Ça ne date pas d’hier : les politiques ont toujours aimé se photographier avec des gants de boxe

Publié le par Konbini avec AFP,

© Soazig de la Moissonnière

"La boxe est assez compatible avec l’exercice de la force de l’État."

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Fini, les paparazzades des joggings de Nicolas Sarkozy entouré de gardes du corps en plein Paris : la mode chez les politiques est désormais de se faire photographier les gants de boxe enfilés, en posture de combat, et Emmanuel Macron en a fait la preuve mercredi. Sur Instagram, sa photographe officielle Soazig de la Moissonnière a publié des photos très commentées du président en noir et blanc, les muscles saillants, s’attaquant avec vigueur à un sac de frappe.

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Des photos qui suivent celles de l’ex-ministre Olivier Véran, qui racontait dimanche au Figaro sa nouvelle vie de député et de médecin les gants au poing, dans une salle d’entraînement d’Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis). Mais le boxeur politique le plus connu reste Édouard Philippe, qui ne manque pas de rappeler sa passion pour la discipline. En 2016, alors maire du Havre, il étale sa passion pour le noble art dans le documentaire Édouard, mon pote de droite, qui a contribué à sa notoriété nationale.

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Propulsé un an plus tard à Matignon, où son prédécesseur Manuel Valls s’était aussi épris de ce sport et l’avait fait savoir, M. Philippe disait avoir appris de la boxe anglaise “ce qu’[il faisait] aujourd’hui, en maîtrisant l’angoisse qu’on peut avoir face à des situations angoissantes”. “La boxe est assez compatible avec l’exercice de la force de l’État”, analyse auprès de l’AFP le spécialiste de la communication politique Philippe Moreau-Chevrolet. “C’est un sport violent, mais avec des règles, comme la politique. C’est aussi l’image très théâtralisée, comme c’est souvent le cas avec Emmanuel Macron, du héros qui bat la souffrance.” “Emmanuel Macron est un technocrate qui s’essaye au style populiste, en essayant de répondre à Vladimir Poutine sur son terrain”, poursuit Philippe Moreau-Chevrolet. La communication politique du président russe repose pour beaucoup sur ces clichés où on le voit exercer sa force physique dans plusieurs domaines sportifs, notamment en boxe.

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“Codes virilistes”

Sur X/Twitter, la députée écologiste Sandrine Rousseau s’est agacée des photographies du président : “Ces codes virilistes utilisés jusqu’à l’overdose. Quelle misère du politique. Quelle défaite du progressisme. Et quelle indigence de la communication politique.” Chez les femmes politiques, Valérie Pécresse a été la première à chausser les gants, en pleine campagne des élections régionales en 2015, photographiée pendant son entraînement par Le Point.

“Mon équipe ne voulait pas, elle jugeait que cela faisait trop violent. Moi je n’étais pas d’accord. Même si c’est vécu comme un sport original pour une femme, cela donne une image de combattante”, admettait-elle. Elle a été suivie par Rachida Dati, dont le coach louait en 2021 son “vrai mental de boxeur” qui “ne lâche pas”. Outre-Atlantique, le combat remporté en 2012 par Justin Trudeau sur un député conservateur lors d’une rencontre caritative avait, selon certain·e·s spécialistes, contribué à son image et à son accession à la tête du Canada en 2015.

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Un sport en vogue… mais gentrifié

“Cette utilisation du sport à des fins de communication politique n’est pas nouvelle”, rappelle Michaël Attali, historien du sport à l’université Rennes-II, elle est présente depuis au moins Giscard”, qui s’est souvent mis en scène en train de skier ou sur un terrain de football, mais loin du ring. En 1988, Jean-Marie Le Pen posait déjà dans sa résidence de Montretout, à Saint-Cloud (Hauts-de-Seine), torse nu et gants aux poings, le regard rieur.

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De quoi inspirer six ans plus tard au présentateur du 20 heures de France 2, Paul Amar, une séquence devenue culte dans laquelle il distribuait des gants au candidat à la présidentielle d’extrême droite et à Bernard Tapie, convoqués pour un débat télévisuel musclé. L’attrait des politiques pour la boxe rejoint celui du grand public : de 26 000 adhérent·e·s à la Fédération française en 2021 à plus de 60 000 en 2023. Et l’image de ce sport dont les grand·e·s champion·ne·s étaient issu·e·s des classes populaires (Carpentier, Cerdan, Bénichou, Mormeck…) s’est aussi transformée, devenant de plus en plus prisée des CSP+, à mesure que les salles ont fleuri à Paris et dans les grandes villes.