C’est sûrement la plus belle ambiguïté de 2020. Alors que les clubs du monde entier sont à l’arrêt, que la nuit est moribonde et que l’humain ne danse plus que chez lui, la pop internationale redonne vie au style musical le plus dansant de l’histoire : le disco.
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Né au milieu des années 1970 dans un mélange du funk, soul et R’n’B propulsé par des avancées technologiques niveau studio et diffusion sonore, le disco était entièrement dévolu à la culture du club et de la danse. C’était alors une réponse festive et terre à terre face à toutes les désillusions des années 1960 : la guerre du Vietnam, les tueries de Charles Manson, les overdoses à répétition dans le rock, de Jimi Hendrix à Jim Morrison.
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La musique a besoin de souffler et le disco est un énorme poumon qui brille dans la nuit. Alors que le succès réel du disco peut s’étendre sur cinq ou sept ans, son influence est restée immuable sur les trente années qui ont suivi. Le disco est la base de nombreuses musiques électroniques comme la house et son impact culturel va s’étendre à tous les niveaux de la musique mondiale au fil des années.
Des légendes comme Donna Summer, Diana Ross, Earth, Wind and Fire, Ashford & Simpson ou encore le groupe Chic vont devenir les modèles de nombreux artistes, comme les Daft Punk qui leur rendent hommage sur “Get Lucky”, et plus largement sur leur album Random Access Memories en 2013.
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The Weeknd a aussi embrassé ce style avec “Can’t Feel My Face” qui a maintenant 5 ans et “I Feel It Coming” avec les mêmes Daft Punk, faisant référence aux années Off the Wall de Michael Jackson. La nostalgie retrouvée sur le dernier tube de The Weeknd, plutôt new wave cette fois-ci, est aussi dans l’ADN de la musique de Bruno Mars.
Ses plus gros tubes sont tout aussi imprégnés de cette structure musicale si reconnaissable avec son pied de grosse caisse régulier à 120bpm, mis en place par Giorgio Moroder sur les titres de Donna Summer. Une régularité à toute épreuve qui traverse le temps. Et en 2020, ça recommence.
Le retour de la boule à facettes pour tuer le désespoir
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Dans le clip de “Midnight Sky”, Miley Cyrus ne laisse aucune place à l’interprétation. Dès les premières images, on aperçoit un néon “Disco” et plusieurs énormes boules à facettes. Encore plus au niveau esthétique que musical, Miley rentre dans cette tendance de l’année, la reprise modernisée des clichés disco.
Niveau musical, c’est plutôt du côté de la house filtrée des années 1990 que se trouvent les influences. Max Martin et ses collègues ont saturé le son de claviers synthétiques qui sont moins symptomatiques du son disco. Mais le résultat est le même : un retour aux années d’insouciance du pur clubbing.
La boule à facettes redevient même un symbole d’optimisme dansant. Alors qu’il l’explosait à coups de talon sur la pochette de son album classique FutureSex/LoveSounds en 2006, Justin Timberlake passe carrément un clip entier avec SZA à l’intérieur d’une énorme boule à facettes.
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Le titre “The Other Side” entre aussi dans cette mouvance disco. Mais la véritable instigatrice de ce grand retour est clairement Dua Lipa avec son album Future Nostalgia sorti en mars 2020. La chanteuse anglaise avait donné le ton avec “Don’t Start Now” à la fin de l’année 2019.
Ce tube redonne tous les éléments que Giorgio Moroder avait pu mettre en place au début des années 1980. Le reste de l’album oscille entre d’autres styles musicaux, mais les extraits comme “Break My Heart”, avec son sample d’INXS à la sauce Chic, ou “Hallucinate”, avec ses arrangements de cordes, en gardent les mêmes composantes.
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Dans le clip animé de ce dernier, sorti pendant cet été de Covid-19, Dua Lipa danse sur une énorme boule à facettes en train de tourner. Le monde de la pop veut voir l’avenir qui brille.
Parmi ces artistes inclassables qui prennent ce train disco en marche, Doja Cat est bien placée avec son “Say So”. Dans le clip, c’est sa robe qui scintille de mille feux avant de finir dans une discothèque époque 70’s.
La boule à facettes est là, trônant au milieu de tout cet univers. Le grain de l’image est volontairement vieilli, la recherche d’une époque insouciante et festive est omniprésente.
Victoria Monét joue dans le même répertoire avec le clip de “Experience” avec Khalid et SG Lewis. Elle y ajoute une piste de roller, grand classique des années disco. Le top était de connaître les mouvements de John Travolta dans La Fièvre du samedi soir et de les reproduire sur des patins. Ardu.
Alternatif ou évident : le disco 2020 a tous les angles
Jessie Ware, la star anglaise du R’n’B alternatif, place aussi son grand retour en 2020 sous le signe du disco. Avec What’s Your Pleasure?, la chanteuse occupe un terrain plus pointu et minimal, proche des soirées mythiques de Larry Levan au Paradise Garage ou à The Gallery, toutes influencées par The Loft de David Mancuso.
Jessie Ware développe ce genre d’univers proche des productions SalSoul, jusqu’à celles de Blondie, qui crée l’après-disco à New York dans les années 1980. “Step into My Life” est sûrement le plus emblématique de cette nouvelle direction pour la chanteuse britannique avec son clip dans un bowling et son excellent danseur suant.
Le grand retour des divas est disco-compatible
Le disco est aussi la tendance de plusieurs retours de grandes pop stars. Lady Gaga y ajoute un côté plus dance music des années 1990, mais sur “Rain on Me”, son duo avec Ariana Grande, elle s’y abandonne parfaitement.
Madonna s’associe à Dua Lipa et Missy Elliott pour un remix de “Levitate”, qui se fond aussi dans ce pouvoir de la piste de danse vintage. Et le plus flagrant reste le retour de Kylie Minogue avec “Say Something” et son clip blindé de paillettes. Impossible de se tromper, il y a carrément un hashtag #DISCO dans la description du clip.
Le monde entier a besoin de rêver, de s’évader, de briller fort, le tout loin de la morosité ambiante. L’humanité est actuellement dans le même timing, elle cherche à éviter la mort à tout prix. Et la musique pop lui offre la réponse adéquate : de la danse, de la fête, de la joie, du disco. Profitez-en.