Au cours du Festival de Cannes, Konbini vous fait part de ses coups de cœur.
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Novembre, c’est quoi ?
Le nom de Cédric Jimenez devrait vous dire quelque chose. Ce serait un bien bel euphémisme que de dire que son précédent film, Bac Nord, a fait parler de lui, et a révélé (pour de bonnes et de moins bonnes raisons) son réalisateur. Ce dernier revient avec Novembre, un film qui raconte les cinq jours d’enquête qui ont suivi les attentats du 13 novembre 2015, pour retrouver les deux terroristes.
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Le tout est porté par un casting conséquent : Jean Dujardin, Sandrine Kiberlain, Anaïs Demoustier, Lyna Khoudri, Jérémie Renier, Sofian Khammes, Sami Outalbali, Stéphane Bak… Vu les polémiques sur la politisation et la récupération par certaines personnalités de Bac Nord, on était en droit de craindre ce film. Heureusement, c’est tout l’inverse qui s’est produit.
Pourquoi c’est bien ?
Novembre soulève plusieurs questions. Sur le geste du cinéaste, et sur notre rapport à ces événements. Disons-le tout de suite : c’est un film difficile, douloureux. Cathartique, même. Jimenez a l’intelligence, et la pudeur, de ne pas trop en montrer. Insérant du cinéma dans son récit, il est obligé de montrer des choses douloureuses, mais se limite au minimum. Heureusement, car le peu que l’on voit déchire le ventre.
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Les dix premières minutes du film, qui relatent les attentats du point de vue organisationnel, font terriblement mal. Au point où l’on est en droit de se demander s’il n’était pas trop tôt pour raconter cette histoire. Outre-Atlantique, on sait comment gérer les drames nationaux à travers le septième art, avec des gestes dans la réactivité pure. Chez nous, c’est plus rare. En ce sens, il fallait tenter. Surtout, le réalisateur n’aborde pas frontalement les attentats, mais ce qui a suivi.
La pudeur se ressent aussi dans la mise en scène du cinéaste. Là où Bac Nord impressionnait par la réalisation de ses séquences d’action proches dans leur ADN de celles des blockbusters américains, Novembre est plus en retenue, moins imposant, plus timide – pudique, encore. Le fond l’emporte sur la forme.
Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de grandes séquences de poursuite, ou de tension, qui font penser à la mastria d’un Denis Villeneuve lors de son Sicario. Au contraire. C’est juste que Bac Nord est un western, un vrai, là où Novembre est un thriller, un film d’enquête qui est donc, sur le papier, plus classique. Avec le poids de cet événement traumatique, les pincettes sont énormes. Pourtant, Jimenez réussit à faire du cinéma, à créer de la tension, à émouvoir. À savoir placer sa caméra au bon moment au bon endroit.
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La comparaison avec Bac Nord semble obligatoire, et Novembre gagne au change. À travers ce souci de bien faire et d’être en retrait, de faire grandement attention à ce qu’il montre et raconte, Jimenez s’éloigne du parti pris pro-policier de son film précédent. Ici, le doute est permis. On s’éloigne d’un manichéisme lourd. Les agents ont des défauts, le protocole sert à quelque chose, chacun a une certaine pression et il y a des victimes collatérales. Tout le monde est dans un tunnel, n’a qu’un objectif, et peu d’outils. La course est lancée. Le tout porté par un casting où personne ne vole la vedette, où tout le monde est à sa place, pour un film choral.
On retient quoi ?
L’actrice qui tire son épingle du jeu : Anaïs Demoustier, de loin le personnage le plus intéressant
La principale qualité : Une intelligence de scénario qui évite les facilités, et une mise en scène suffisamment pudique
Le principal défaut : Peut-être trop douloureux à regarder pour certains
Un film que vous aimerez si vous avez aimé : Zero Dark Thirty de Kathryn Bigelow, Sicario de Denis Villeneuve et, d’une certaine manière, Bac Nord
Ça aurait pu s’appeler : Cinq jours
La quote pour résumer le film : “Un thriller cathartique, douloureux mais nécessaire”
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