Aujourd’hui, on vous raconte l’histoire incroyable de “Requiem pour un con”, le premier tube de Serge Gainsbourg, entre censure et cinéma, qui croise Jean Gabin, Antonín Dvořák et… IAM.
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En 1967, Serge Gainsbourg est un auteur-compositeur respecté, notamment pour son travail avec France Gall, Juliette Gréco ou Françoise Hardy, mais sa carrière de chanteur solo est un désastre, ses albums font des fours.
Serge essaie alors de s’installer dans le milieu du cinéma en tant qu’acteur, mais aussi compositeur de musiques de films. C’est ainsi qu’en 1966, Serge rencontre Jean Gabin sur le tournage du film Le Jardinier d’Argenteuil, où il obtient un petit rôle de cinéaste. Producteur du film, Gabin lui demandera de composer la musique. Serge accepte et commence ainsi une amitié incongrue. Bon, par contre, le film, ça va encore faire un four.
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Des débuts difficiles en chanson comme au cinéma
Mais, quelques mois plus tard, Jean Gabin s’allie avec le dialoguiste Michel Audiard et le réalisateur Georges Lautner pour Le Pacha, un film de gangsters survitaminé. Gabin est encore énervé contre Georges, car ce dernier l’avait évincé de son énorme succès, Les Tontons flingueurs, en 1963. En gros, le réalisateur lui avait préféré Lino Ventura parce qu’il était moins chiant. Bon, ça arrive.
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Pour se venger, Jean Gabin demande que son nouveau pote Serge soit intégré au film en tant que compositeur, mais aussi en tant qu’acteur dans son propre rôle. À cette époque, Serge Gainsbourg est débordé. Il propose alors un unique morceau qu’il a réalisé quelques semaines auparavant avec son arrangeur Michel Colombier.
Nommé “Requiem pour un con”, il ouvre avec un break de batterie dévastateur qui servira de ponctuation tout au long du film. Le reste de ce titre provocateur reprend une mélodie de la “Symphonie du nouveau monde” d’Antonín Dvořák. C’est une spécialité de Gainsbourg, choper des mélodies classiques de Chopin, Beethoven, ou donc Dvořák, pour les rejouer à sa sauce.
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En novembre 1967, Gabin et Gainsbourg tournent cette scène iconique en studio, où Serge répète devant un Gabin tendu qui va embarquer un des musiciens. Les deux acteurs vont se croiser mais à peine s’adresser la parole. C’est la dernière fois qu’on les voit ensemble à l’écran.
Le film sort en mars 1968, quelques semaines avant le mouvement de mai. La tension est au max et le film va faire polémique. Les censeurs détestent la vision de la police, violente et sans pitié, qu’offre le personnage de Jean Gabin. Pourtant, c’est d’actualité. Mais ils détestent encore plus la chanson titre de Serge, vulgaire et obscène. À sa sortie, le film est interdit aux moins de 18 ans et le morceau “Requiem pour un con” sera, lui, carrément interdit de diffusion en radio. Gabin appelle Serge pour lui dire : “Je crois que les censeurs se sont sentis visés par tes paroles.”
Sans radio, “Requiem pour un con” marque pourtant le premier grand coup de la carrière solo du chanteur Serge Gainsbourg. Dans les années 1970, il devient une icône de la contre-culture, de plus en plus provoc’.
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Une influence importante sur le rap mondial
En 1991, le groupe IAM reprend le fameux break de batterie de “Requiem pour un con” dans un de ses premiers morceaux, “Hold-up mental”, au début du rap français. Ils seront suivis par EPMD sur “Symphony 2000”, avec Method Man et Redman en 1999. Plus récemment cette année 2021, ce même break a été réutilisé par le duo français Butter Bullets dans son morceau “Miles Davis”.
Mais revenons en 1991, seulement quelques jours après le décès de Serge Gainsbourg. “Requiem pour un con” ressort alors dans une version remixée par son ingénieur du son Dominique Blanc-Francard, dans un style électronique et funky presque hip-hop, le tout ponctué du rire tonitruant du chanteur. Le morceau est alors énormément joué en radio et entre directement dans le top, comme un hommage renouvelé au monument de la musique francophone qui vient de disparaître.
Après des années de censure, Serge Gainsbourg s’est vengé. “Requiem pour un con” est un tube avec Jean Gabin à ses côtés. Et Antonín Dvořák. Et même un peu IAM, EPMD… Son requiem a terminé comme il a commencé, avec une caisse claire triomphale et fracassante.