Après avoir semé quelques indices, Bridgerton nous offre enfin un peu de queerness en saison 3

Publié le par Delphine Rivet,

© Netflix

Certain·e·s fans avaient déjà su lire entre les lignes…

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Lancée en 2020 sur Netflix, La Chronique des Bridgerton ne s’est jamais cachée de tordre à l’envi une certaine réalité historique. Dans sa Régence britannique, le racisme est, par exemple, bien moins ancré qu’il ne l’était à l’époque. En plaçant sur le trône une reine métisse à la peau noire (ce sur quoi historiens et historiennes débattent encore aujourd’hui), la série autorise ici tout un imaginaire. C’est tout aussi acceptable que ses anachronismes vestimentaires, et ça ajoute une certaine inclusivité qui a fortement contribué au succès de Bridgerton.

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S’émanciper de la réalité historique, c’est aussi l’occasion de moderniser son récit, où tout tourne autour des relations amoureuses, en y apportant d’autres modèles de couples et de sexualité. Parce que la ritournelle du joli damoiseau qui brûle de désir pour sa belle, ou inversement, ça va vite user. La licence artistique permet également quelques twists par rapport aux livres de Julia Quinn, et avec sa bénédiction en plus !

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Quand le showrunner des saisons 1 et 2, Chris Van Dusen, a pris les rênes de la série, il a scrupuleusement respecté la saga littéraire, dont le premier tome a été publié il y a vingt-quatre ans. Jusqu’ici, certains personnages, pour un œil aguerri et biberonné à des décennies de protagonistes écrits comme étant queers mais sans jamais les identifier comme tel – on dit alors qu’ils sont “queer coded” –, laissaient entrevoir un autre chemin que l’hétérosexualité pour leur vie amoureuse. Des indices, par-ci par-là, étaient semés.

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On était nombreux·ses, d’abord, à s’imaginer qu’Eloise, la frangine rebelle pour qui la quête d’un mari était une torture, pouvait être lesbienne. Ses aspirations, bien éloignées de celles de ses sœurs et de sa BFF Penelope, la menaient vers une réflexion sur la condition des femmes de son époque. Vive d’esprit (trop, pour être une “fille bien”), elle aime lire, se désintéresse des sorties shopping chez la modiste et apprécie la compagnie de ses grands frères. En saison 3, on ne peut toujours pas se prononcer sur l’orientation sexuelle d’Eloise, mais le fait qu’elle soit si en avance sur son temps nous laisse quelques espoirs pour les futures saisons.

Attention, si vous n’avez pas encore englouti tous les épisodes de la saison 3, spoilers !

Benedict goûte aux plaisirs de la pansexualité

Le troisième chapitre, et en particulier sa seconde partie, nous a en revanche confirmé ce que l’on soupçonnait déjà depuis un petit moment : la queerness de Benedict. Le deuxième frère Bridgerton, qui n’a pas les responsabilités de son aîné sur les épaules, est lui aussi un personnage moderne pour son époque. Dès le début, il était en quête d’aventures et de stimulations intellectuelles… ou autres.

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Artiste, libre penseur, charmeur, aimant marcher tel un funambule sur les limites qu’impose la bonne société londonienne, Benedict a un certain goût pour la transgression. Rien d’étonnant, donc, à ce que ce dernier finisse par goûter aux plaisirs de la bisexualité en compagnie de Lady Tilley Arnold et son amant Paul. Si une forme de fluidité dans la sexualité a toujours existé au fil des siècles, les termes pour la désigner sous toutes ses formes sont évidemment très contemporains.

Pour être encore plus précis, dans le cas de Benedict, la showrunneuse de la saison 3, Jess Brownell (qui était déjà dans l’équipe d’écriture depuis la saison 1), a confirmé à Teen Vogue : “Son identité sexuelle n’est pas une conviction figée chez lui. Pour utiliser un lexique plus moderne, il pourrait se décrire comme pansexuel, quelqu’un pour qui le genre de la personne qui l’attire n’a pas d’importance.” La prochaine saison promet déjà d’approfondir sa quête de plaisir, et d’identité, par cette dernière phrase prémonitoire : “Je serai là, caché derrière un masque, évitant de potentielles prétendantes comme la peste.”

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Francesca ou la promesse d’une romance lesbienne

La vraie surprise de la saison – ou plutôt, la confirmation de nos suspicions – est arrivée tout à la fin. Au début de cette saison 3, la rumeur parmi les fans se faisait discrète mais tenace : Francesca, comme Eloise avant elle, semblait montrer un profond désintérêt pour les jeux de séduction en vue d’attraper un bon parti. Mais un certain John Stirling, comte de Kilmartin, qui semble tout aussi rasé par les us et coutumes de ses contemporains, pique soudain son intérêt.

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Les deux se retrouvent dehors, le regard plongé dans la nuit noire, sans se dire un mot, pendant que les festivités battent leur plein derrière eux. Ils étaient faits pour se rencontrer. Pourtant, si les deux semblent apprécier la compagnie de l’autre, la tension sexuelle est portée disparue. Qu’importe, ils décident, poliment, de se marier. Au moment de leur premier baiser, le visage de Francesca nous donne un indice. Ce n’est pas du dégoût, mais ce n’est clairement pas la confirmation qu’elle espérait. Dans les dernières minutes de l’ultime épisode, elle fait la connaissance de Michaela, la cousine de John.

Le regard de la jeune Bridgerton s’illumine. Feu d’artifice dans son cœur. Voilà l’évidence qu’elle appelait secrètement de ses vœux : elle a un énorme crush sur elle. Si vous avez lu les livres de Julia Quinn, dont s’est religieusement inspirée la série jusque-là, il ne vous aura pas échappé que Jess Brownell a féminisé le personnage du cousin Michael, un “gender bending” qui autorise, en 2024, à avoir une ébauche de romance lesbienne dans une fiction consacrée à l’amour, on le suppose, sous toutes ses formes.

La saison 4 de La Chronique des Bridgerton, qui n’arrivera pas avant deux ans, n’a pas intérêt à nous laisser languir sur ces deux intrigues. Benedict et Francesca ont chacun et chacune leur route à explorer, et on a hâte de faire partie du voyage !

La saison 3 de Bridgerton est disponible sur Netflix.