La fin d’année est toujours synonyme de moment de bilan, de regard dans le rétroviseur pour déterminer ce qu’il s’est fait de mieux les douze derniers mois. Plutôt que de se mettre tous d’accord en interne sur les 20 ou 25 meilleures productions cinématographiques, on a préféré faire autre chose : demander à tout un chacun, en tout cas aux journalistes de la rédaction ciné et à d’autres ayant vu suffisamment de films pour pouvoir fournir un top 10 personnalisé. Histoire d’avoir plus de diversité dans le choix des films.
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Évidemment, certains longs sont cités plusieurs fois (Aftersun, Anatomie d’une chute, Spider-Man: Across the Spider-Verse, Oppenheimer, Past Lives, Simple comme Sylvain, Yannick, etc.), mais il est probable que vous voyiez ici des films cités dans quasiment aucun autre classement de médias ou en ligne.
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Adrien Delage
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Non, je vous assure qu’il n’y a aucun troll dans ce classement, qui se conclut pourtant sur un simple blockbuster américain. Mais dans une année où la grande majorité des superproductions se sont plantées vénère, j’avais envie de saluer le plaisir surpris et non dissimulé que j’ai vécu devant Donjons et Dragons, un blockbuster qui ne se prend pas plus au sérieux qu’un bon film à pop-corn et qui se montre même assez créatif dans sa mise en scène inspirée, son univers foisonnant et l’introduction d’une famille dysfonctionnelle héritière de James Gunn et ses Gardiens de la Galaxie.
Mais 2023, c’est aussi d’excellents films français qui tentent des choses. En particulier Vincent doit mourir, où Karim Leklou démontre une nouvelle fois tout son talent devant une caméra. Un film de genre qui se termine en film de zombies, franchement original dans le paysage cinématographique de l’Hexagone. J’aime aussi Toni, en famille de Nathan Ambrosioni qui, du haut de ses 24 ans, impressionne pour son deuxième long-métrage avec une fable tragi-comique sur la famille et la reconversion d’une femme quarantenaire, incarnée avec brio par Camille Cottin.
J’ai également envie de saluer le retour en grâce de Michel Gondry avec Le Livre des solutions, film autobiographique qui propulse Pierre Niney comme acteur le plus drôle de l’année. Le réalisateur français est toujours aussi touchant avec sa mise en scène arts plastiques jalonnée de nostalgie et de situations cocasses qui nous replongent en enfance. Un grand moment de Cannes, et assurément le meilleur de Gondry depuis Soyez sympas, rembobinez.
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J’ai aussi pris deux grosses claques visuelles en pleine tronche cette année. D’abord avec le dernier Miyazaki, le film le moins accessible de toute sa filmo mais sûrement le plus beau, poétique et profond. Dans un autre genre, on est restés bouche bée face à Spider-Man: Across the Spider-Verse, nouvelle prouesse de Sony Animation. On a rarement vu un film d’animation mélanger avec autant de réussite folie créative et fluidité dans une œuvre qui demande à être revue des dizaines de fois pour en saisir toute l’essence et les références.
Mais mon coup de cœur de 2023, je l’accorde sans aucun doute au film le plus terrifiant et envoûtant de cette année, La Main de Danny Philippou. Une production australienne indé signée A24, qui commence en banal film d’horreur et se termine en pamphlet hyper moderne sur le rapport aux réseaux sociaux et particulièrement à TikTok. De quoi vous retourner le cerveau, à se demander ce qui est le plus horrible entre des esprits vengeurs et des vidéos virales au point d’en être glauques. On n’avait pas vu une telle maîtrise entre terreur et pleurs depuis The Haunting of Hill House de Mike Flanagan. L’ironie de la scène finale, où la spectatrice devient actrice de son propre divertissement, continuera de nous hanter pendant des nuits.
- La Main de Danny Philippou
- Spider-Man: Across the Spider-Verse de Joaquim Dos Santos, Justin K. Thompson et Kemp Powers
- Oppenheimer de Christopher Nolan
- Le Garçon et le Héron de Hayao Miyazaki
- How to Have Sex de Molly Manning Walker
- Le Livre des solutions de Michel Gondry
- Toni, en famille de Nathan Ambrosioni
- Retour à Séoul de Davy Chou
- Vincent doit mourir de Stéphan Castang
- Donjons et Dragons : L’Honneur des voleurs de Jonathan Goldstein et John Francis Daley
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Arthur Cios
L’évidence de 2023 serait de signifier l’incroyable année que fut celle-ci pour les grands noms du cinéma. Et si certains s’amusent (plus ou moins volontairement) à les omettre, difficile de ne pas être émerveillé par une année où Spielberg, Scorsese, Fincher, Nolan, Scott, Denis, Wenders, Gondry, Dupieux et des grands noms plus récents comme Gerwig, Rohrwacher, Chazelle, Serebrennikov, Edwards, Chokri, Triet ou Aster ont délivré des films assez remarquables. S’il ne fallait en retenir que quelques-uns pour un top 10 pas évident à pondre, ce serait le film le plus autobiographique d’un des plus grands noms de l’histoire du cinéma, le film le plus engagé d’un des plus grands noms de l’histoire du cinéma, le thriller faussement série B d’un des plus grands noms de l’histoire du cinéma et le biopic le plus ambitieux d’un des plus grands noms de l’histoire du cinéma.
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Mais la beauté de 2023 est qu’au milieu de ces immenses artistes, on a vu débarquer des pépites, parfois des premiers longs, parfois non, qui nous ont marqués au fer rouge. On pense à Retour à Séoul, confirmation du talent monstrueux de Davy Chou. On pense à How to Have Sex, le film le plus juste dans son écriture de l’année, et de très loin, par une cinéaste qu’il faudra suivre de très, très près, Molly Manning Walker. On pense à Le Règne animal, film de genre d’une ambition et d’une beauté quasi inédites en France. On pense à Sabotage, film passé sous les radars et pourtant d’une maestria d’écriture et de mise en scène renversante. Mais on pense surtout à Aftersun, avec la performance de Paul Mescal et Frankie Corio, qui nous a suivis toute l’année de très près et nous brise le cœur rien qu’en y repensant.
Cependant, impossible de mentionner 2023 sans parler de l’incroyable année que ce fut pour l’animation. Le top 10 implique un choix, mais il ne faudrait pas oublier la puissance de Mad God, la beauté de Linda veut du poulet !, l’énergie de The First Slam Dunk, le renouveau des Tortues Ninja ou l’innovation à déchirer le bide de Marcel le coquillage (avec ses chaussures). Mais s’il ne fallait en retenir qu’un ou deux, alors on doit mentionner le film de SF pour adultes Mars Express, objet trop rare dans le paysage du ciné français, qu’on ne cite pas que pour ce qu’il représente mais surtout parce que c’est une claque, d’écriture, de conception d’univers, de technique.
Et surtout, ce qui est sans l’ombre d’un doute le plus grand coup d’éclat de l’année, c’est le retour de Miles Morales. “Gnagnagna, c’est un film en deux parties, c’est pas vraiment un film.” Allez vous faire cuire le cul. Si vous n’êtes pas capable de déceler la maestria technique, la manière dont il détourne les codes de l’animation 3D d’une façon qui se voit imitée et copiée, devenant une nouvelle norme, son ingéniosité permanente, mais aussi son écriture de personnages parmi les mieux réussis de ces dernières années et le fait qu’il réussisse à être encore plus fou et pertinent que le premier volet… alors on ne peut plus rien pour vous.
- Spider-Man: Across the Spider-Verse de Joaquim Dos Santos, Justin K. Thompson et Kemp Powers
- The Fabelmans de Steven Spielberg
- Aftersun de Charlotte Wells
- Killers of the Flower Moon de Martin Scorsese
- Retour à Séoul de Davy Chou
- The Killer de David Fincher
- Oppenheimer de Christopher Nolan
- How to Have Sex de Molly Manning Walker
- Le Règne animal de Thomas Cailley
- Mars Express de Jérémie Périn et Sabotage de Daniel Goldhaber
Donnia Ghezlane-Lala
Cela fait maintenant un an que j’attends ce classement annuel pour placer à la première position Aftersun de Charlotte Wells. C’est chose faite. Petite claque du Festival de Deauville sortie en début d’année pour augurer la belle année de cinéma qui nous attendait, j’ai pleuré pendant trente minutes après la séance, sonnée par cette histoire père-fille et son climax. Avant ça, Corsage de Marie Kreutzer avait achevé mon année 2022 en larmes.
En écrivant ces lignes, je me rends compte que mon classement regroupe uniquement des réalisatrices (dont quatre documentaristes), à l’exception de Kristoffer Borgli, auteur de Sick of Myself, une comédie noire coming-of-age qui ne fait qu’escalader dans l’exubérance. Les Filles d’Olfa, douloureux documentaire de Kaouther Ben Hania, reconstitue les violences intrafamiliales vécues par Olfa et ses filles et se fait le reflet intime de la société tunisienne. Même démarche pour Little Girl Blue de Mona Achache, qui enquête sur la vie de sa mère en la rejouant et en l’incarnant au travers de Marion Cotillard – qui tient ici le plus grand rôle de sa carrière.
Deux autres documentaires m’ont aussi marquée : Sept hivers à Téhéran de Steffi Niederzoll, qui revient sur le combat de Reyhaneh Jabbari, une Iranienne condamnée à mort parce qu’elle a poignardé l’homme qui tentait de la violer, et Toute la beauté et le sang versé de Laura Poitras, qui suit la photographe Nan Goldin en guerre contre la famille Sackler, connue pour avoir commercialisé l’antidouleur OxyContin et reconnue comme responsable de la crise des opioïdes aux États-Unis. Le Ravissement d’Iris Kaltenbäck, qui parle davantage d’une fusion et séparation amicale que de maternité, a fait briller le duo Hafsia Herzi et Nina Meurisse à l’écran, tandis que How to Have Sex de Molly Manning Walker nous a donné à voir une nouvelle étoile : Mia McKenna-Bruce.
Past Lives de Celine Song est un film doux sur une amitié avortée, sur d’autres vies possibles et sur les liens ineffables de l’enfance : c’est ce plan de fin, où les deux ami·e·s se regardent longuement dans la nuit new-yorkaise, qui m’a eue. Et puis Greta Lee, Greta Lee… Enfin, Simple comme Sylvain de Monia Chokri, qui m’a touchée dans sa maîtrise des dialogues, du comique, et qui m’a éblouie par son soin apporté à l’image. Le plan final, dans la station-service, est une photographie qui nous restera longtemps en tête.
- Aftersun de Charlotte Wells
- Les Filles d’Olfa de Kaouther Ben Hania
- Toute la beauté et le sang versé de Laura Poitras
- Sick of Myself de Kristoffer Borgli
- Sept hivers à Téhéran de Steffi Niederzoll
- Past Lives de Celine Song
- Le Ravissement d’Iris Kaltenbäck
- Little Girl Blue de Mona Achache
- How to Have Sex de Molly Manning Walker
- Simple comme Sylvain de Monia Chokri
Flavio Sillitti
Je suis gay et je suis triste – du moins si l’on en croit le top 3 de mon classement des meilleurs films de 2023. Cette année, j’ai ressenti beaucoup (trop) de choses, et j’en suis le plus heureux des gamins. J’ai d’abord ressenti la détresse de Pearl, à qui je n’ai su m’empêcher de m’attacher malgré les sautes d’humeur et les meurtres macabres, l’émotion de l’Italie dans tout ce qu’elle a de poétique avec La Chimère d’Alice Rohrwacher et l’allégresse simple, feel good et british d’une romance banale chez la jeune Raine Allen Miller.
Je me suis laissé émouvoir par l’amour impossible chez Monia Chokri, et puis évidemment rouler dessus par la scène de fin d’Aftersun. Je me suis pris en plein ventre l’hybride fascinant de Kaouther Ben Hania, tant pour son fond que pour sa forme qui m’ont tous les deux retourné l’estomac et le cœur. Pour d’autres raisons plus égocentriques, j’ai été pris de court par Sick of Myself de Kristoffer Borgli, dont les névroses de la protagoniste m’ont stupéfait de similitudes avec les miennes – et, croyez-moi, c’est une mauvaise nouvelle.
J’ai été terrassé de nostalgie et de questionnements existentiels devant le sublime Past Lives de Celine Song, son tout premier long-métrage (!) qui reste, selon moi, le plus beau film de l’année. J’ai été captivé par le rythme et le caractère de Rotting in the Sun de Sebastián Silva, que je me suis amusé à comparer à un Parasite gay et sexy et qui m’a donné des arguments pour pouvoir dire qu’un “film gay” est toujours bien plus qu’un “film gay”.
Finalement, devant tous les blockbusters et les grands feux d’artifice de cette belle année cinéma 2023, c’est bel et bien Renaissance: A Film by Beyoncé qui arrive en tête de mon classement. C’est un choix du cœur, peut-être, mais également une véritable marque de respect pour Beyoncé qui a réalisé elle-même le documentaire qui accompagne sa tournée, avec une finesse de réalisation qui n’a rien à envier aux plus grand·e·s. Et puis rien que pour l’émotion, la communion et la célébration que j’ai vues circuler dans les salles de cinéma entre les communautés noires et queers qui trouvent en ce film la safe place dont on les a trop longtemps privées, c’est la première place directement. Slay, Queen B.
- Renaissance: A Film by Beyoncé de Beyoncé
- Rotting in the Sun de Sebastián Silva
- Past Lives de Celine Song
- Sick of Myself de Kristoffer Borgli
- Les Filles d’Olfa de Kaouther Ben Hania
- Aftersun de Charlotte Wells
- Simple comme Sylvain de Monia Chokri
- Rye Lane de Raine Allen Miller
- La Chimère d’Alice Rohrwacher
- Pearl de Ti West
Lise Lanot
Depuis que j’ai vu Les Filles d’Olfa, je ne parle que de Les Filles d’Olfa, je ne pense qu’à Les Filles d’Olfa, je ne conseille que Les Filles d’Olfa. C’est mon film de l’année, et de la suivante, parce que la réalisatrice, Kaouther Ben Hania, a réussi un tour de force avec ce documentaire au sujet ô combien douloureux d’une famille brisée où cinq femmes oscillent entre les polarités lourdes du désespoir, de l’amour, de la colère, du pardon et de la sororité dans un film où la fiction tente d’adoucir les drames du réel avec intelligence et justesse.
Ce mélange périlleux se retrouve chez Mona Achache et son enquête sur sa mère et sa grand-mère, qui lui permet de briser le fantasme d’une malédiction familiale. On voit ainsi comme la libération des paroles permet l’analyse de mécanismes sociaux et de rapports de domination – en témoigne le long-métrage nécessaire de Molly Manning Walker qui passe sous le microscope l’amitié, le consentement et le regard des autres pendant l’adolescence et bien après.
Mon année a également été marquée par le cinéma palestinien, à l’instar d’Alam et de Le Piège de Huda, respectivement signés des réalisateurs Firas Khoury et Hany Abu-Assad. Chacun raconte, à sa manière, des quotidiens marqués par l’occupation israélienne : sous le prisme d’un récit initiatique qui parvient à trouver de la fraîcheur malgré son douloureux sujet pour le premier et à travers un thriller difficile à soutenir pour le second.
Enfin, en plus d’avoir été marquée par le militantisme de la photographe Nan Goldin dans le documentaire glaçant de Laura Poitras, le traitement de l’amitié, magistralement incarné par Hafsia Herzi et Nina Meurisse, dans Le Ravissement, la justesse de la réalisation de Jeanne Herry et la magnificence scénaristique et photographique d’Augure de Baloji, je me dois de souligner le travail d’Ann Sirot et Raphaël Balboni. Le Syndrome des amours passées m’a séduite grâce à son humour, son surréalisme, son esprit jamais prétentieux et son casting, qui démontrent que tout n’a pas encore été dit au sujet du couple, de l’amour et des façons de faire famille.
- Les Filles d’Olfa de Kaouther Ben Hania
- Le Syndrome des amours passées d’Ann Sirot et Raphaël Balboni
- Augure de Baloji
- Alam de Firas Khoury
- Toute la beauté et le sang versé de Laura Poitras
- How to Have Sex de Molly Manning Walker
- Little Girl Blue de Mona Achache
- Le Ravissement d’Iris Kaltenbäck
- Le Piège de Huda de Hany Abu-Assad
- Je verrai toujours vos visages de Jeanne Herry
Manon Marcillat
Découvert presque par hasard dans une petite salle loin de la Croisette au Festival de Cannes en 2022, Aftersun conserve, plus d’un an plus tard, sa place au panthéon de nos plus belles émotions de cinéma. Un film si délicat et mélancolique que l’on peine toujours à analyser au risque de rompre son fragile équilibre mais dont les fantômes bienveillants et les souvenirs nébuleux qui laissent des traces à jamais nous ont terrassés d’émotion. Cette année, les jeunes réalisatrices britanniques ont fait mouche sur nos écrans. Comme Charlotte Wells, Molly Manning Walker a réussi à créer, avec How to Have Sex, une œuvre très personnelle et pourtant universelle en nous laissant, elle aussi, l’espace pour y apposer notre expérience personnelle et ainsi combler les ellipses et les nombreux silences de son portrait adolescent tragiquement pertinent.
Le Festival de Cannes 2023 a également frappé fort en sélectionnant en compétition officielle Anatomie d’une chute de Justine Triet, Perfect Days de Wim Wenders et La Chimère d’Alice Rohrwacher. La première, avant même de remporter la Palme d’or, confirmait son statut de plus grande réalisatrice française avec ce quatrième long-métrage magistral qui mêle à la perfection l’intime féminin à une histoire plus grande, plus complexe, plus politique, où réalisatrice, scénaristes et acteurs y sont au sommet de leur art. De son côté, le grand maître allemand nous a une nouvelle fois livré son observation sensible de l’errance et la solitude masculine tout en nous donnant à nouveau l’envie de parcourir nos grandes mégalopoles dans un magnifique feel good movie doux-amer. Enfin, l’Italienne Alice Rohrwacher a, quant à elle, pris son temps pour réaliser un nouveau film qui ne ressemble de près ou de loin à aucun autre, empli de poésie et d’étrangeté, d’amour et de spiritualité, qui ne quitte plus nos pensées.
Un documentaire sans prétention est venu se hisser en haut de notre classement : celui de la jeune réalisatrice française Fanny Molins qui, animée par son amour des vieux rades, a documenté le funeste destin de l’Atlantic Bar, à Arles, troquet menacé de fermeture, dans un puzzle de gueules cassées que même la fiction n’aurait su écrire. Un mockumentary d’animation qui filme le récit d’émancipation d’un petit coquillage anthropomorphe à la voix invraisemblable et aux grands yeux tristes à la conquête du monde ainsi qu’une pépite du cinéma indépendant américain rattrapée in extremis (Répétition générale) nous ont également cueillis grâce à leur poésie ou leur humour délicieusement absurde.
Enfin, 2023 a définitivement scellé l’immense talent de Raphaël Quenard, dont on admire l’ambiguïté et la bizarrerie depuis le court-métrage Les Mauvais Garçons en 2020, qui a révélé toute son ambivalence dans Yannick, l’excellente farce tragi-comique de Quentin Dupieux (et dans Chien de la casse avant lui). Les ovnis Rotting in the Sun et Stéphane, dont on a chéri l’étrangeté, viennent fermer la marche de ce difficile classement.
- Aftersun de Charlotte Wells
- Anatomie d’une chute de Justine Triet
- Perfect Days de Wim Wenders
- La Chimère d’Alice Rohrwacher
- Atlantic Bar de Fanny Molins
- Marcel le coquillage (avec ses chaussures) de Dean Fleischer Camp
- Répétition générale de Molly Gordon et Nick Lieberman
- How to Have Sex de Molly Manning Walker
- Yannick de Quentin Dupieux
- Rotting in the Sun de Sebastián Silva et Stéphane de Timothée Hochet et Lucas Pastor
Paul Bled
Cette année, l’animation tire son épingle du jeu. Le virtuose Marvel Spider-Man: Across the Spider-Verse semble, pendant 2 heures et 20 minutes, pousser les limites de la créativité. Difficile de parler animation sans mentionner le maître incontesté de cet art, Hayao Miyazaki. Après dix ans d’absence, le fondateur du Studio Ghibli revient nous bercer avec Le Garçon et le Héron. L’engouement scénaristique y est peut-être un peu moindre comparé à certaines productions du cinéaste ; toutefois, retrouver l’identité du studio reste un plaisir impérissable. Et c’est sans parler du nouveau Shinkai, Suzume, ou du cyberpolar français se démarquant grâce à une animation décomplexée, Mars Express.
L’une des grandes révélations de l’année tient en un nom : Raphaël Quenard. Ce jeune comédien se démarque grâce à une verve ingénieuse saupoudrée d’une tonalité spécifique donnant une certaine allure si particulière à son phrasé. On pense bien sûr à Chien de la casse de Jean-Baptiste Durand, où Quenard est parfait en ami toxique d’un duo de potes d’un village du sud de la France, mais aussi à Yannick, un an après son passage dans Fumer fait tousser de Quentin Dupieux, où il brille, tout simplement.
Pour le reste, difficile de ne pas citer la Palme d’or de cette année, une œuvre qui interroge autant qu’elle brille, à la mise en scène aboutie et aux interprétations d’une justesse rare, ou la puissance visuelle d’Oppenheimer, qui impressionne grâce à son réalisme détonnant face à un sujet connu de tous mais rarement décortiqué avec une telle profondeur, de même que l’agréable surprise française de l’année, à savoir Le Règne animal de Thomas Cailley, ou la folie portée d’une main de maître par Ari Aster, Beau Is Afraid.
- Anatomie d’une chute de Justine Triet
- Spider-Man: Across the Spider-Verse de Joaquim Dos Santos, Justin K. Thompson et Kemp Powers
- Oppenheimer de Christopher Nolan
- Beau Is Afraid d’Ari Aster
- Le Garçon et le Héron de Hayao Miyazaki
- Suzume de Makoto Shinkai
- Le Règne animal de Thomas Cailley
- Yannick de Quentin Dupieux
- Chien de la casse de Jean-Baptiste Durand
- Mars Express de Jérémie Périn