Le 5 octobre 2017, le New York Times publiait une enquête révélant des accusations de harcèlement sexuel contre Harvey Weinstein, l’un des hommes les plus puissants d’Hollywood. Cet article a eu l’effet d’une bombe et les histoires de huit femmes racontées ont encouragé d’autres femmes à parler. À la fin de l’année 2017, elles étaient plus de trente à avoir témoigné contre le directeur.
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Au tribunal, Weinstein est inculpé de viol et de harcèlement sexuel, même s’il est finalement libéré après avoir payé une caution d’un million de dollars. Toutes les enquêtes ne sont pas clôturées pour autant et le producteur de Pulp Fiction pourrait encore être condamné à l’emprisonnement à vie en septembre.
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Mais au-delà de la tempête médiatique et juridique autour du magnat hollywoodien, on se souviendra de cette affaire parce qu’elle a libéré la parole de femmes et a permis de dénoncer des comportements inappropriés auxquels trop de femmes ont été confrontées.
En France pourtant, #Metoo, ou son équivalent #BalanceTonPorc, n’ont pas déclenché une vague de la même ampleur. Le mouvement a même été reçu avec réticence dans certains milieux, notamment par les 100 signataires — dont Catherine Deneuve — de la tribune parue dans Le Monde qui défendaient “la drague insistante ou maladroite”.
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Au vu des récentes accusations contre Luc Besson (à peu près l’équivalent à Weinstein en termes de renom et d’importance sur le sol français), le New York Times s’est demandé pourquoi cette affaire, qui semble équivalente, n’avait pas eu un impact comparable à celle outre-Atlantique.
La France en retard
Deux raisons reviennent, d’après l’article publié aujourd’hui. D’abord, la difficulté à inculper un homme accusé de violences sexuelles lorsque les faits remontent loin dans le temps, et en parallèle, la facilité pour ce dernier à retourner les accusation et crier à la diffamation.
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D’autre part, l’article parle de facteurs culturels et se rapporte aux différentes conceptions de la sexualité dans les deux pays qui font que, selon le quotidien américain, aux États-Unis, la limite entre les comportements appropriés et ceux qui ne le sont pas, serait plus claire qu’en France.
Un article paru dans Elle tentait aussi de résoudre l’énigme. Lénaïg Bredoux, coauteure de l’enquête révélant les accusations contre Besson a déclaré :
“On se heurte à une nouvelle difficulté car l’affaire Harvey Weinstein est devenue une sorte de modèle. Désormais c’est comme s’il fallait que 100 femmes témoignent. Or là, nous avons quatre témoignages, et l’Obs un cinquième.”
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L’article du New York Times remarque aussi le peu de soutien apporté à celles ayant témoigné contre Luc Besson, dont l’actrice Sand Van Roy :
“Mme Van Roy fait face à un mur de silence au sein du cinéma français. Aucune figure importante ne lui a apporté son soutien, aucune a été accusée de comportements inappropriés.”
Pourquoi donc ce mur du silence ? Le sexisme n’existe-t-il pas dans le milieu du cinéma en France ? Est-il considéré autrement qu’aux États-Unis ? Nous en doutons. Tout comme la conclusion de l’article, finissant sur les mots de Jean-Michel Frodon, chroniqueur culte en hexagone :
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“Il y a eu des scandales dans le monde des médias en France, mais pas dans le monde du cinéma. Il n’y avait pas de raison que ce monde y échappe.”