Le renouveau de la scène hip-hop marseillaise, c’est de la frappe

Publié le par Jérémie Léger,

La Frappe (© Valentin Antonucci)

Plongée dans la nouvelle scène hip-hop made in Marseille, où "La Frappe" est bien plus qu'une expression...

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Orelsan, Eddy De Pretto, The Blaze, Polo & Pan, Columbine, Alpha Wann, Caballero & JeanJass, IAMDDB… Cette année encore, le festival Marsatac a montré qu’il était capable de réunir la crème de la scène hip-hop et électro française et internationale. En plus de vingt ans d’existence, il faut dire que de grands noms se sont succédé dans ce festival phare de la cité phocéenne, à l’image de la reformation de la mythique Fonky Family en 2017.

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Cela dit, pour cette nouvelle édition organisée au Parc Chanot, il était question de marquer le coup en revenant à l’essence même des valeurs de Marsatac : à savoir défricher et mettre en avant les talents de la scène hip-hop locale.

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C’est dans cette logique qu’est né le collectif La Frappe. Des artistes portés par le festival donc, mais sélectionnés par l’expertise de quatre structures locales : le média la Stud, l’agence d’événementiel Twerkistan, l’équipe Synergie Family/13Habitat et le label Only Pro.

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L’idée ? Catalyser toute l’énergie musicale de la ville pour en faire un cocktail explosif. Un cocktail de douze projets qui, rassemblés sous une seule étiquette, illustrent toute la richesse et la diversité de la relève du hip-hop marseillais. En leur donnant la possibilité de laisser parler leur art sur la scène d’un grand festival.

Ainsi, ce collectif marseillais nouvelle génération rassemble en son nom plusieurs artistes et groupes locaux. Des rappeurs : les huit MC du groupe 237 Undersea, Dirlo et STLR, mais aussi Balnika, MK, Misa, Jeem et Mina. On y trouve aussi les danseurs BBOY Hocine et BBOY Nadjibe, sans oublier les beatmakers/DJ de Twerkistan et le DJ Drastiques Mesures.

(© Valentin Antonini)

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Dans leurs disciplines respectives et dans leurs approches, les membres du crew sont tous différents, mais se rejoignent sur l’essentiel : l’amour de la musique et la volonté de construire ensemble un projet solide. Ils l’ont d’ailleurs prouvé en enflammant, pendant les deux jours d’hostilités, l’un des espaces de Marsatac déployé uniquement pour l’occasion.

Une scène ouverte dans la pure tradition des premières block parties de l’histoire du hip-hop. En mode “Peace, Unity Love & Having Fun”, avec des DJ, des MC, backers et breakers ont tout donné pour faire bouger les têtes du public venu en masse. “Dans le collectif, chacun a sa spécificité et tout le monde se complète. C’est ce qui fait notre force et je pense que ça se ressent sur scène“, explique Balnika.

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Et si les gars ont tant donné, c’est aussi grâce aux conseils avisés d’un mentor d’exception : Faf Larage, une figure du rap marseillais de la grande époque choisie pour parrainer et accompagner tout ce beau monde durant leur parcours. Pour lui, soutenir ce collectif apparaissait comme une évidence : “j’ai fait partie de ceux qui étaient présents lors de la première édition de Marsatac en 1998. Il y avait IAM, la FF 3e Œil, c’est donc dans l’ordre des choses que je sois là aujourd’hui pour soutenir La Frappe, un collectif qui incarne toute la richesse hip-hop de Marseille”.

Marseille, cité à la gloire du hip-hop

Dans les années 1990, IAM a incontestablement ouvert les portes du rap marseillais dans l’Hexagone, mais depuis, la cité phocéenne s’est développée jusqu’à devenir un véritable bastion de culture hip-hop. La FF, les Psy 4, SCH ou encore JuL, de grands noms les ont suivis jusqu’à aujourd’hui, et la planète Mars n’a jamais été aussi riche et variée en termes de culture hip-hop. 

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“La ville de Marseille dégage quelque chose d’unique qui se retrouve naturellement dans son rap. C’est très difficile à décrire, mais il en a toujours été ainsi. C’est un sentiment intérieur que tu n’éprouves pas ailleurs”, dit Faf Larage.

Le rap marseillais se veut aussi très éclectique, avec des influences très marquées en fonction des zones géographiques.

“Dans les quartiers nord, on privilégie un rap ‘de cité’ dans lequel on va parler de drogues. Dans le centre-ville, il y a plus de sonorités trap, car on y trouve des artistes avec une culture musicale faite de sons un peu plus électroniques. On a aussi des gars comme Dipson dans le neuvième, qui propose un rap plus identitaire, un rap qui dénonce”, selon Balnika.

Mais qu’importe le quartier d’où ils viennent, chacun des artistes de La Frappe est animé par la fougue et la rage de vaincre. Des sentiments liés à l’identité marseillaise profonde selon le rappeur Dirlo : “Ici, même si on ne vient pas du même quartier et que nos influences sont différentes, on œuvre tous dans le même sens, car on se sent marseillais avant tout. Cette ville est fédératrice, même si on ne vient pas du même endroit, on a le même quotidien. L’unité dans la diversité, voilà ce qu’on représente avec La Frappe”.

En tout cas, ces jeunes pousses ont bien conscience de la chance qu’ils ont et sont bien décidés à ne pas la laisser passer. D’autant plus parce qu’ils savent mieux que personne qu’il est difficile de percer aujourd’hui dans le hip-hop, encore plus à Marseille.

“À Marseille, tout le monde rappe, c’est déjà dur de s’imposer. Si les réseaux sociaux nous donnent une certaine liberté pour s’exprimer, avec la guerre du nombre de vues/streams, c’est devenu difficile de se faire une place. Il faut constamment être original et créer de nouvelles choses si on veut sortir du lot et ne pas passer à la trappe”.

Il n’est donc pas question pour eux de se laisser abattre. Bien au contraire, tous dans La Frappe ont des choses à dire et comptent bien faire passer le message jusqu’à ce qu’il pénètre les esprits. “Si on est là, ce n’est pas par hasard, on n’a rien à envier aux autres. Certes, on a été encadré, mais on a réussi à créer ensemble quelque chose de solide. À nous de donner le maximum et de kiffer ensemble pour concrétiser nos ambitions“, dit l’un des membres de 237 Undersea

L’avenir leur tend les bras, un sentiment partagé par tonton Faf, décidément très fier de ses poulains :

“Si le message de la nouvelle génération n’est plus le même que celui véhiculé par des groupes comme IAM, la FF ou le 3e Œil, ils ont une puissance qu’on n’avait pas à l’époque. Contrairement à nous, ils sont libres et n’ont besoin de personne pour percer. Ils ont la dalle, et comme ils partent de zéro, ils n’ont qu’une envie, c’est de croquer le monde et de tout péter. Ils sont dans les starting-blocks et ces groupes ont le potentiel de se retrouver en haut de l’affiche. Ils vont plier la culture !” 

Quoi qu’il en soit, La Frappe a toutes les cartes en main pour approfondir son art, marquer un peu plus le paysage hip-hop marseillais de son empreinte, et entamer son ascension vers le toit du monde. Après une première frappe concluante à Marsatac, la voie du succès leur est grande ouverte. Que la Bonne Mère les guide.