Eoin Carey est devenu père à 30 ans, “de façon inattendue”, nous confie-t-il. Père célibataire dès la naissance de son enfant, le photographe se souvient d’une expérience particulièrement “intense et difficile”. Un peu dépassé par les événements et n’ayant “ni assez d’énergie ni de main libre pour tenir un appareil photo”, il n’a pas immortalisé “toutes les petites choses aussi belles que stressantes” qui composaient les débuts de sa vie avec sa fille.
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Remarquant à quel point “une grosse partie de la parentalité n’est pas documentée”, il a décidé de “faire pour les autres” ce qu’il n’avait pas pu faire pour lui-même : “J’ai demandé à d’autres pères si je pouvais les photographier dans leur quotidien, quand ils s’occupent de leurs enfants, simplement.”
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Sa série Father a commencé avec des images de ses amis avant de s’étendre à des inconnus “afin de rencontrer des pères aux histoires et expériences différentes” de la sienne. S’imaginant que la plupart des personnes à qui il s’adresserait se réjouiraient d’avoir droit à “une séance photo gratuite”, Eoin Carey a été surpris de la réticence de nombre de pères face à sa demande : “Je me suis rendu compte qu’ils étaient souvent anxieux à l’idée de voir un inconnu les immortaliser avec leur jeune enfant, ils avaient peur que leur façon d’être père soit mal vue.”
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Une ode au temps qui passe
Insistant sur la dimension documentaire du projet, le photographe refusait toute mise en scène, préférant shooter avec “un petit appareil” et passer “autant de temps que possible avec l’enfant”. C’est “en discutant avec les pères” et passant du temps avec les enfants qu’il a bâti des relations de confiance avec ses modèles. Ses images se concentrent sur l’éphémère, les petits moments du quotidien sur lesquels on ne s’attarde pas : “Il y a tant de choses que nous ne voyons pas ou n’avons pas l’énergie de voir quand on s’occupe d’un petit être”, se remémore Eoin Carey.
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À travers son projet (qu’il aurait aimé voir plus diversifié, souligne-t-il), le photographe souhaite montrer “la paternité dans ce qu’elle a de tendre, d’attentionné, d’aimant”, des caractéristiques “peu mises en avant, en public ou en photo” qui puissent parler à tous les hommes, notamment “ceux qui ne montrent ou ne parlent pas forcément de ces côtés-là”.
Son ouvrage vise à normaliser des images de pères s’occupant de leurs enfants, dans l’idée que le domaine de la parentalité ne soit pas réservé aux femmes dans l’imaginaire collectif visuel. Les photographies n’ont pas vocation à ériger les hommes qui s’occupent de leurs enfants en demi-dieux, mais plutôt à rappeler qu’il s’agit là de scènes tout à fait ordinaires. “Je voulais montrer et nuancer la paternité parce qu’elle est souvent truffée de stéréotypes sur des pères héroïques, incompétents ou absents. La vérité, ce n’est pas que ça et les pères composent une partie très importante de la vie de leurs enfants.”
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