Parce que le capitalisme nous tuera : soif de liberté et dérives, les “nouveaux nomades” photographiés par Timothy Eastman

Publié le par Lise Lanot,

© Timothy Eastman

Pendant trois ans, le photographe Timothy Eastman est allé à la rencontre des "workampers" des États-Unis.

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Timothy Eastman n’est pas un nomade dans l’âme. Ce n’est qu’en lisant le livre Nomadland de Jessica Bruder, qui a inspiré le film éponyme Oscar du Meilleur film en 2021, que le photographe a découvert “une Amérique qu’il ne connaissait pas”, un pays “composé de voyageur·se·s”, obligé·e·s de quitter leur mode de vie sédentaire après la crise des subprimes et parti·e·s vivre sur les routes à la recherche de missions de travail saisonnières.

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Entre 2017 et 2019, l’auteur est allé à la rencontre de “workampers” (mot-valise contractant “travailleurs” et “campeurs”) afin de les photographier et de recueillir leurs témoignages, loin d’une “couverture médiatique biaisée”. “La plupart insiste sur le fait que le workamping représente une opportunité plutôt qu’une contrainte”, décrit-il en ouverture de son livre photo All The Past We Leave Behind – America’s New Nomads (“Le passé qu’on laisse derrière soi – Les nouveaux nomades des États-Unis”).

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© Timothy Eastman

En parallèle de cette fierté affichée, le photographe rapporte des “attitudes très variées” des modèles concernant leur mode de vie : “Certain·e·s se présentaient comme des rebelles et des aventurier·ère·s, des gens qui avaient su contourner le système et trouver le moyen de vivre selon leurs propres conditions. D’autres voyaient cela comme une décision pragmatique qui réduit le stress et les dépenses. D’autres encore […] se demandaient s’ils vivaient une forme de sans-abrisme.”

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Les images de Timothy Eastman ont été prises dans les intérieurs des vans et camping-cars des personnes rencontrées, qui lui dévoilaient ainsi leur intimité. Les décos, les histoires, les habitudes se succèdent mais ne se ressemblent pas. Le photographe privilégie des portraits candides dans lesquels les modèles apparaissent l’air songeur, les yeux souvent plongés dans un horizon qui demeure hors-cadre. Ces images racontent les concessions, la solitude mais aussi la force de caractère de ces “nouveaux·elles nomades”.

En filigrane, c’est aussi un portrait des États-Unis – et du capitalisme – que dresse le photographe. On y découvre une soif de liberté déversée sur le terrain aride d’une économie harassante, où libre arbitre et concessions finissent par se mêler et se confondre, tout comme des valeurs conservatrices et progressistes, environnementales et libérales. Entre les quatre murs de petites maisons roulantes, c’est toute une société, ses paradoxes, ses rêves et ses douleurs, que Timothy Eastman a immortalisée.

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Le livre de Timothy Eastman All The Past We Leave Behind – America’s New Nomads est publié aux éditions Kehrer Verlag.