Pourquoi il faut monter dans le train Doechii ?

Publié le par Yasmine Mady,

Avec Alligator Bites Never Heal, elle nous offre l’un des meilleurs projets rap de l’année.

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Doechii sait tout faire : elle rappe, elle chante, se joue des genres avec du R&B, de la house, du rock, de la soul, et surtout elle challenge les représentations avec une direction artistique avant-gardiste et disruptive. En quelques années, jusqu’ici, ça donne :

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2020 : elle casse l’Internet pour la première fois avec son titre explosif “Yucky Blucky Fruitcake”. Ce titre fait partie d’un EP intitulé Oh The Places You’ll Go qui est littéralement une manifestation de tout ce qui lui arrive aujourd’hui.

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2022 : elle signe chez TDE. Un label connu pour avoir accompagné Kendrick Lamar pendant près de deux décennies mais dans lequel on retrouve également ScHoolboy Q, SiR ou encore SZA. Moosa Tiffith, le président de TDE, dira alors d’elle : “On a confiance en sa vision infinie.” La même année, elle sortira le single “Persuasive”, un morceau teinté de house qui a connu un grand succès.

2024 : elle sort son premier long projet intitulé Alligator Bites Never Heal. C’est une mixtape de 19 titres, 47 minutes, et on ne jette absolument rien dedans.

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Et ce projet, Alligator Bites Never Heal, parlons-en. Pendant que j’écris cet article, je suis sur un live de Doechii alors qu’elle est dans un bus, en train d’appliquer un masque en soie sur son visage et de boire un ginger shot. Elle nous demande quelle est notre chanson préférée de son album pour la journée, avant de se reprendre : “Oups, je voulais dire mixtape, c’est quoi votre son préféré de la mixtape ?” Et là, ça a fait tilt : l’un des meilleurs projets rap de l’année sera certainement une mixtape, et la sienne. Un projet qui n’a rien à envier aux albums rap sortis cette année alors qu’elle n’est même pas à 30 %. Le live se poursuit, Doechii a une sorte de capuche blanche sur la tête, un viewer lui demande alors si elle est une “nonne”, ce à quoi Doechii répond : “Non, je suis une cunt.” Une icône dans mon livre. Au passage, la chanson de la journée est donc “DEATH ROLL”, elle a tranché, et je suis plutôt d’accord.

Dans la mixtape de Doechii, on retrouve plusieurs titres de sa série de freestyles intitulée “Swamp Session” qu’elle a déroulée tout au long de l’été, et notamment “CATFISH”, “BULLFROG” et “BOOM BAP”. C’est une série dans laquelle elle s’est imposé un chrono d’une heure pour écrire une chanson. Elle s’est également engagée à sortir la chanson peu importe le résultat et également à proposer des visuels qu’elle a sortis sur sa chaîne YouTube pour boucler la narrative. Elle explique dans une interview pour Paper que c’est un exercice qui l’accompagne depuis le début de sa carrière pour sortir de sa tête et s’ancrer dans le moment présent dans son processus de création et d’écriture.

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Alligator Bites Never Heal fait partie de ces rares projets qui giflent dès la première écoute. Pourtant, la recette est simple : Doechii revient aux fondamentaux du hip-hop avec une manière de poser et des sonorités plutôt traditionnelles, mais elle le fait avec une liberté et un progressisme complexe qu’elle orchestre avec une grande ingéniosité, et ça donne un petit bijou révolutionnaire et rafraîchissant qui fait du bien. Elle a révélé à Rolling Stone avoir décidé de sortir cette mixtape alors qu’elle sortait d’une sombre période dans sa vie et dans son art, et en effet, Alligator Bites Never Heal respire la renaissance et le déploiement. Le titre “BLOOM” témoigne notamment de cet état d’âme. Entre chanson et introspection, Doechii affirme sa beauté et sa floraison et sa volonté de continuer à chasser ses rêves et de tout donner pour surmonter ses déterminismes. Une intention émancipatrice qu’on retrouve aussi dans “DEATH ROLL” où elle décrit le fait de transcender la peur pour atteindre la version de soi que l’on souhaite réellement être : “I love the way my ideas flow when I’m not scared”.

Dans sa tournée promotionnelle autour de ce projet, Doechii se fait également remarquer avec des prises de parole très justes et une posture visuelle impactante et c’est un euphémisme. Pour la couverture du magazine Paper, elle a décidé d’incarner un homme qu’elle a introduit comme étant son nouvel alter ego appelé “Ricardo”. Elle explique dans l’interview que c’est une réponse aux commentaires qu’elle recevait qui la comparaient à un homme : “Puisqu’ils n’arrêtent pas de dire que je ressemble à un homme, donnons-leur un homme avec des tablettes de chocolat et une moustache.” Le résultat est sensationnel et vient ajouter des points à l’aura artistique de Doechii.

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