De la comédie aux chansons, du monde des affaires à la nuit parisienne, Régine était une artiste extraordinaire qui semblait ne pas vouloir vivre qu’une seule fois. Décédée ce dimanche 1er mai à l’âge de 92 ans, la chanteuse était une référence incontestée, qui n’a jamais laissé le temps la dépasser.
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Régnant sur le monde avec ses multiples boîtes de nuit, Régine a réussi à charmer les plus grands. De Charles Aznavour à Serge Gainsbourg, qui lui écrira “Les Petits Papiers”, “la dernière représentante de la chanson française”, comme le disait Renaud, a fait de sa vie une fête éternelle. À l’occasion de sa disparition, on vous raconte l’histoire fabuleuse de cette reine de la nuit.
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Les nuits parisiennes
Née le 26 décembre 1929 à Anderlecht en Belgique dans une famille juive polonaise, Régina Zylberberg arrive à Paris quelques années plus tard. Sa jeunesse se voit vite ternie par la Seconde Guerre mondiale. Parcourant la France afin d’échapper à la déportation, c’est à Aix-en-Provence que Régine trouve refuge et qu’elle découvre sa passion pour le chant.
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À la Libération, son père ouvre un café à Belleville et lui demande de s’en occuper. Les bals américains, le jazz, le bebop et les danses de l’époque lui font découvrir la fête parisienne. C’est seulement quelque temps après que Régine trouve sa vocation : animer les meilleures soirées de la ville.
Sans boire une goutte d’alcool, la jeune femme met l’ambiance dans les plus grands clubs parisiens avec ses danses excentriques et son humour décalé. Dans les années 1950, un ami lui confie l’animation du Whisky à gogo, un bar rue Beaujolais où elle rencontre le jeune Serge Gainsbourg.
Sa notoriété s’élève petit à petit jusqu’à l’ouverture de sa première boîte de nuit, Chez Régine, dans le quartier latin. De Françoise Sagan à Brigitte Bardot en passant par Georges Pompidou, les plus grands y passent.
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S’ensuit l’ouverture à Montparnasse du New Jimmy’s, où personne ne rentrait sans maîtriser le twist à la perfection, et d’établissements à New York et Monaco, au Brésil et en Malaisie. Régine, coiffée de son mulet aussi rouge que son boa, gérera au total une vingtaine de clubs fréquentés par Andy Warhol, les Rothschild ou encore les Kennedy. Le monde se met à surnommer cette business woman “la Grande Zoa” et “la reine de la nuit”.
Une carrière en chanson
Outre sa notoriété dans le monde nocturne et ses talents de comédienne au cinéma (Robert et Robert de Claude Lelouch, Les Ripoux de Claude Zidi), Régine découvre son attirance pour la chanson. Encouragée par Renée Lebas, elle interprète de nombreux titres écrits par les plus connus, comme Serge Gainsbourg, qui lui écrira dix-sept chansons dont “Les Bleus”, un morceau sur les violences faites aux femmes.
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Dans les années 1960, elle fait le tour des scènes du monde entier et devient l’une des rares Françaises avec Édith Piaf à conquérir les États-Unis avec sa voix. Après l’Olympia, c’est à New York au Carnegie Hall qu’elle s’impose comme une figure centrale de la chanson. De jour comme de nuit, Régine aura travaillé avec les stars les plus célèbres. Charles Aznavour, Henri Salvador, Patrick Modiano, Barbara… tous lui auront écrit des tubes emblématiques, illustrant parfaitement sa personnalité unique, aussi mélancolique que pleine d’humour.
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Elle confiait à l’AFP :
“Ma plus grande joie serait qu’on écoute encore mes chansons dans cinquante ans. […] Je suis très fière que certaines soient devenues des classiques de la variété. […] Mon premier métier, c’était les discothèques. Longtemps, la chanson n’a été qu’un passe-temps. Aujourd’hui, je me rends compte que la scène a été le plus important dans ma vie.”
Un règne éternel
Malgré la fermeture de son fameux club Chez Régine en 2009, la chanteuse aux multiples facettes a continué à vivre et à faire vivre par son éternel entrain. Toujours prête à faire de son environnement une fête permanente, Régine n’a cessé de dépasser le temps et les modes, tout en régnant sur le monde avec ses boîtes nuits et palaces portant son nom.
Engagée auprès des sans-papiers et fondatrice d’une association contre la drogue, “la reine” était appréciée de tous. À la tête d’une jeunesse dorée parisienne, Régine était encore enveloppée de son légendaire boa, à 86 ans, pour chanter en 2016 aux Folies Bergère “Je survivrai”, sa reprise du morceau de Gloria Gaynor.
En ayant fait danser pendant plus de trente ans le monde entier dans ses clubs ou avec ses refrains entraînants, Régine, avec ses multiples vies, aura interprété près de 250 chansons tout en s’imposant comme une redoutable femme d’affaires très respectée. Si la reine de la nuit s’est éteinte en partant avec sa boule à facettes, la fête continuera de battre son plein grâce à ses chansons.