“C’est rare de créer une chose qui va être vue par des milliards de personnes, c’est un objet rêvé pour un designer”, confie à l’AFP Mathieu Lehanneur, créateur de la torche et de la vasque des Jeux olympiques de Paris. La torche qu’il a conçue est oblongue en deux parties parfaitement symétriques, dans un acier recyclé dont la couleur s’apparente à “un mélange d’or, d’argent et de bronze”, un “rêve”, souligne le Français dont le projet a été sélectionné parmi une douzaine par le comité d’organisation des JO.
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“Il y a aussi une dimension magique dans la torche olympique, bien au-delà du design, c’est le feu sacré”, ajoute le designer, rencontré par l’AFP à la Factory, un ancien bâtiment industriel de briques rouges dont il a fait son creuset artistique au sud de Paris. Cette dimension sacrée l’intéresse car elle “convoque des choses visibles et invisibles”, ajoute celui qui a aussi conçu le chœur d’une église romane en Poitou-Charentes, en 2011.
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“Égalité”
D’une hauteur de 70 centimètres, pesant 1,6 kilogramme, la torche, reproduite à 2 000 exemplaires, renfermera la flamme tout au long d’un relais qui doit la conduire à travers la France à partir de mai depuis le site grec d’Olympie. Ce à quoi ressemblera la vasque – le “graal” ou la coupe – qui sera allumée par le dernier des 11 000 porteur·se·s le jour de la cérémonie d’ouverture le 26 juillet à Paris, reste “confidentiel”.
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“Ce ne sera pas la même échelle mais si la torche constitue la clé d’ouverture des Jeux, la vasque en est la porte, elles sont faites pour être ensemble”, glisse le designer, qui pourrait bien “verser [sa] première larme olympique au moment de l’allumage à Paris”. Son inspiration est née d’une idée qui lui est chère : “l’égalité de traitement entre Jeux olympiques et paralympiques, entre athlètes hommes et femmes”, dit-il, assis à une longue table sur laquelle sont disposés plusieurs prototypes, entourés d’échantillons de marbre, verre et matériaux en tout genre.
“Le challenge a été d’intégrer tous les éléments” dans cet objet aux extrémités rétrécies dont “un système de brûleur” complexe qui “ne s’éteint pas quelles que soient les conditions climatiques”, explique-t-il. Mate dans sa partie haute, la torche est dotée d’ondulations brillantes dans sa partie basse, “une symbolique de la Seine qui traverse Paris”, précise-t-il.
Fil conducteur
Son fil conducteur ? “La technologie qu’on ne voit pas, la simplicité de la forme qu’un enfant pourrait dessiner et l’hommage à la nature.” “Une intelligence rare, une persévérance parfois têtue et une vision globale des choses qui l’amène à explorer des domaines inexplorés”, dit son associée, la femme d’affaires brésilienne Isabela Renno Braga.
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Depuis la création de son premier studio de design en 2001 à sa sortie de l’École Nationale Supérieure de Design Industriel à Paris, Mathieu Lehanneur veut s’adresser “au cerveau et au cœur” des gens. Le MoMA de New York a acquis son projet de sortie d’école sur le “design des médicaments” et le Centre Pompidou, à Paris, plusieurs de ses créations dont le petit frère d’un purificateur d’air à base de plantes, créé en 2007 avec l’université d’Harvard aux États-Unis.
Café du Louvre, installation au château de Chaumont, salon Air France, canapés, chaises, miroirs, lampes… Ces créations jouent sans cesse avec “des oppositions apparentes” comme lorsque le verre soutient le marbre. Il a créé sa propre marque en 2018 et installera un nouveau pied-à-terre à New York en mars. Au salon Maison & Objet du 18 au 22 janvier, qui le consacre designer de l’année, il présentera son tout dernier projet, Outonomy, un abri minimaliste renfermant “ce dont on aurait vraiment besoin sur une île déserte : moins d’avoir et plus d’être”.