Ils représentent la nouvelle vague du rap français. Freestyles, interviews, photos : de leur style à leur flow, voici les FRENCHMEN, par Konbini. Après Prince Waly, Demi Portion, Siboy, Sofiane, Sianna, Roméo Elvis, Ichon & Bon Gamin, et Josman : Phénomène Bizness, solide tandem sorti du Seine Zoo pour sa toute première interview.
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“Il y a eu une époque où le 94 était tout en haut de la France.”
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Phénomène Bizness est à Vitry ce que le 113 était au 9.4. Sans en forcer la représentation, John Hash & Saïga sont bien partis pour raviver le flambeau de leur département, le quatre-vingt-quatorze, un des plus importants du rap français.
Ils remplissent le seul critère des #FRENCHMEN : n’avoir sorti aucun album avant 2017. Les deux amis, qui se sont rencontrés au collège, viennent tout juste de publier leur première mixtape : Pharaon. Un projet seulement, et Phénomène Bizness nous tape dans l’oreille. Le duo de rappeurs plus que prometteur a également séduit le label de Nekfeu et du S-Crew, Seine Zoo, pour s’y installer confortablement.
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Leur talent se condense dans leur freestyle aussi incisif qu’efficace – sur une prod’ exclusive signée Black Stars, beatmaker attitré de cette série. On s’est ensuite posés pour remonter le temps, et voyager en bonne humeur de leur rencontre à aujourd’hui, avec un petit arrêt au Seine Zoo, dans une interview à retrouver au bas du freestyle).
Ils sont l'espoir du 94 et de Seine Zoo records Première interview et freestyle efficace de Phénomène Bizness
Publié par Konbini sur mercredi 12 avril 2017
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Saïga | Ah j’ai le trac [Rires].
Konbini | Vous en avez déjà fait des interviews ?
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Saïga | Non jamais.
John Hash | C’est la première.
Allez, première !
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John Hash | On avait juste fait un petit truc, vite fait ; c’était il y a quatre ans, pour une petite émission de radio. Y avait encore rien à cette époque-là.
Saïga | C’était il y a longtemps, avant Seine Zoo, avant tout. On était encore à l’arrache… C’était avant qu’on sache rapper [rires].
C’est à partir de quel moment justement que vous avez commencé à savoir faire de la musique, du coup ?
John Hash | Pour nous c’est… y a pas longtemps, hein.
Saïga | Y a deux mois ! Le temps d’apprendre à faire de la musique. On est en plein apprentissage, même si on a commencé à faire du rap depuis plus longtemps.
John Hash | C’est ça, et on considère qu’on fait des trucs bien depuis… depuis Pharaon [leur première mixtape, sortie le 10 mars 2017, ndlr].
John Hash | C’est depuis Pharaon qu’on commence à faire des trucs acceptables.
Saïga | On est très durs avec nous-mêmes. Avec comme but de toujours progresser.
Et avant ce premier projet, vous vous êtes construits comment ?
Saïga | Mais… on est sur l’interview, là ?
Ouais ouais !
John Hash | [Rires.] Ah ouais je m’étais même pas rendu compte que ça avait commencé !
Saïga | T’as fait ça bien, t’as fait ça bien !
[Rires.]
“On ne ment jamais. Jamais”
Maintenant que vous le savez, quelques petites questions basiques avant d’enchaîner… Quel est votre vrai prénom ?
John Hash | Mon prénom ?…
Saïga | Saïdou !
John Hash | Et mon prénom : Jonathan.
Quand et où êtes-vous nés ?
Saïga | À Ivry et… j’suis né…
John Hash | Tu sais plus ou quoi ? [Rires.]
Saïga | Non, non, non, j’suis né une certaine année, à Ivry-sur-Seine.
John Hash | Ah ouais, d’accord, OK. On est nés il y a quelques années de cela, moi c’était à Paris tiens d’ailleurs, dans le 12e, mais j’suis arrivé à Vitry à 2 ans.
Saïga | Et moi j’suis né à Ivry, mais j’ai toujours habité à Vitry.
Vous vous considérez de quelle génération sinon ?
John Hash | Euh… génération Zizou !
Saïga | Ouais, génération Zizou, c’est parfait. Entre 1990 et 2000.
Ah, si ça se trouve vous êtes mineurs et vous avez honte de le dire.
[Rires.]
John Hash | Attention c’est possible, hein ! Peut-être qu’on t’a menti, peut-être qu’on vient du bled…
Peut-être que c’est pas vous…
[Rires.]
Saïga | Naaan, nous on ne ment jamais. Jamais.
Du collège au studio
Qui est ce phénomène ?
John Hash | On est deux mecs de Vitry-sur-Seine, on a toujours kiffé le rap, on traînait ensemble à l’école et on s’est mis à rapper. Puis on a fait notre petit chemin comme ça, jusqu’à ce qu’on se fasse interviewer par Konbini aujourd’hui.
Saïga | On s’est rencontrés au collège, ouais.
Et c’est là où vous êtes devenus potes ?
Saïga | Non, on est devenus potes après. En fait au collège on s’entendait déjà bien, mais on ne traînait pas ensemble vu qu’on n’était pas dans la même classe. Nous on était ensemble juste en espagnol, j’étais assis devant lui et il était assis devant moi.
C’est chelou non ? Vous vous tourniez tout le temps le dos du coup [rires].
John Hash | Il inverse tout le temps tout.
[Rires.]
Saïga | Non, mais voilà, en plus on était assis tout devant, et boum, boum, on se filait nos devoirs tout ça, vu qu’on était tout le temps interrogés.
“Ça s’est toujours fait naturellement et humainement”
John Hash | Et juste après le collège, on s’est très rapidement remis en contact. Puis on se faisait écouter des trucs, etc. Je me rappelle, quand je voulais mettre un de mes sons sur YouTube, c’est lui qui me les convertissait. C’était le premier à écouter mes sons. Après, on a commencé à faire de la musique tous les deux, et on s’est dit qu’il fallait qu’on rappe ensemble.
Tout ce qu’on a fait ensemble, ça s’est toujours fait naturellement. Si tu nous avais dit, au collège, qu’on aurait fait du rap ensemble et qu’on serait encore là aujourd’hui…
Saïga | Ça aurait été inimaginable.
Comment vous est venue cette passion pour la musique ?
John Hash | Moi c’est grâce à mes origines zaïroise, j’ai toujours baigné dans la musique via mes parents et ma culture. D’abord la musique de mon pays, puis le rap est venu naturellement.
Saïga | Moi j’suis Sénégalais et Malien, pour mes origines. Voilà j’avais juste envie de le dire [Rires].
“Vitry offensif”
Sinon, j’suis tombé dans le rap un peu par hasard. Au début c’était un délire avec les mecs de ma cité, on s’est mis à rapper derrière un micro d’ordinateur et de fil en aiguille j’ai commencé à y prendre goût. Puis objectif par objectif, j’ai toujours voulu évoluer, en cherchant à progresser, tout le temps. Je me mettais en compétition avec moi-même, fallait toujours que je fasse mieux.
Et après, le fait de rapper avec John, c’est comme si il y avait une espèce de rivalité sur chaque morceau. Mais une rivalité saine, qui nous force à nous surpasser l’un et l’autre.
Vous vous souvenez du premier son que vous avez fait ensemble ?
John Hash | Euh…
Saïga | C’était un remix de Rihanna ! Non non non, c’était pas ça, j’suis un fou. C’était… “Vitry acharné”.
John Hash | Non non, ça s’appelait “Vitry offensif” !
Saïga | Vitry offensiiiiiif [rires] .
John Hash | C’était nous deux avec un frérot qui s’appelle Dexter, qui rappe plus d’ailleurs. Et c’était… en 2008, je crois.
Saïga | 2008, ouais c’est ça.
John Hash | C’est le premier son qu’on a fait ensemble, alors qu’on ne savait pas encore qu’on formerait un jour un groupe.
Le son est trouvable sur Internet ?
Saïga | Ah non [rires] .
John Hash | À ce moment-là, c’est comme si on était des associés en fait, c’était un truc de famille. Puis on s’est formé vers 2010. Avec une bonne ligne de conduite à garder, jamais de trahison entre nous ou avec les gens extérieurs.
“On n’a jamais trahi quelqu’un”
Saïga | La fidélité, c’est très important pour nous. On n’a jamais trahi quelqu’un et si on a quelque chose à lui dire, on lui dira directement. Nous l’humain, c’est archi-important. C’est très compliqué de ramener de la magie dans la musique si t’aimes pas la personne ou si c’est pas clair avec elle.
Et là, vous arrivez en 2017 avec votre premier vrai projet ensemble.
Saïga | C’est ça, même si on avait fait lancé une espèce de net tape directement sur YouTube. C’était cinq morceaux sur des faces B. Ça s’appelait Préviens les autres.
John Hash | C’était plus une sorte d’entraînement en studio, en fait, et on s’est dit ‘on balance ça gratuitement sur Internet’… en 2013.
Saïga | C’était détente quoi, carrément sur la pochette on était avec nos potes… Y a un mec dessus, d’ailleurs, qui joue à Reims en ce moment, il fait du foot en pro.
Seine Zoo
Et on en vient à Seine Zoo. Devenu label de Nekfeu et du S-Crew, sur lequel vous êtes aujourd’hui signés.
John Hash | En fait, on s’est connus avec tout le crew en… 2012. À l’époque de l’album de 1995, Paris Sud Minute. Humainement, on s’est bien entendus avec eux, dont les gars du S-Crew, etc. Ils relayaient nos morceaux, par plaisir, on faisait pas encore de son ensemble.
Et on a fait un titre avec Doums et 2zer, du S-Crew et L’Entourage, mais on restait de notre côté, on faisait nos petits trucs. Puis chacun s’invitait, que ce soit pour des scènes, pour des radios, on a fait des premières parties de concerts, etc.
Saïga | Ça a été grave humain, de ouf. Avec tous ces gars, ça s’est construit de la même manière que Phénomène Bizness. Par exemple, quand on est entre nous, on ne parle pas que de rap. On aborde d’autres sujets, des sujets de potes.
John Hash | C’est une bonne équipe, et de gros passionnés de musique avec une bonne émulation.
Saïga | C’est des personnes bien, qui nous ont grave proposé de l’aide alors qu’elles ne nous devaient rien et qu’elles étaient toutes en train de grimper. Nekfeu était en train de prendre du poids… et voilà, ça s’est fait super humainement.
Et Seine Zoo records, c’est un peu après. À la base, il y avait déjà l’album du S-Crew, Seine Zoo [sorti en 2013, ndlr].
“Le seul truc qui nous différencie, c’est qu’on vient de banlieue”
Et vous, vous vous situez où aujourd’hui dans tout ce collectif ?
Saïga | En fait… le seul truc qui nous différencie, c’est qu’on vient de banlieue. On vient de Vitry-sur-Seine, tu vois.
John Hash | C’est surtout ça.
Saïga | En fait, pour moi, le rap parisien… il est plus travaillé que le rap de banlieue. Sur ce qui est des assonances, des multi-syllabes au niveau des rimes, etc. C’est-à-dire que, techniquement et textuellement parlant, les Parisiens ont un truc en plus que les mecs de banlieue. Tu vois le délire.
Et nous, en travaillant avec eux, on a beaucoup appris en fait, en technique d’écriture, de flow… mais on a toujours gardé notre côté un peu street. Et ça en fait un mélange.
“Tant qu’on est soudés… personne ne pourra nous arrêter”
John Hash | En fait, on n’a pas pris la même direction, mais on a le même but. Exemple : avec Nekfeu, on a le même but.
C’est quoi ce but ?
Saïga | Est-ce qu’on a le droit de le dire ? [Rires.]
John Hash | On verra dans quelques années, si on a réussi à faire ce qu’on veut faire. Ça se verra de toute façon, que c’était là où on voulait aller depuis le début.
Saïga | Tant qu’on est ensemble, soudés, et qu’on continue de regarder tout droit… personne ne pourra nous arrêter.
John Hash | Plus personne ne pourra nous barrer la route, c’est mort.
Allez, on prend rendez-vous !
Rendez-vous demain soir pour le 10e épisode des FRENCHMEN.
Une série dédiée à Polo, force et courage. <3
Crédits :
- Auteur du projet et journaliste : Rachid Majdoub
- Direction artistique : Arthur King, Benjamin Marius Petit, Terence Mili
- Photos : Benjamin Marius Petit
- Vidéo (cadrage, montage) : Paul ‘Polo’ Bled, Mathias Holst, Simon Meheust, Redouane Boujdi, Adrian Platon, Maxime Touitou, Fanny
- Son : Manuel Lormel
- Remerciements : à tous les rappeurs ayant accepté de participer et à leurs équipes, à la team Konbini ayant aidé de près ou de loin, Lucille, Florent Muset, les attachés de presse cools, Julien Choquet pour la disponibilité de son enregistreur audio, Thomazi pour sa petite enceinte Supreme, XXL Magazine…