Un tableau du Caravage (1571-1610), qui avait failli être vendu aux enchères avec une mise à prix de 1 500 euros en 2021 avant d’être attribué au grand maître italien, va être exposé au musée du Prado à Madrid. Cette huile sur toile intitulée Ecce Homo, qui représente le Christ la tête ceinte d’une couronne d’épines, est l’un des soixante tableaux au monde attribués au maître italien, spécialiste du clair-obscur, à la vie tumultueuse, lui-même oublié durant trois siècles avant que son génie ne soit de nouveau reconnu dans les années 1950.
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Alors considéré comme l’œuvre d’un membre de l’école de José de Ribera, peintre espagnol de la première moitié du XVIIe siècle connu pour ses compositions religieuses, le tableau avait été mis à prix en avril 2021 à 1 500 euros par une salle des ventes espagnole, avant que le ministère espagnol de la Culture ne bloque in extremis l’opération. Un rapport du musée du Prado avait sonné l’alarme, invoquant “des preuves documentées et stylistiques suffisantes” pour envisager que l’œuvre soit de Michelangelo Merisi da Caravaggio, dit Le Caravage.
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Après une analyse minutieuse, les spécialistes sollicité·e·s par les autorités espagnoles sont arrivé·e·s à la conclusion que ce tableau était bel et bien “une œuvre” de “l’artiste italien”, indique dans un communiqué le musée du Prado. Cela confère à cette peinture, réalisée entre 1605 et 1609, “une valeur extraordinaire”, insiste le musée madrilène, pour lequel son apparition représente “l’une des plus grandes découvertes de l’histoire de l’art”.
Le tableau, qui vient d’être restauré, sera exposé au Prado à partir du 28 mai et jusqu’au mois d’octobre, grâce à la “générosité” de son “nouveau propriétaire”, qui a accepté un “prêt temporaire”, indique le Prado. Le musée madrilène ne précise pas dans son communiqué l’identité de ce nouveau propriétaire, ni le prix auquel il a finalement acquis cette peinture.
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Spécialistes unanimes
La redécouverte de cette peinture est “un événement important” car “cela faisait plus de 45 ans” qu’on n’avait plus identifié de nouvelle “œuvre du Caravage”, assure David Garcia Cueto, responsable du département de peinture italienne du Prado. Selon les spécialistes qui se sont penché·e·s sur son histoire, cette huile sur toile de petite taille a rejoint la collection privée du roi Philippe IV d’Espagne au milieu du XVIIe siècle, avant d’être exposée dans les appartements de son fils Charles II.
Léguée à la Real Academia de San Fernando, à Madrid, elle aurait été récupérée en 1823 par l’homme d’État et diplomate espagnol Evaristo Pérez de Castro en échange d’un autre tableau, avant d’être transmise à ses descendant·e·s. Le tableau, tombé dans l’oubli, a retrouvé la lumière en avril 2021. Le prenant pour l’œuvre d’un disciple de José de Ribera, peintre espagnol du début du XVIIe siècle et grand admirateur du Caravage, une maison d’enchères madrilène l’avait mise à prix pour 1 500 euros.
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Alerté par des expert·e·s, le Prado avait sonné l’alarme, en invoquant “des preuves documentées et stylistiques suffisantes” pour envisager que l’œuvre soit du Caravage. Dans la foulée, le ministère espagnol de la Culture avait bloqué l’opération et interdit son exportation. Une intervention aujourd’hui saluée par la communauté des historien·ne·s de l’art : “les spécialistes” qui se sont penché·e·s sur ce tableau ont établi “de façon absolument unanime” qu’il s’agissait d’une peinture du maître italien, insiste David Garcia Cueto.
“Chef-d’œuvre”
Parmi les spécialistes ayant participé à l’authentification de cet Ecce Homo – une scène de la Passion du Christ régulièrement représentée dans l’art classique – figure Maria Cristina Terzaghi, professeure d’art moderne à l’université italienne Roma Tre. Le tableau “a été soumis à des images radiographiques” et à un “examen” approfondi, notamment lors de sa restauration, a raconté l’universitaire, qui s’était déplacée à Madrid dès le blocage de la vente pour ausculter le tableau.
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Or tous ces éléments montrent qu’il s’agit “bel et bien d’un chef-d’œuvre du Caravage”, a ajouté la spécialiste, évoquant pêle-mêle la nature des coups de pinceau, la composition du tableau ou l’expressivité des personnages, tous typiques du peintre italien. Qu’adviendra-t-il de cette peinture une fois passés les neuf mois d’exposition ? Selon des médias espagnols, le tableau – qui aurait été acheté 36 millions d’euros par son nouveau propriétaire, un citoyen britannique résidant en Espagne – pourrait rester montré au grand public.
Ecce Homo “ne va pas finir au domicile de son acheteur” car ce dernier souhaite qu’il rejoigne des “collections publiques, pour le moment, sous forme de prêt”, a assuré Jorge Coll, responsable de la galerie qui s’est chargée de sa vente, au quotidien El País. Du côté du Prado, on se dit toutefois prudent. “C’est une œuvre privée donc son propriétaire aura le dernier mot”, rappelle Miguel Falomir.