Un morceau de Médine étudié en terminale dans un manuel d’histoire

Publié le par Jérémie Léger,

A voir aussi sur Konbini

Élèves de terminale ES, ouvrez votre manuel d’histoire : vous pourriez bien tomber sur le morceau “17 octobre” de Médine, dans le chapitre consacré à la guerre d’Algérie.

Publicité

Publicité

Le 17 octobre 1961 est un jour particulier dans l’histoire algérienne. C’est en ce jour sanglant qu’a eu lieu la répression meurtrière, par la police française, d’une manifestation d’Algériens organisée à Paris par le Front de libération nationale (FLN, mouvement indépendantiste algérien). Cet événement tragique, qui a fait des dizaines de morts et des centaines de blessés, a marqué plusieurs générations d’Algériens et de Français d’origine algérienne. 
Médine est l’un d’eux. Profondément marqué par ce chapitre de l’histoire du pays d’origine de sa famille, il y a consacré un morceau entier : “17 octobre”, extrait de son album Table d’écoute, sorti en 2006. Son texte est d’ailleurs si parlant et bien écrit qu’il a été retenu comme document d’étude dans les manuels d’histoire de terminale ES des éditions Nathan, en 2012.

Publicité

Récemment, un élève a remarqué les mots du rappeur, accompagnés de la pochette de son album, dans son manuel. Rapidement, il a tweeté une photo de son livre en mentionnant l’artiste en question. Honoré de cette reconnaissance académique, ce dernier a retweeté le message : “Est-ce que c’est ça rentrer dans l’histoire ?”, s’est-il demandé.
Effectivement, avec une page entière lui étant dédié, difficile de lui donner tort. Néanmoins, il faut savoir que Médine n’a jamais caché sa méfiance à l’égard de l’enseignement de l’histoire par l’Éducation nationale.

“Heureusement qu’j’ai connu l’histoire avant d’connaître Fernand Nathan”

La punchline ci-dessus est issue de son morceau “#Faisgafatwa”, sorti en mai 2015. Le doute n’est pas permis : le rappeur exprime ici ses réserves concernant l’enseignement de l’histoire à l’école de la République. Curieux d’en savoir plus, un journaliste de Ballast l’avait interrogé sur la question, en 2015 :

Publicité

“Heureusement que mes parents m’ont apporté certaines valeurs, heureusement que certains de mes professeurs ont eu à cœur, par vocation, de nous apprendre l’histoire autrement que par les pages de nos manuels. Le fait que j’ai pu être plébiscité par un manuel n’y change rien.
Je me méfie des médailles car elles peuvent pendre le cou. L’Éducation nationale, je le vois d’autant plus avec le recul, était très plate. Mes parents, mes oncles et mes cousins m’ont toujours poussé à aller plus loin, à lire par moi-même. Je viens d’un milieu où lire n’est pas automatique – malheureusement.
Lire, c’est un effort. Enfant, je ne lisais que les histoires du Petit Nicolas. C’est devenu une sorte de méthode, pour moi. Une aptitude. C’est comme ça que j’ai pu réaliser qu’il existait un savoir possible en dehors de l’école – et, forcément, tu en viens à le comparer, à mettre en parallèle les différents circuits de connaissances.
Mais je ne peux pas dire, non plus, que la structure traditionnelle ne m’a pas été utile : prenez les dissertations ; elles m’ont aidé dans mes recherches alternatives ! Il existe aussi cette complémentarité. Mais l’école ne parvient pas à intéresser. Beaucoup d’entre nous auraient pu aller plus loin, et se qualifier davantage, si l’enseignement avait été moins linéaire, plus interactif.
Avec le rap, c’est ce qu’on essaie de faire : amener à l’éducation populaire par ce qui intéresse les gens, les jeunes. Le rap ou le sport, qu’on développe aussi au Havre. Je reçois régulièrement des courriers et des témoignages : des gens me disent qu’ils ont poursuivi leurs études car ils ont trouvé dans mes morceaux des valeurs qui les conduisaient à aller plus loin.
Ils m’expliquent s’être renseignés sur telle ou telle référence présente dans mes textes et me remercient pour l’impact que ces mots ont pu avoir. C’est une victoire, pour moi. Mais ça ne suffit pas. Je veux structurer ça. Créer une sorte d’académie des cultures urbaines, une académie de sport. Ma voie politique est là.”

Cette position tranchée n’enlève rien à la fierté que Médine semble toujours ressentir en 2018. Comme quoi, et n’en déplaise à certains : l’éducation par le rap est bel et bien possible.

À lire -> Rencontre : l’histoire de Médine à travers ses textes

Publicité