Du 18 au 20 octobre, la grande foire d’art contemporain Art Basel Paris (anciennement Paris+) rouvre les portes du Grand Palais. Un événement à ne pas manquer pour découvrir les artistes et galeries qui font vibrer la scène contemporaine, et parce que l’œuvre forte de Lungiswa Gqunta sur les oppressions raciales mérite le détour. Représentée par la galerie Whatiftheworld, l’artiste présentera une installation faite de barbelés enroulés et de pierres : une œuvre qui évoque la brutalité des pratiques coloniales et dénonce l’usage encore actuel des barbelés dans de tels contextes.
Publicité
“L’expérience collective d’être une personne noire” comme moteur
Née en 1990 à Gqeberha en Afrique du Sud et installée au Cap, Lungiswa Gqunta crée des performances, gravures, sculptures et installations profondément politiques qui mettent en lumière les oppressions subies par les personnes noires et des rapports de domination solidement ancrés dans la société sud-africaine. Trente ans après la fin de l’apartheid, l’héritage postcolonial en Afrique du Sud est criant : 90 % des richesses du pays appartiennent toujours aux personnes blanches qui représentent pourtant 10 % de la population.
Publicité
Publicité
“Mon inspiration, ou mon moteur, vient de mon quotidien et de l’expérience collective d’être une personne noire et de vivre pour être libre dans ce monde”, détaille Lungiswa Gqunta. Assez tôt, l’artiste développe des affinités avec l’art comme moyen d’expression : “J’ai grandi dans une famille qui adorait et célébrait les arts. Mon grand-père était artiste visuel autodidacte, compositeur de musique et professeur et quand ma famille regardait mes dessins, elle m’identifiait souvent à lui. Enfants, on était fasciné·e·s par les dessins animés, et ça a assurément stimulé ma curiosité pour l’art.”
Complexes et subtiles, ses œuvres prennent souvent la forme d’environnements ou de paysages où le passé et le présent coexistent. Là, l’artiste s’empare d’outils de domination ou a contrario d’objets du quotidien pouvant devenir des armes dans le cadre de protestations, dans l’idée de redonner du pouvoir et de l’attention aux personnes opprimées. Ces objets et matériaux, comme le verre brisé, le béton et les barbelés, font partie du paysage des townships en Afrique du Sud, ces quartiers pauvres en périphérie des grandes villes, hérités de l’apartheid et réservés aux personnes racisées. Des objets trouvés dans l’espace public comme de vieux cadres de lit, des draps déchirés ou de l’essence lui servent aussi à souligner l’inconfort des personnes dominées.
Publicité
La violence et la beauté
À ces objets évoquant la violence, Lungiswa Gqunta associe des éléments sonores ou visuels doux afin de ramener de la chaleur dans ses œuvres. En 2019, elle abordait la question de l’héritage colonial avec son installation Riotous Assembly où elle a recréé un site de fouilles archéologiques destiné à trouver des méthodes de guérison et de résistance collectives pour les personnes noires.
En 2022, son exposition solo à l’Institut Henry-Moore s’ouvrait sur Zinodaka, une installation au sol où de l’argile craquelée et du sable évoquent les systèmes de croyances et les connaissances des ancêtres noir·e·s et leur évolution dans le temps et la société. Sans jamais mettre de côté les violences subies et les traumatismes qui en sont nés, l’artiste sud-africaine ouvre des fenêtres vers des formes de réparation et de réappropriation de ce qui a été dépouillé. Le titre de sa première exposition personnelle est éloquent : “Sleep in Witness” (Dors en témoin).
Publicité
Art Basel Paris se tiendra du 18 au 20 octobre 2024 au Grand Palais (Paris).
Publicité
Konbini, partenaire d’Art Basel Paris.