Malgré un témoignage, ni la Fondation Abbé Pierre ni Emmaüs n’ont alerté la production du biopic avec Benjamin Lavernhe

Publié le par Manon Marcillat,

(© Jérôme Prébois)

Au moment de la sortie du biopic, les dirigeants de la Fondation Abbé Pierre et d’Emmaüs avaient reçu depuis plusieurs mois le témoignage d’une victime.

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Suite aux multiples révélations concernant l’abbé Pierre, la production et l’équipe artistique du film L’Abbé Pierre : Une vie de combats, biopic sorti fin 2023 avec Benjamin Lavernhe dans le rôle-titre, ont condamné mardi les “crimes” commis par le religieux, accusé par une vingtaine de femmes de violences sexuelles.

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“Ces crimes, qui éclairent d’un jour totalement nouveau le destin de l’abbé Pierre, nous étaient évidemment inconnus au moment où nous avons réalisé ce film, comme ils étaient inconnus des Français”, a fait savoir l’équipe du film, qui avait gardé le silence jusqu’ici. “Nous condamnons ces crimes et tenons à témoigner avec force notre soutien total aux nombreuses victimes de l’abbé Pierre”, a-t-elle affirmé dans un communiqué.

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Le film réalisé par Frédéric Tellier a attiré plus de 800 000 spectateurs en salle. Il avait également été présenté au Festival de Cannes au printemps 2023. Pour s’approcher “au plus près de la vérité historique”, le réalisateur s’est plongé pendant plus de deux ans dans des biographies, des archives, et a côtoyé les compagnons des communautés Emmaüs, des responsables de la Fondation Abbé Pierre et des personnes qui ont connu l’abbé.

Ce rôle avait été particulièrement marquant pour Benjamin Lavernhe, l’un des acteurs les plus demandés du cinéma français, qui avait dit être “tombé amoureux” du personnage : “C’est un révolutionnaire, un homme en marche qui mène des foules.” “Il y a le béret, la canne, la silhouette, mais la vérité n’est pas forcément là. […] Il fallait arriver à le désacraliser, découvrir ses doutes et ses névroses.”

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Des agissements déjà connus

Pourtant, selon une enquête publiée par la Cellule investigation de Radio France ce vendredi 27 septembre, au moment de la sortie du film en salle en novembre 2023, les dirigeants de la Fondation Abbé Pierre et d’Emmaüs avaient reçu depuis plusieurs mois le témoignage d’une femme victime des agissements de l’homme d’Église. Elle y racontait des “contacts sur sa poitrine, lorsqu’elle était mineure, dans la maison familiale”, et un baiser forcé, plus tard, alors qu’elle était majeure. C’est suite à ce témoignage que les équipes d’Emmaüs et de la Fondation Abbé Pierre décideront de pousser les recherches grâce à l’accompagnement du groupe Egaé.

Pourtant, bien qu’impliqué dans la fabrication du biopic, les dirigeants de la Fondation Abbé Pierre et d’Emmaüs n’en ont jamais informé la production du film. “Stopper la promotion du film, cela signifiait rendre public le seul témoignage dont nous avions connaissance à l’époque”, précisent les mouvements Emmaüs. Ce n’est qu’à la veille de la publication du rapport en juillet 2024, soit six mois après la sortie du film, que Laurent Desmard, président d’honneur de la Fondation Abbé Pierre et proche de l’abbé, prévient personnellement Benjamin Lavernhe et Frédéric Tellier.

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“J’ai le sentiment d’avoir été dupé, trahi profondément par l’abbé Pierre”, a réagi Wassim Béji, le producteur du film, à la Cellule investigation de Radio France. “Nous n’avons eu aucune alerte. Nous n’avons été mis au courant de rien.” L’abbé Pierre avait déjà eu les honneurs d’un biopic en 1989 (Hiver 54, l’abbé Pierre), avec Lambert Wilson dans le rôle principal.