Bon, faut qu’on parle : si vous avez déjà lancé quoi que ce soit sur la scène de votre artiste préféré·e et qu’en plus vous justifiez ça par la “fanatitude” ou un amour inconditionnel pour votre idole, cet article vise à vous détruire. Depuis quelques jours, ce phénomène de “lancers d’objets” fait parler de lui suite à des vidéos qui tournent sur les réseaux et qui montrent des artistes se ramasser des choses diverses sur scène, parfois en pleine face, avec plus ou moins de dégâts.
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Dans les bons scénarios, il y a Pink qui reçoit une meule de brie à Londres (peu de temps après avoir récupéré des cendres humaines) ou encore Lil Nas X qui reçoit un généreux sextoy en Suède. Dans les mauvais, on retrouve surtout le genre d’événements auquel a été confrontée la chanteuse pop Bebe Rexha, qui s’est tout bonnement mangé un smartphone en pleine arcade sourcilière, lui valant des points de suture et un bon gros traumatisme pour ses prochaines montées sur scène.
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En l’espace de quelques semaines, d’autres incidents similaires sont survenus, avec notamment la chanteuse Kelsea Ballerini qui a été touchée au visage par un bracelet projeté depuis la foule ou même carrément une agression physique d’Ava Max par un fan sur scène. Mais comment on en est arrivés là ? D’où vient cette tradition totalement absurde ? Et pourquoi ça ne fait absolument pas de vous un·e vrai·e fan de lancer vos affaires sur votre star préférée ?
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Qui a lancé la première pierre ?
Cette manie ne date pas d’hier. Le média El País retrace sa toute première occurrence du phénomène à 1883, alors qu’un acteur du nom de John Ritchie s’est retrouvé attaqué par des tomates et des œufs pourris lors d’une représentation à New York.
Depuis, l’histoire de la musique a collectionné son lot d’anecdotes mémorables et absolument glauques en termes d’objets lancés sur scène : en 1969, un poulet vivant lancé sur la scène du rockeur Alice Cooper s’est vu dépecé par la foule dans un véritable bain de sang, tandis qu’en 1982, Ozzy Osbourne a décapité à la bouche une chauve-souris vivante lancée par le public, pensant qu’elle était en plastique. Oui, oui.
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La tradition n’est donc pas nouvelle, mais c’est l’une des premières fois qu’elle refait surface aussi publiquement, notamment au vu de la possibilité de relayer sur les réseaux ce type d’événements, générant incompréhension et révolte au sein même des communautés de fans.
Pourquoi ça revient ?
Fort heureusement, ce n’est plus tellement les animaux en vie que l’on retrouve envoyés sur scène aujourd’hui, mais d’autres trésors en tous genres, dont certains plus dangereux qu’on ne le pense. Harry Styles, grand habitué des cadeaux non sollicités, recevait déjà des tampons au visage à l’époque de One Direction, et ses dates solo sont aujourd’hui ponctuées de lancers de cadeaux passionnés, dont un qui n’a pas épargné son entrejambe, sans pour autant déstabiliser le showman.
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Des moments comme celui-là peuvent facilement devenir viraux sur les réseaux sociaux, d’où l’envie pour les spectateur·rice·s d’en générer un, ce qui expliquerait la résurgence du phénomène. En provoquant le chamboulement d’un show, la personne à l’origine de ce geste totalement débile se sent partie intégrante du spectacle, en lien direct avec son idole et en supériorité par rapport aux autres membres du public, comme le rapporte Paul Booth, professeur de médias et de culture populaire à l’université DePaul, dans une interview pour le média Salon :
“En particulier lors des spectacles live, les fans veulent se faire remarquer et peuvent tout faire pour que ce soit le cas. Et plus certains le font, plus les autres fans vont surenchérir pour se faire voir également. Pour moi, il s’agit surtout d’une question de ‘Je veux que vous me remarquiez, je veux être vu’.”
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Pourquoi il faut qu’on se calme
Même si la plupart sont absolument inoffensifs, à l’image des peluches, culottes et soutiens-gorge qui restent (heureusement) les objets les plus communs à être projetés sur scène, il faut que ça cesse, pour la simple et bonne raison que sous le coup de la pression, de l’exposition et de la vue obstruée par les éclairages, le lancer de la plus innocente des peluches peut donner l’impression d’être en fait assailli·e par une arme blanche, ou pire – l’imaginaire étant alimenté par les dingueries qu’on entend aux quatre coins du monde.
Au-delà de la douleur occasionnée, c’est surtout la peur et le choc qui poussent les artistes à s’exprimer sur la problématique, conjurant les fans d’arrêter sur le champ de leur larguer leurs effets personnels en plein show. Que ce soient Kid Cudi, Adele, Charlie Puth ou Kelly Clarkson, les artistes anglophones se sont largement exprimés sur le sujet.
Lors d’un de ses récents shows à Las Vegas, Adele a même menacé (avec humour, mais pas trop) quiconque oserait l’attaquer avec un objet de l’exécuter sur-le-champ. En 2022, Tyler, The Creator confrontait directement un spectateur du public en stoppant son show pour rappeler qu’il n’y avait rien de glorieux dans le fait de lancer des affaires sur scène, avant de tweeter : “Arrêtez de jeter votre merde sur scène, je n’en veux pas, au milieu du spectacle je dois tout déplacer, quelle est la p*tain de logique derrière ça ? Arrêtez, merci.”
Le meilleur conseil à donner aux fans dont l’envie de jeter leurs affaires sur leur pop star préférée serait plus forte que tout, ce serait de changer de stratégie. Si c’est vraiment par souci d’attirer l’attention, il ne faut pas forcément envahir l’espace direct des artistes pour se faire remarquer. Si vous voulez mettre toutes les chances de votre côté, misez plutôt sur une pancarte bien golri, en prenant soin de ne pas la brandir pendant tout le concert au risque de vous faire détester par le public derrière vous. Mais par pitié, gardez votre téléphone, vos poulets vivants, vos tampons, vos sextoys et les cendres de votre daronne dans vos poches, sinon vous aurez affaire à nous.