Pour raconter Gaza hors censure, 4 artistes palestiniens partagent 9 mois de captures d’écran Telegram

Publié le par Lise Lanot,

Via Against Abstraction

Un "portail ouvert sur la Palestine" qui vise à raconter la réalité des neuf derniers mois à travers les images de celles et ceux qui la subissent.

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Comment raconter Gaza, les bombardements, la famine, les violences physiques et psychologiques ? Comment raconter Gaza quand “l’endroit est inaccessible aux journalistes” (tel que le dénonce Liselotte Mas, journaliste au Monde), que les communications sont régulièrement coupées et que, au 25 juin 2024, Le Monde rapportait que “plus de 100 journalistes palestiniens ont été tués dans des bombardements à Gaza, y compris lorsqu’ils portaient des gilets presse identifiant leur profession” ? Face à l’interdiction d’informer et la difficulté de raconter, les artistes palestinien·ne·s Maen Hammad, Dina Salem, Sari Tarazi et Ahmad Alaqra présentent à Arles “Against Abstraction”, une exposition qui “partage une chronologie du génocide en cours à Gaza en utilisant des informations partagées par des plateformes de messagerie alternatives telles que Telegram”.

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“Against Abstraction” vise, comme son nom l’indique à donner forme à l’abstraction, aux non-dits, aux non-montrés. Les artistes interrogent “les thèmes de la marchandisation et l’effacement de la souffrance palestinienne et de la résistance” ainsi que la façon dont “les images venant de Palestine sont encadrées, interprétées et, plus important encore, consommées”.

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Capture d’écran du canal Telegram “رفح أون لاين” datée du 9 mai 2024. Traduction : “Images satellites prises mardi des intenses bombardements israéliens sur les quartiers résidentiels de l’Est de Rafah, et les localisations des véhicules israéliens à l’intersection et autour de ces zones résidentielles. Les carrés sont des véhicules israéliens.”

Les artistes ont choisi ces canaux de communication parce qu’ils sont utilisés par les Palestinien·ne·s afin de “créer des modes alternatifs de partage de l’information” et leur permettent de “présenter la réalité sans censure”. “À l’inverse de la couverture des médias institutionnels qui a œuvré à la fabrication d’un assentiment vis-à-vis du génocide israélien financé par les États-Unis, ces canaux Telegram ont leurs propres cycles informatifs et relaient une frise constante de violence coloniale et de résistance décoloniale.”

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Pour préparer leur exposition, les artistes ont utilisé “du code et des outils d’intelligence artificielle” : “Nous avons analysé des masses de données numériques afin d’identifier les mots utilisés les plus fréquemment sur ces canaux chaque jour depuis le 7 octobre. Correspondant à chacun de ces mots, nous avons sélectionné une image, une vidéo ou une note vocale de chacun des jours du génocide, jusqu’au 9 juin”, écrit Maen Hammad.

L’exposition, de courte durée, “ouvre un portail vers la Palestine” et vise à “confronter l’Ouest sur ses idées libérales, et son démasquage, révélé à travers son manque d’engagement politique et de solidarité avec des personnes colonisées”. Face à ces centaines d’images, de vidéos, d’audios et de mots qui racontent “l’annihilation du système de santé gazaoui”, les bombardements, la résistance et tout le reste, Maen Hammad, Dina Salem, Sari Tarazi et Ahmad Alaqra mettent le public face à ses responsabilités, de façon à pousser un sentiment de “rébellion collective au lieu de la réticence collective”.

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Capture d’écran du canal Telegram “Gaza Now – غزة الآن” datée du 12 décembre 2023. Traduction : “L’armée de l’occupation montre une nouvelle image de son arrestation de douzaines de civils à Gaza.”

L’exposition “Against Abstraction”, présentée par le studio DoubleDummy, est visible, en off des Rencontres de la photographie d’Arles, jusqu’au 7 juillet 2024. Des conférences sont organisées tous les jours jusqu’au 6 juillet à 11 heures ainsi que le 6 juillet à 17 heures.