaux qui peuvent être plus suivies que les clips sur YouTube. Mais attention, les clips c’est important, il faut juste bien les pousser pour que ça prenne un maximum.

Justement, on va parler d’un clip très spécial, celui de “NOCTUZOOK” en feat avec Vacra, l’idée elle part de quoi ?

L’idée, c’est Roso, la réalisatrice du clip qui est fan de Michel Ocelot, le réalisateur de Kirikou, Azur et Asmar et d’autres films d’animations. Du coup, elle nous a proposé de s’en inspirer pour le clip de “NOCTUZOOK” et avec l’équipe on trouvait que ça collait bien avec la chaleur du son et je crois que c’est mon plus beau clip ! C’est un visuel qui a marqué pleins de gens et ça fait énormément plaisir d’avoir pu faire un tel produit.

Tu as parlé de ton précédent projet, VISION THERMIQUE, en expliquant que la vision thermique c’est quand tu sens si la personne devant toi est bien ou pas. C’est une question de sensibilité, de ressentir les énergies et les auras des gens autour de soi. Mais qu’en est-il pour VISION NOCTURNE ?

En fait, VISION NOCTURNE c’est le diptyque du projet précédent. Je suis cru, je vois que t’es comme ça et je te le dis, c’est plus poussé et c’est le côté obscur de VISION THERMIQUE, on va dire. J’essaye d’aller encore plus loin, dans ce projet-là tu peux découvrir des sons un peu plus dansants, tu peux capter toute la palette musicale et les sonorités que j’aime bien exploiter.

Dans cet album on retrouve aussi beaucoup ce monde de la nuit, de la fête, de la danse avec des sons plus dansants justement, tu peux nous parler de cette envie-là ?

J’ai toujours kiffé ça, depuis petit j’ai ma famille, ma daronne, aux mariages ça dansait jusqu’au matin et depuis que j’ai 18 ans, je suis quelqu’un de très attaché à ma liberté, du coup j’aime bien sortir, rider, rencontrer des gens. Je trouve ça grave enrichissant et ça fait partie de mon moteur, en vrai c’est mon essence numéro 1.

Tu parles de ta famille, t’as commencé le rap en voyant tes deux grands frères en faire, c’est un moteur encore aujourd’hui ?

Maintenant, ils ont vu ce qui se passait, ils sont à fond derrière moi. Ils m’ont mis dans le bain très très jeune, je voulais commencer à faire des prods ou des photos pour eux parce que les deux rappaient déjà. À l’époque, je me disais “bon, on va pas se mettre à trois à rapper” et, au final j’ai pris ce chemin-là malgré tout et c’est un moteur, carrément. Comme je leur ai toujours dit, pour moi, c’est eux les deux plus forts et si tu mélanges Demdy et Bast, ça fait le p’tit reuf, rad cartier. Demdy va sortir un projet bientôt. La musique on aime trop ça, c’est une histoire de famille.

“J’ai l’impression que toute une vie, ce n’est pas assez long pour pouvoir tout savoir au sujet de l’amour.”

Dans ce projet, comme dans toute ta discographie, il y a beaucoup d’amour. Tu parles de relations, qui peuvent parfois être complexes, t’aimes toujours autant parler d’amour qu’avant ? Comment l’amour que tu racontes dans ce projet est différent des précédents ?

Ouais en vrai c’est un truc qui va jamais me lâcher, je crois. L’amour, c’est la vie, si on est sur terre c’est pour kiffer, prendre du bon temps et être amoureux. C’est comme ça que je vois les choses. C’est très inspirant, je trouve. Et ce qui est beau, c’est qu’avec le temps tu deviens plus mûr et du coup tu tournes tes phrases autrement, tu captes des choses différentes. Ça ne fait que s’élever et j’ai l’impression que toute une vie, ce n’est pas assez long pour pouvoir tout savoir au sujet de l’amour. Même dans les sons que je bosse aujourd’hui, ça a pris une autre tournure encore.

On retrouve plusieurs collaborations dans VISION NOCTURNE dont celle avec Jwles sur “Hyperpop” et celle avec Slimka, Squidji et Benjay “Club cartier”, comment ces morceaux sont arrivés sur le projet ?

Concernant le son avec Jwles, c’est le sang hein ! C’est un collègue depuis plusieurs années maintenant, c’est le premier gars avec qui j’ai connecté sur Paris quand j’ai commencé à faire du son en arrivant d’Orléans. On avait déjà fait quelques sons ensemble mais pas que tous les deux, “HYPERPOP” c’est notre premier vrai feat. Du coup, on est parti chez le producteur Blasé parce qu’à chaque fois qu’on veut faire un truc qui tabasse, on va chez lui, et on a créé ça. Y avait une vraie alchimie, on écrivait le track à deux carrément.

Pour “CLUB CARTIER”, c’est un track assez récent qu’on a fait en 2023. Squidji était en studio avec Slimka et il m’a dit “vas-y pull up pull up” donc j’y suis allé et Benjay a commencé à faire une boucle et après on était dedans à fond, là aussi ça coulait de source, l’alchimie entre nous 4 était clairement là.

Il y a d’autres collaborations à prévoir par la suite ?

Je suis sur un projet commun avec mon frérot DOR qu’on va commencer à bosser et sinon on travaille aussi avec Brodinski (producteur de l’introduction de VISION NOCTURNE “MAGNETO”) sur pas mal de singles.

Il y a aussi tout une équipe derrière ce projet, est-ce que ça te dit de nous les présenter rapidement ?

Carrément, Ligne Bleue Records, le label indépendant avec qui on roule depuis le début, big S/O à mon chef de projet, toute la DA bien sûr réalisée par WWWESH STUDIO, mon styliste aussi Helvetico qui est très fort et qui nous dégote des pièces uniques à chaque fois. Je pense bien sûr aussi à tous les réalisateurs, producteurs, ingés son derrière le projet. C’est vraiment une grosse équipe et j’aurais jamais pu faire tout ça seul, c’est grâce à nous tous.

“Pour la suite, on va essayer de bosser aussi sur des sons un peu plus techno, laisser de la place à la production, ça verra le jour bientôt.”

Tu as parlé des producteurs, tu as travaillé avec certains qu’on ne retrouve pas, pour la plupart, dans VISION THERMIQUE, ça t’a permis de voir plus loin, d’explorer d’autres musicalités ?

Totalement, j’aime beaucoup explorer dans la musique, et bosser avec des gars comme Sutus qui a produit “CARTIER ROUGE” et “STRSSS”, ça change des sons que je fais habituellement et c’est grave cool. Avec Roi Luis aussi, c’est lui qui a produit notamment le titre avec Vacra. On a travaillé une prod “Compas” qu’on a fait à notre sauce. Pour la suite, on va essayer de bosser aussi sur des sons un peu plus techno, laisser de la place à la production, ça verra le jour bientôt.

Après cette soirée, comment tu comptes défendre le projet et comment tu vois la suite ?

Il s’est passé plein de choses au moment de la sortie du projet avec l’affaire Nahel. C’est un événement qui nous a tous touchés et je n’avais pas trop la tête à la sortie de mon projet. Même si j’étais très fier, je pensais surtout à l’avenir de nous citoyens, l’avenir du pays, il faut que ces crimes soient punis. Forcément ça a impacté la sortie mais il y a des choses qui sont plus importantes et sur lesquelles il faut prendre la parole. Malgré tout, on va continuer de défendre VISION NOCTURNE sur tous les shows qu’on a encore. Je fais confiance au temps, ma musique est intemporelle, donc c’est des sons qui vieillissent très bien et la suite arrive vite même si je ne peux rien dévoiler, il faut garder de la surprise !