Il y a un je-ne-sais-quoi que les British captent plus vite que les autres dans le tailoring (ou l’art de porter le costume, dans la langue de Molière). Venant de la ville du complet trois pièces et des bonnes manières, ceci n’a rien d’étonnant. À l’instar du succès florissant de la jeune Bianca Saunders qui se taille rapidement mais sûrement une place parmi les plus grand·e·s. Lauréate de l’Andam 2021 (comme Martin Margiela, Jeremy Scott ou Anthony Vaccarello avant elle), l’ex-étudiante du Royal College of Art de Londres présentait ce mercredi 18 janvier son troisième défilé pour la Fashion Week parisienne. Le rendez-vous des quelques privilégié·e·s de cette semaine de la mode était donné au Consulat, ce lieu hybride et trendy du 11e arrondissement qui, passé 10 heures, s’est peu à peu rempli de gens bien fringués et parlant anglais, qu’ils aient grandi en Picardie ou dans le même quartier londonien que la créatrice.
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C’était pour certain·e·s l’heure des retrouvailles à coups de “hi” exagérément courtois, et pour d’autres le moment de poser devant le décor du défilé, une maison de famille tirée des années 1960 avec un joli bar et un vieux tourne-disque. Le tout sur du reggae et surtout “Baltimore” de Nina Simone. Presque une coutume pour la créatrice anglo-jamaïcaine qui, chaque saison, modernise avec brio son héritage culturel. Un clin d’œil qu’on retrouve explicitement dans cette collection avec des images abstraites tirées de la sitcom Oliver at Large d’Oliver Samuels, le “King of Comedy” de la Jamaïque.
Fluidité et délicatesse
Les premières silhouettes ne s’élancent pas tout de suite entre les deux front rows mais prennent le temps de se fondre dans le décor. Ainsi, le public assoiffé de nouveauté peut contempler cette nouvelle ligne. Et c’est donc – et toujours – avec ce minimalisme complexe, cette délicate féminité, ces trompe-l’œil, ces coupes fluides et cette impression de full confort que Bianca Saunders dévoile sa vision de l’homme 2023.
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Cela sans jamais s’éloigner de ses deux marques de fabrique : l’impression d’avoir un tissu en mouvement et la proposition de pièces qui semblent non genrées (slay). Comme elle le confiait à GQ : “Je crée des vêtements pour hommes mais je veux quand même pouvoir les porter moi-même.” Alors, quoi de mieux pour jouer sur l’ambivalence des genres que le costume, fleuron des défilés depuis des années, qu’elle s’est amusée à revisiter pour cette collection bien justement nommée “Playwork” ? Parce qu’après tout, c’est bien ce qui nous fait vibrer dans la mode : voir de jeunes talents se réapproprier les codes d’antan.
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