L’album Deux frères de PNL fête ses 5 ans, c’est l’heure du bilan

Publié le par Sandra Gomes,

On peut débattre mais la VAR est formelle : c’est un classique.

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L’histoire commence avec le morceau “Au DD”, sorti une quinzaine de jours avant l’album et je pense que beaucoup se souviennent où ils étaient au moment de leur premier visionnage. En juillet 1998, ils disaient que la France n’avait pas vu une liesse populaire pareille depuis la libération, je dis qu’en mars 2019 les auditeurs de rap français n’avaient plus connu un tel engouement depuis… Ah peut-être depuis Dans la légende en réalité, le précédent album du duo sorti en septembre 2016.

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Les premières secondes du clip dévoilent un Paris gris sous les nuages à la merci d’Ademo et N.O.S., qui la regardent avec indifférence depuis son point culminant. Pour eux qui ont rappé Paris (“Sur Paname”, “Porte de Mesrine”, “Dans ta rue…”), être ici aujourd’hui à la regarder de haut n’avait plus aucun sens et, avant même qu’on ait le temps d’être contents pour eux et de se rendre compte du chemin parcouru, Ademo lance : “Bats les couilles de l’Himalaya, bats les couilles j’vise plus le sommet”.

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PNL, le shōnen du rap français

PNL, c’est une épopée contée en trois albums — si l’on considère QLF comme une mixtape —, une discographie qui ressemble à un guide du passage à l’âge adulte et ses conséquences dignes des shōnens grandement référencés dans leur musique. Le monde Chico, Dans la légende et Deux frères racontent le quotidien de deux jeunes adultes qui se débattent d’abord dans les méandres d’un quotidien de survie machinal en banlieue parisienne rythmé par la débrouillardise, puis qui analysent les failles humaines qu’ils expérimentent à travers leur nouveau statut social et finalement, qui contemplent le monde d’après et d’en haut, une fois que l’on a atteint toutes les quêtes, une fois que le matériel ne motive et ne compte plus.

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Pour les plus chanceux d’entre nous, on a pu assister à un chemin extraordinaire parcouru depuis 2015 avec une ligne de conduite digne des légendes. En famille, à leur façon, sans déborder du cadre artistique, les membres de PNL se sont imposés comme un groupe majeur de l’histoire du rap en France et ont même modifié la trajectoire de celui-ci imposant des nouveaux codes esthétiques et lui donnant un nouveau souffle.

Un moment de communion

En me replongeant dans une écoute attentive de l’album, les souvenirs reviennent et me rappellent l’excitation et la joie autour de la sortie. On pourrait décortiquer ce projet pour énumérer toutes les subtilités qui en font un grand album mais rappelons-nous qu’à sa sortie, le succès a été immédiat, épidermique et se passait d’analyse.

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Alors aujourd’hui, j’ai décidé de sonder les auditeurs les plus passionnés de rap français pour leur demander de trancher à vif et de répondre à cette question fatidique, est-ce que Deux frères est le meilleur chapitre de PNL ?

“Les fans hard-core de PNL diront le pire mais je pense que c’est, de loin, le meilleur et le plus abouti. L’histoire qu’ils racontent, le retour en arrière sur leur enfance dans beaucoup de morceaux et le travail de Nk.F sont incroyables. Si un album de PNL doit faire partie du panthéon du rap français et de la musique en général, c’est celui-ci. Il aura sûrement la plus grande longévité et le temps saura lui faire honneur.” – Aymen

“La baffe que m’a mise l’enchaînement Le monde Chico /Dans la légende quand c’est sorti, je n’ai jamais revécu ça depuis, mais honnêtement, avec les cinq ans de recul que j’ai maintenant, je pense qu’il faut mettre Deux frères en numéro 1… C’est leur album le plus profond, le plus recherché et sûrement celui où les deux ont le plus trouvé leur place et leur équilibre. Pour toutes ces raisons, on est face à ce qu’ils ont fait de mieux, je pense.” – Tom

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“J’ai l’impression que chaque album de PNL est classique et est le meilleur en même temps. Ils ont tellement su marquer la période de leur sortie et, lorsqu’on regarde la fresque de leur discographie, on voit vraiment l’évolution de leur production. Deux frères, c’est le meilleur produit QLF je pense, la mélancolie, la rage, l’amour, la tristesse, ils nous ont emmenés loin. Je pense ça de cet album mais mon préféré reste Le monde Chico.” – 14coeurs

“C’est le meilleur album de PNL, avec parmi les meilleurs couplets de leur carrière (sur “Chang” par exemple), pas de déchet sur la tracklist de base (fuck le deluxe), je trouve les émotions transmises plus subtiles et profondes, avec un vrai recul sur eux-mêmes tout en gardant des moments de folie (genre “Shenmue”), et surtout le mix/mastering est in-croy-able.” – Eytan

“Je préfère Le monde Chico pour le charme des débuts, la hargne, la découverte, etc., mais ce disque est tellement parfait à tous les niveaux. C’est un des albums les plus grandioses de l’histoire du rap français, la (probable) fin d’un run historique, un mythe, un sommet.” – Andy

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L’album d’un groupe qui a atteint le sommet de son art, et après ?

La terrible idée se propageait déjà dans la team QLF et même au-delà et N.O.S est venu nous donner matière à s’inquiéter : “C’est peut-être mon dernier album”. Cette suggestion vient nous titiller dans le deuxième couplet du morceau d’annonce de sortie de l’album, “Au DD”. Allant alors contre tout ce qu’on connaît dans le rap jusqu’à présent, où l’on dénombre plus d’albums de trop que d’annonces de fin de carrière respectées et encore moins au moment même où le pic du succès est atteint. La quête semble définitivement obtenue quand on écoute cet album, l’heure est au bilan et à la contemplation, entre amertume et reconnaissance.

Deux frères évoquait déjà une prise de hauteur sur leurs vies d’artistes mais la tournée vient ancrer ce sentiment de chapitre clos et de nouvelle vie. Avec de nombreuses dates décalées en raison de la crise du Covid, les deux années passées après la sortie de l’album ont fini de transformer les rappeurs en hommes sages voire en messagers de la paix. Entre les morceaux, le groupe parle au public et propage de nombreux messages d’amour, d’appel à la paix, à la fraternité.

“La misère est si belle” était le parfait morceau pour clôturer cette grande histoire. Une guitare sèche, une rythmique ensoleillée mais lente et nostalgique pour énumérer et rendre hommage à tous les décors et personnages de leur aventure : le parfait générique de fin. Une extension de l’album viendra un peu gâcher la tracklist irréprochable — malgré la qualité de certains nouveaux morceaux — nous rappelant que nous sommes toujours dans le monde réel et que la dimension commerciale n’est jamais loin.

On ne connaît pas encore l’avenir du groupe et la suite reste imprévisible, mais cinq ans après la sortie du dernier album on peut se dire que l’histoire pourrait s’arrêter là qu’elle sera déjà bien assez épique pour entrer dans la légende.