Trop longtemps, dans une industrie du cinéma qui ne semblait pas vouloir leur faire de place (du moins aux postes à responsabilité), les femmes se sont contentées d’un manque criant d’opportunités et d’une sous-représentation qui indifféraient la plupart. Le contexte actuel de prise de conscience du problème du sexisme empêche aujourd’hui de fermer les yeux sur une condition inacceptable.
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Au début de l’année, une étude du CNC (Centre national de la cinématographie) révélait que les rémunérations des femmes dans le cinéma demeuraient drastiquement inférieures à celles des hommes (- 42 % pour les réalisatrices et – 38 % pour les productrices). Et encore faut-il qu’elles accèdent aux postes convoités : il n’y a que 25 % de réalisatrices en France (une exception mondiale : aux États-Unis, cette part n’est que de 10 %), et celles-ci ne bénéficient que rarement de moyens à la hauteur de leurs ambitions (les budgets de leurs films sont en moyenne inférieurs d’un million d’euros à ceux des hommes). Une problématique que l’on retrouve également devant la caméra, où les actrices de plus de 50 ans ne tiennent que 6 % des rôles.
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Si les inégalités salariales font ainsi partie du paysage cinématographique, elles se voient aujourd’hui régulièrement dénoncées. Le Festival de Cannes, qui se tient actuellement, se veut d’ailleurs le fer de lance d’un changement nécessaire, que l’on espère irréversible.
Appel à l’égalité salariale
Samedi 12 mai, une montée des marches inédite s’est tenue au Palais des festivals : 82 femmes ont foulé le tapis rouge pour défendre l’égalité salariale. Ce chiffre correspond au nombre de cinéastes femmes dont le travail a été présenté à Cannes depuis la création du festival en 1946 (contre 1 688 hommes).
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Cette année, elles ne sont que trois dans la sélection officielle (la Française Eva Husson pour Les Filles du soleil, l’Italienne
Alice Rohrwacher pour Heureux comme Lazzaro et la Libanaise Nadine Labaki avec Capharnaüm), pour 21 films sélectionnés. Une situation peu surprenante, quand on sait que la Palme d’or n’a été décernée qu’à une seule réalisatrice depuis 1946 : il s’agit de Jane Campion pour La Leçon de piano, en 1993 (un prix qu’elle avait dû partager avec le réalisateur chinois Chen Kaige, récompensé pour Adieu ma concubine).
La faute au Festival ? Pas vraiment. Ce serait plutôt celle d’un septième art historiquement inégalitaire, qui peine à réduire des écarts bien ancrés – mais qui, heureusement, n’a pas plus vraiment le choix aujourd’hui.
Guidées par la présidente du jury de cette 71e édition, la talentueuse Cate Blanchett, et ses autres membres féminins (en majorité cette année), les actrices, réalisatrices et productrices présentes sur la Croisette ont ainsi demandé samedi à ce que “toutes les marches de l’industrie” leur soient enfin accessibles. Accompagnée d’Agnès Varda, l’actrice australienne a appelé à l’égalité salariale :
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“Nous mettons au défi nos gouvernements et nos pouvoirs publics pour appliquer les lois sur l’égalité salariale.[…] Nous mettons au défi nos institutions pour organiser activement la parité et la transparence dans les instances de décision. […] Nous demandons l’équité et la réelle diversité dans nos environnements professionnels.”
Une charte pour défendre la parité
Il n’aura fallu que quelques jours au Festival de Cannes pour réagir à cette montée des marches 100 % féminine : le lundi 14 mai, il est devenu le premier signataire (avec la Quinzaine des réalisateurs et la Semaine de la critique, ses sections parallèles) d’une charte prônant la parité femmes-hommes dans les festivals de cinéma.
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Porté par l’association 5050 pour 2020, ce document sera proposé à l’ensemble des manifestations internationales célébrant le septième art. Il prévoit notamment de “rendre transparente la liste des membres des comités de sélection et programmateurs”, afin d’écarter toute suspicion de manque de diversité et de parité.
Le texte propose également à ses signataires de “genrer” les statistiques pour les films sélectionnés, “afin d’accompagner le mouvement avec des données certaines”, ainsi que de mettre en place un “calendrier de transformation des instances dirigeantes des festivals pour parvenir à la parfaite parité” (sans instaurer pour autant des quotas).
Cette charte pour la parité femmes-hommes dans les festivals, la première du genre, espère mettre progressivement les femmes au centre des prises de décisions et, à terme, au même niveau que leurs confrères.
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Il y a six mois, l’affaire Weinstein libérait la parole de milliers de femmes au sujet du sexisme sous toutes ses formes. Leurs voix, de plus en plus fortes et nombreuses, ont désormais été entendues. Espérons qu’elles résonnent encore longtemps.