Pour que l’odeur des vieux livres soit inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco

Publié le par Konbini,

L'importance de l'odeur des livres dans la mémoire collective olfactive est scientifiquement prouvée.

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En avril 2017, la revue Heritage Science publiait une étude sur l’importance culturelle des odeurs dites “historiques” et appelait à œuvrer pour leur conservation.

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Échantillon témoin : la bibliothèque de la Cathédrale Saint-Paul

Les auteurs avaient alors fondé leur analyse sur un panel de commentaires inscrits dans le Livre d’Or de la bibliothèque de théologie de la Cathédrale Saint-Paul à Londres qui, dans leur grande majorité, louaient l’odeur si particulière de cet endroit : “Nous avons aimé l’odeur et cette belle bibliothèque” (11/02/15), “Quel lieu incroyable ! Je peux respirer la connaissance” (09/03/15),“On peut sentir l’histoire, le parfum de l’héritage et la communion de nos âmes avec le passé” (04/11/15).

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Ils ont alors conclu que les odeurs ont une véritable signification culturelle puisqu’elles influent sur la perception que nous avons d’un lieu en y injectant de la valeur. De ce fait, elles devraient être considérées comme la propriété immatérielle d’un héritage matériel. Cependant, à l’inverse de certaines pratiques culinaires notamment, elles ne sont pas reconnues dans la définition de l’héritage culturel immatériel et aucune stratégie pour leur préservation n’est effective.

Proust approuve

Il est pourtant indéniable que de toutes les odeurs, celle des livres en est une qui procure beaucoup de plaisir. Respirer un livre, vieux ou neuf, deux écoles s’affrontent, est une véritable madeleine de Proust pour nombre d’entre nous.

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Pour étayer leur thèse sur l’importance de l’odeur des livres dans la mémoire collective olfactive, les auteurs de l’étude ont analysé les articles de parfumerie d’un magasin londonien. Résultat, ils ont recensé plus de 30 bougies, parfums et huiles aux senteurs de vieux livres ou de bibliothèques anciennes.

En juin 2012 déjà, Karl Lagerfel concevait un parfum nommé Paper Passion. Pour lui, “l’odeur d’un livre fraîchement imprimé est la meilleure odeur du monde”. Et depuis quelques années, les parfums et les bougies senteur “vieux livres” se multiplient un peu partout.

En réalité, l’odeur si particulière des livres provient simplement d’une dégradation chimique : “Le papier contient, entre autres composants chimiques, de la cellulose et de plus faibles quantités de lignine. Toutes deux proviennent du bois dont est issu le papier ; les papiers les plus beaux contiennent moins de lignine que, par exemple, le papier journal. Dans les arbres, la lignine aide à maintenir ensemble les fibres de cellulose, maintenant ainsi le bois raide ; elle est aussi responsable du jaunissement du papier avec le temps. L’oxydation la décompose en acides qui décomposent ensuite la cellulose.”

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Mais il est en vérité assez logique que l’odeur d’un livre soit tant recherchée, notamment chez ceux qui ont beaucoup lu quand ils étaient plus petits : “Les odeurs sont étroitement liées à la mémoire. Tout comme l’odeur d’une crème solaire ou de l’herbe fraîchement coupée peuvent soudainement vous rappeler des souvenirs d’enfance, pour les amoureux des livres, l’odeur des vieux manuscrits rappelle les souvenirs de lecture d’un vieux classique ou les moments passés à fouiller dans une bibliothèque ou dans une librairie”, analysait Quartz à ce sujet.

Les odeurs peuvent-elles vraiment être inscrites au patrimoine mondial de l’Unesco ?

Pour figurer sur la Liste du patrimoine mondial, les candidats doivent présenter une valeur universelle exceptionnelle et satisfaire au moins un des dix critères de sélection. Cette liste très sélective compte 845 biens culturels, 209 biens naturels et 38 biens mixtes. Les odeurs ne peuvent donc pas y figurer.

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Mais l’Unesco propose également une liste pour le patrimoine culturel immatériel, qui concerne les pratiques et expressions culturelles. Les candidats doivent remplir une des deux conditions : être considérés comme nécessitant des mesures de sauvegarde urgentes pour assurer leur transmission ou bien démontrer de la diversité du patrimoine immatériel et faire prendre davantage conscience de son importance.

Le 28 novembre dernier, les parfums de Grasse ont été officiellement inscrits sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’Humanité, l’Unesco reconnaissant “la culture de la plante à parfum, la connaissance des matières premières et leur transformation et l’art de composer le parfum” comme faisant partie du patrimoine culturel immatériel.

Et plus récemment, ce sont les bouquinistes des quais de Seine qui ont vu leur tradition et savoir-faire inscrits dans le patrimoine culturel immatériel. L’odeur des vieux livres a donc toutes ses chances.

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