Publicité mensongère et IA : les studios A24 sous le feu des critiques pour leur nouvelle campagne promotionnelle de Civil War

Publié le par Manon Marcillat,

(© A24)

Alors que les scénaristes et les acteurs viennent de mettre fin à une longue grève pour se protéger des IA, des dérives inquiétantes viennent émailler différents studios.

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Dans son nouveau long-métrage, Alex Garland (Annihilation, Men, Ex machina) imagine une guerre civile qui ravage les États-Unis, vue à travers les yeux et l’objectif d’une équipe de photoreporters qui la documentent. Sorti le 12 avril dernier dans le pays et malgré des critiques mitigées sur le message du film, Civil War a enregistré un box-office record pour son premier week-end d’exploitation avec 25 millions de dollars de recettes, le meilleur démarrage de l’histoire d’A24, le studio indépendant derrière de nombreux succès publics et critiques.

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Non content de ces excellents résultats, A24 a voulu surfer sur ce beau succès pour relancer la machine en dévoilant une nouvelle série d’affiches apocalyptiques sur les réseaux sociaux, qui ont également servi de supports physiques pour certaines campagnes d’affichage, selon The Hollywood Reporter. Sur ces visuels, on peut voir la célèbre sphère de Las Vegas détruite au milieu d’une ville en cendres, des militaires à bord de bateaux pneumatiques en périphérie de Los Angeles, New York envahie par des tanks, les rues de Miami ravagées, des réfugiés à bord de bateaux touristiques sur la Chicago River et une épave assiégée près de San Francisco.

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Dans les commentaires de la publication Instagram, des internautes, très mécontents, ont relevé deux problèmes majeurs dans cette campagne : non seulement aucune des scènes présentées sur ces affiches n’apparaît dans le film, ce qui présente donc une forme de publicité mensongère, et surtout, tous ces visuels semblent avoir été entièrement générés par l’intelligence artificielle.

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“Je suis vraiment dégoûtée par cette campagne”, “L’art par l’intelligence artificielle, c’est du vol et c’est esthétiquement immonde. Virez la personne qui a validé cette horreur. C’est répugnant et insultant envers votre audience”, “A24 qui utilise l’IA pour sa promotion pourrait bien être un signe. Peut-être que c’est le début de la fin d’une société qui a autrefois valorisé l’esthétique indé. C’est incroyablement décevant”, “Pour un studio qui semblait valoriser les artistes, utiliser des visuels générés par IA pour faire de la publicité est un vrai gâchis”, “ON NE VEUT PAS DE ÇA. Votre équipe marketing est vraiment stupide pour avoir pensé que c’est acceptable. On se bat pour que la boîte de Pandore ne soit pas ouverte avec ce genre de conneries et vous ignorez volontairement les craintes collectives à ce sujet. Une honte”, se désolent les internautes.

Outre les problématiques éthiques soulevées par ce parti pris très discutable pour un studio indépendant, synonyme d’un cinéma d’auteur en voie de disparition aux États-Unis, de grossières erreurs, que l’œil humain aurait évitées, apparaissent également sur cette série d’affiches, comme un cygne disproportionné ou une voiture à trois portes. Ironie du sort, le film d’Alex Garland Ex machina porte justement sur les dangers et les dérives des IA.

Une source proche des studios a déclaré à The Hollywood Reporter que ces images avaient été conçues pour nous aider à imaginer l’impact de cette guerre civile à l’échelle nationale. “Ce sont des images générées par les IA mais inspirées par le film qui est un immense ‘et si’. On a donc voulu poursuivre ce questionnement sur les réseaux sociaux avec une imagerie puissante de ces paysages iconiques et ce réalisme dystopique”, a justifié cette même source.

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Dérives inquiétantes

Si A24 est actuellement sous le feu des critiques, d’autres studios avant lui ont eu un recours jugé abusif à l’IA ; c’est d’autant plus inquiétant que les scénaristes et les acteurs de Hollywood viennent de mettre fin à une longue grève pour protéger leur profession des dérives de l’intelligence artificielle.

Dans What Jennifer Did, son documentaire façon true crime, Netflix aurait également utilisé des images générées grâce aux intelligences artificielles pour représenter Jennifer Pan, la protagoniste, avant son arrestation, alors qu’elle était une jeune fille “pétillante, heureuse, assurée et authentique”. Les proportions de Jennifer sur ces images soi-disant d’archives ne sont pas réalistes et des objets de l’arrière-plan ne font pas sens.

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Cette utilisation, qui n’est à aucun moment signifiée par Netflix en crédits, est d’autant plus grave qu’il ne s’agit pas ici de supports promotionnels et donc “seulement” de publicités mensongères mais bien d’une œuvre documentaire censée rapporter des faits objectifs et véridiques, ce qui s’apparente donc à une forme de manipulation du spectateur. Mais pour l’heure, les cinéphiles et les abonnés semblent encore vigilants quant à ces dérives qu’ils jugent inacceptables.